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DossierPrélèvement à la source : la dernière ligne droite

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1 - Pourquoi le gouvernement a-t-il hésité ?

Le prélèvement à la source a bien failli ne jamais voir le jour. Quelques mois avant la mis en place de la réforme, Emmanuel Macron a émis des doutes. Avant d'être visiblement rassuré par le ministre de l'Action et des Comptes publics, Gérald Darmanin. Des hésitations d'ordre avant tout politique.

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Mardi 4 septembre, au 20h de TF1, le chef du gouvernement Édouard Philippe a annoncé la nouvelle : le prélèvement à la source sera bien mis en place au 1er janvier 2019. Une décision attendue : quelques jours auparavant, Emmanuel Macron avait émis des doutes quant à l'instauration effective de cette réforme. Mais pourquoi le président a-t-il commencé à douter, à quelques mois de la mise en place de cette réforme ? Les avantages (notamment une meilleure captation des impôts) n'étaient peut-être plus aussi visibles par rapport aux difficultés. Parmi les "réponses précises" qu'attendait l'exécutif, se trouvaient sans aucun doute des questions d'ordre technique : l'administration fiscale et les entreprises sont-elles prêtes ? En effet, tout le monde a en tête les fiascos informatiques de l'État tels que le logiciel de paie des militaires (Louvois). Pour ne rassurer personne, une note de la DGFIP, que s'est procurée Le Parisien, aurait pointé de nombreux bugs lors des phases de tests. Et le Medef et la CPME insistaient sur les difficultés de certaines entreprises à mettre en place cette réforme...

Peur d'une impréparation psychologique des Français

Le ministère de l'Action et des Comptes publics semble avoir rassuré le président sur ce point et Gérald Darmanin a assuré par tous les moyens que l'administration était techniquement prête. Quant aux entreprises, celles de moins de 20 salariés pourront déléguer ce prélèvement à l'Urssaf via le dispositif Titre emploi service entreprise (Tese). Les autres, par contre, doivent se tenir prêtes ! Autre difficulté soulevée : les particularités du système fiscal tricolore. " Notre système d'imposition par foyer et ses nombreuses niches et réductions d'impôt ne facilitent pas le passage au prélèvement à la source ", estime Béatrice Hingand, directrice de la rédaction des Editions Francis Lefebvre et spécialiste des questions fiscales : pour elle, il aurait fallu commencer par réformer le système fiscal français. Concernant les crédits d'impôt, le gouvernement a pris les devants en annonçant le versement d'un acompte de 60 % du crédit d'impôt de l'année précédente pour les services à domicile, garde d'enfants, investissements locatifs ou encore dons à des associations.

Enfin, l'Elysée aurait redouté l'impact psychologique de ce gros changement sur le moral des Français. En effet, les salariés sont-ils prêts à voir leur salaire imputé de l'impôt ? La mesure ne risque-t-elle pas d'impacter négativement la consommation des ménages ? La vraie réponse sera connue en 2019.

À savoir

Quel aurait été le coût d'un abandon ?

Un abandon de la réforme aurait été une catastrophe d'un point de vue économique. Le gouvernement avait en effet avancé déjà énormément de frais pour mettre en place le prélèvement à la source. Christian Eckert, ancien secrétaire d'État chargé du Budget et des Comptes publics, a confié à nos confrères de Capital que le coût d'un éventuel abandon représenterait entre 100 et 200 millions d'euros : " Ce type de fourchette me paraît assez raisonnable, assure-t-il à Capital. On peut facilement compter plusieurs dizaines de millions d'euros de logiciels, idem pour la formation des agents fiscaux et plusieurs millions pour la communication. Sans parler du temps de travail des agents qui travaillent dessus depuis des années ". Les entreprises, également, avaient déjà engagé des sommes considérables, notamment les éditeurs de logiciels. " Les éditeurs ont investi en R&D et en ressources humaines depuis deux ans et attendent un retour sur investissements ", pointe Guillaume Rejou, Senior Alliance Manager chez Sage, qui souligne également l'investissement des entreprises depuis le début de l'année.

Eve Mennesson

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