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DossierLa gestion sociale des salariés

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6 - Prévenir les risques psychosociaux

Stress, harcèlement, violence... la souffrance au travail se traduit par les risques psychosociaux, un sujet dont les employeurs se sont emparés ces dernières années. La prévention s'impose comme une nécessité.

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1/ Comment définir les risques psychosociaux ?

Selon le Ministère du Travail, les risques psychosociaux (ou RPS) désignent les risques professionnels qui mettent en jeu la santé mentale et l'intégrité physique des salariés (harcèlement, stress, épuisement professionnel, violence...) et impactent la bonne marche de l'entreprise. Ils peuvent entraîner des pathologies comme la dépression, les troubles musculo-squelettiques, les maladies cardio-vasculaires ou les accidents du travail. Les RPS sont donc à la croisée de plusieurs domaines : l'organisation et le fonctionnement de l'entreprise, les paramètres collectifs et individuels.

Selon un sondage de TNS-Sofres mené fin 2011 pour l'Institut de Médecine Environnementale auprès de 7025 salariés en France, Belgique, Suisse romande et au Québec, un actif sur trois estime que son sommeil est perturbé à cause du travail (37% en France). Un tiers de nos compatriotes juge également que le travail dégrade sa santé, et 35% qu'il les épuise psychologiquement. Parmi les facteurs de mal-être au travail, l'étude de l'IME pointe en premier lieu l'hyper-investissement émotionnel au travail, qui touche 41 % des actifs, puis la démotivation liée au manque de résultat et de reconnaissance, puis l'organisation non "biocompatible" et enfin le manque d'esprit d'équipe et une communication managériale inadaptée, qui concernent 22 % des actifs.

2/ Le management de plus en plus incriminé

"Le rôle des managers dans le bien-être au travail est fondamental, souligne Dominique Deloche, consultant et expert en management. Le rapport Gollac, du Collège d'expertise sur le suivi des RPS, décrit les rapports de cause à effet entre des situations professionnelles et des pathologies avérées. La responsabilité du management de proximité intervient dans 60% des cas. " Dominique Deloche estime néanmoins qu'il faut attendre encore quatre ou cinq ans pour scientifiquement corréler une pathologie et une responsabilité du manager ou de l'entreprise. "La jurisprudence n'a pas attendu les preuves scientifiques et les mises en causes de dirigeants se multiplient ", prévient le consultant.

3/ Veiller à maintenir la productivité

L'employeur doit prendre en charge la question des RPS car la loi l'oblige à protéger la santé des salariés, mais également parce que le bien-être au travail est un gage de productivité et de résultat pour l'entreprise. En minimisant les arrêts de travail consécutifs à l'épuisement ou à la dépression, en réduisant le turn-over que connaissent les entreprises où "il ne fait pas bon travailler", l'employeur sort d'une logique financière de spéculation sur le travail pour se concentrer sur l'humain. La prévention des risques psychosociaux s'inscrit ainsi pleinement dans le cadre de la RSE (responsabilité sociétale des entreprises).

4/ Détecter les signes avant-coureurs

Certains signes doivent alerter le management: augmentation de l'absentéisme, congés non pris, défauts de production, retards de livraison ou turnover important. " Au plan individuel, un collaborateur qui se néglige, qui prend ou perd du poids rapidement, se montre agressif alors qu'il est doux ordinairement, tient des propos négatifs et a du mal à se concentrer : tous ces signaux sont révélateurs d'une détresse psychologique ", résume Matthieu Poirot, dirigeant de Midori Consulting, cabinet conseil spécialisé en ressources humaines.

5/ Investir dans la ligne managériale

Le " middle management " joue un rôle déterminant dans la captation des signes de détresse psycho-sociale. Il est en première ligne pour déceler et faire remonter les difficultés rencontrées par les salariés auprès de la hiérarchie. " C'est en créant des liens avec ses collaborateurs et en les entretenant que le manager de proximité peut instaurer une ambiance de travail sereine, explique Matthieu Poirot. Le manager doit se montrer ouvert, bienveillant, ne pas hésiter à féliciter et à épauler. Certains instaurent la pratique d'un match de basket avec leurs collaborateurs, entre midi et quatorze heures ou saisissent l'occasion d'instants de convivialité simples, comme une après-midi au vert. "

Plus les collaborateurs peuvent se retrouver et échanger entre eux, moins ils auront le sentiment d'être isolés, une sensation qui conduit vers le décrochage. Pour que le manager puisse mener à bien sa mission, encore doit-il se concentrer sur le management : " Le manager doit passer au moins 15 à 20% de son temps à faire du management, estime Dominique Deloche. Or, il est aujourd'hui pris dans des obligations de reporting auprès de sa hiérarchie ou des actionnaires, impliqué dans des projets, soumis à des objectifs pour lesquels il n'a pas toujours les moyens et se coupe peu à peu du terrain. " D'où la nécessité de convaincre la gouvernance des entreprises (le top management, comité de direction) à investir dans la ligne managériale pour que les managers " managent ".

6/ Mieux vaut prévenir que guérir

De nombreuses entreprises se sont d'ores et déjà lancées dans une sensibilisation aux RPS auprès de leurs managers, voire de leurs collaborateurs. Car tout salarié a son rôle à jouer, et le collègue d'une personne en souffrance doit lui-même prêter une oreille attentive et alerter la hiérarchie en cas de risque. " Il faut analyser méthodologique le phénomène des RPS, en commençant par inciter les directions et les salariés à établir une définition partagée avant d'engager une politique de prévention efficace", observe Yannick Jarlaud, directeur du département Santé, Sécurité et Environnement de Travail d'Alma Consulting Group, cabinet de conseil en cost consulting. Une chose est sûre : consultants et institutions publiques considèrent qu'il vaut mieux combattre les RPS à la source, ce qui suppose une remise en question de l'organisation du travail. La prévention consiste alors à améliorer l'environnement de travail, à simplifier les procédures de reporting, à rendre les objectifs plus facilement atteignables, à minimiser l'impact des changements ou des restructurations sur le quotidien des salariés.

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