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DossierLa gestion sociale des salariés

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5 - Congés payés : les droits et devoirs de l'employeur

Les règles relatives aux congés payés étant d'ordre public, la voie conventionnelle ou contractuelle ne peut jouer que pour instaurer des dispositions plus favorables aux salariés. L'employeur doit intégrer les nouvelles règles issues des prises de position de la Cour de justice de l'UE.

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1. Comment organiser l'ordre des départs ?

La période des congés est, par principe, fixée par la convention collective applicable ou à défaut par l'employeur, compte tenu des usages et après avis des représentants du personnel. Cette période de vacances doit comprendre les mois de mai à octobre inclus et doit être portée à la connaissance des salariés au moins deux mois avant son ouverture.

À l'intérieur de la période de congés, et à moins que l'ordre des départs ne résulte de la convention collective ou des usages, l'ordre est fixé par l'employeur, compte tenu de l'avis des délégués du personnel, de la situation de famille des bénéficiaires (les conjoints mariés ou pacsés travaillant dans une même entreprise ont ainsi droit à un congé simultané), de leur ancienneté... Chaque salarié est informé de ses dates de congés au moins un mois avant son départ. L'ordre des départs sera affiché dans les locaux - même si, en pratique, il arrive souvent que les obligations de l'employeur en matière d'affichage ne soient pas respectées, ce qui l'expose donc à un rappel à la loi en cas de contrôle inopiné de l'Inspection du travail, outre les autres conséquences éventuelles évoquées ci-après.

Sauf circonstances exceptionnelles, il n'est pas possible de modifier l'ordre et les dates des départs moins d'un mois avant le départ. La décision appartenant à l'employeur, le salarié ne peut décider lui-même de ses dates de congés. Mais l'inexécution par l'employeur de ses obligations en matière de fixation du planning des congés peut constituer une circonstance atténuante, voire exonératoire, de la faute de l'intéressé qui serait parti en congés sans autorisation.

2. Le fractionnement des congés : pour qui ? Pourquoi ?

Sauf exception pour des salariés qui justifient de contraintes géographiques par exemple, il n'est pas possible de prendre un congé principal de plus de 24 jours ouvrables. La 5e semaine doit être prise séparément du congé principal. Par ailleurs, le congé principal dépassant 12 jours ouvrables et au plus égal à 24 jours ouvrables peut être fractionné par l'employeur avec l'agrément du salarié. Le fractionnement du congé principal de 24 jours ouvre droit à des jours de congés supplémentaires lorsqu'une partie du congé est prise en dehors de la période légale : ainsi si le salarié prend entre 3 et 5 jours en dehors de cette période, il lui est dû un jour ouvrable supplémentaire et s'il prend 6 jours et plus, il lui sera dû 2 jours ouvrables supplémentaires. Bien entendu, employeur et salarié(s) peuvent déroger à cette règle et ainsi, un accord collectif ou individuel peut prévoir que l'employeur autorise le fractionnement des congés en le subordonnant à une renonciation du congé supplémentaire. En revanche, aucun jour supplémentaire n'est dû pour le fractionnement de la 5e semaine.

3. Comment payer le salarié pendant ses congés ?

Règle de base : durant ses congés payés, le salarié n'a pas le droit de travailler pour le compte d'un autre employeur ni d'avoir une quelconque activité rémunérée. C'est sur ce fondement que pendant les congés, l'employeur verse au salarié une indemnité de congés payés. Deux modes de calcul sont possibles (règle du maintien de ­salaire ou règle du 1/10e) et il convient de retenir la solution la plus avantageuse pour le salarié, en application du principe de faveur. Si le salarié tombe malade durant ses congés, la durée des congés n'est pas en principe prolongée et s'il y a un jour férié habituellement chômé, la durée des congés est prolongée d'une journée.

4. La CJUE et la règle des congés sur congés ne vaut

En l'état actuel du droit français, seules certaines périodes de "non-travail" sont assimilées à du travail effectif par l'article L. 3141-5 du Code du travail, principalement les périodes de congés payés en elles-mêmes, les périodes de congé maternité, congé paternité ou d'adoption, la "journée défense et citoyenneté", les périodes de congés de formation ainsi que, dans la limite d'un an, des périodes de suspension à la suite d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle.

Sont donc, pour l'instant, exclues de cette assimilation à du travail effectif les périodes pendant lesquelles le salarié est absent pour maladie d'origine non professionnelle ou pour congé parental par exemple.

Mais la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE), dans une réponse en date du 24 janvier 2012 (aff. 282/10, Dominguez) à des questions préjudicielles de la Cour de cassation datant du 2 juin 2010, remet en cause le droit français en déclarant que tout salarié a droit à 4 semaines de repos par an, y compris s'il a été absent "pour raison de santé" pendant la période de référence.

5. La CJUE et le report des CP en cas de maladie

Déjà, sous l'influence de la jurisprudence européenne, la Cour de cassation avait admis que le salarié qui se trouve dans l'impossibilité de prendre ses congés payés en raison de la maladie a la possibilité de le reporter après la date de reprise du travail (Cass. soc., 24 févr. 2009, n° 07-44-488 ; Cass. soc., 28 sept. 2011, n° 09-70.612). En la matière, la position de la CJUE est qu'une législation nationale ne peut s'opposer à ce qu'un salarié, absent pour maladie durant la période de prise de congés fixée dans l'entreprise, bénéficie à son retour des congés qu'il n'a pu prendre, même si cela intervient en dehors de la période de prise initialement prévue, ou en dehors de la période de référence (CJCE, 10 sept. 2009, aff. C-277 / 08, Vicente Pereda).

Néanmoins, toujours selon la CJUE, le report des congés payés en cas de maladie peut être limité dans le temps (CJUE, 22 nov. 2011, aff. C214/10, Schulte), car admettre un cumul illimité des droits à congés payés ne répondrait pas à la finalité même de ce droit, qui est de permettre au salarié de se reposer de son travail, et ferait peser sur l'employeur un risque trop important de difficultés que ces absences pourraient impliquer pour l'organisation du travail. Elle en conclut qu'une législation nationale ou une convention collective peut limiter la période de report des congés payés et prévoir qu'à l'expiration de ce délai, le salarié ne puisse plus y prétendre.

1er juin 2012 : des congés pour tous !
Le 24 janvier 2012, la CJUE, interrogée par la Cour de cassation dans le cadre de questions préjudicielles (Cass. soc. 2 juin 2010, n°08-44.834), a récemment considéré que subordonner le droit annuel aux congés payés à un travail effectif de 10 jours chez l'employeur n'était pas conforme à la directive du 4 novembre 2003 (Dir. 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil, 4 nov. 2003).
La loi du 22 mars 2012 est donc intervenue pour modifier l'article L. 3141-3 du Code du travail mais, pour permettre une mise à jour des logiciels de paie, l'entrée en vigueur de cette loi a été différée de 3 mois et coïncide donc avec le début de la période de référence des congés 2013 : 1er juin 2012-31 mai 2013.
Ainsi, depuis le 1er juin 2012, le droit à congés payés est ouvert dès le premier jour de travail. Cependant, le calcul de la durée du congé reste inchangé et chaque salarié a donc droit à 2,5 jours de congés payés par mois de travail effectif chez un employeur, c'est-à-dire 30 jours ouvrables de repos (5 semaines) pour une année complète de travail (du 1er juin au 31 mai). Pour un salarié bénéficiant de moins d'un mois de travail effectif, le congé sera donc calculé au prorata du temps de travail accompli.

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