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De l'art de réussir son carve-out

La 3ème édition de l'Observatoire du carve-out a mis l'accent sur les facteurs-clés de succès d'un carve-out et sur le fait que, dans un contexte de sortie de crise, le recours à ce type de cession va sans doute se multiplier pour permettre aux entreprises de se réinventer.

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De l'art de réussir son carve-out

" Quand, dans une entreprise, une activité devient moins core (essentielle -ndlr), un engrenage vicieux se met en route. Avec moins d'attention de la part de la direction générale, moins de ressources humaines et financières, il faut réagir vite pour éviter la destruction de valeur, a expliqué Nicolas de Germay, président d'Alandia et président d'honneur et fondateur de l'ARE (Association pour le Retournement des Entreprises) en préambule de la matinée organisée par Leader's League et Oneda Associés.Traiter le sujet, plutôt que de le laisser trainer, est salutaire pour rendre un avenir à une activité ! " Les nombreux intervenants qui se sont succédés au cours de la matinée ont donné les clés pour faire de cette opération de "détourage" une réussite. Très technique, elle pose de nombreux problèmes juridiques car la business unit ou l'entreprise cédée était jusqu'alors intégrée dans un fonctionnement d'ensemble dont elle va être coupée.

Le choix du repreneur, sujet stratégique

Le sujet crucial à traiter une fois la décision de céder prise est : à qui vendre ? " Au meilleur repreneur ! indique François Kopf, avocat associé au sein du cabinet Darrois Villey Maillot Brochier, en charge du département restructuring. C'est-à-dire celui qui sera à même d'assurer la pérennité de la business unit ou de l'entreprise, et non celui qui offrira le meilleur prix... " Il cite en exemple le succès de la cession de la Redoute à ses dirigeants en 2014 par le groupe Kering, qui souhaitait recentrer son activité sur le luxe. Kering avait cédé l'entreprise à un prix négatif puisqu'il avait mis près de 500 M€ sur la table pour financer l'opération : 315 M€ pour la transformation, et 180 M€ pour le volet social. L'opération s'est avérée être un succès car elle a permis au distributeur nordiste de se relancer. Deux options existent, quand on cherche un repreneur pour une business unit : soit elle a des perspectives de croissance, auquel cas il faut choisir un repreneur industriel qui aura une vision pour elle et la fera prospérer. En revanche, quand l'entreprise cédée est en grande difficulté, il faut vendre à un fonds spécialisé dans le retournement, qui parviendra à sauver ce qui peut l'être.

L'IT, pierre d'achoppement du carve-out

Une fois le repreneur choisi, le détourage entre dans sa phase technique. Il convient alors d'anticiper au maximum tout ce qui peut l'être. Ce qui, de l'avis des professionnels présents est, dans l'ordre : l'IT, la trésorerie, et bien sûr, les équipes. " Le sujet clé d'un carve-out est sans conteste l'IT, précise Marc Fontaine, ex CDO d'Airbus de 2016-2020 et aujourd'hui PDG de la société informatique InDHu. C'est une pierre d'achoppement majeure car elle peut interrompre les opérations. Au jour 1 de la reprise, il faut savoir qui fournit la messagerie pour basculer l'ensemble du personnel, il faut savoir à qui appartiennent les données et qui y a accès ? Il y a un risque de faire de mauvais choix, comme celui de reproduire un système obsolète, par exemple. " Pour le spécialiste, le risque IT s'assortit d'un risque en matière de cybersécurité : " les hackers sont attentifs aux annonces de M&A car c'est un moment de faiblesse très important dans la vie d'une entreprise. Il faut vraiment bien anticiper ce point ! "

Dans les autres points à planifier pour réussir son carve-out, vient ensuite la trésorerie. Bruno Vibert, DAF de Technip Energies, détaille ce qu'il a dû préparer en matière de trésorerie pour préparer le carve-out dont Technip Energies est issu : " il a d'abord fallu recréer une centrale de trésorerie, que l'on a déconnectée d'un côté pour la reconnecter de l'autre. Ensuite, nous avons dû revoir tous les contrats de garanties d'achèvement, un process long et qui se devait d'être exhaustif (tous les clients pouvaient essayer d'augmenter leur couverture car nous devenions plus petits...). Il a également fallu ouvrir des comptes bancaires pour la nouvelle entité, et donc séparer les activités, réaffecter certaines opérations de couverture de risque, et retravailler la dette et le financement pour nous refaire coter par les agences de notation qui ont évalué notre nouvelle capacité à faire face à nos engagements financiers. L'enjeu est de pouvoir être opérationnels dès le day one de la nouvelle entité, sachant par exemple que les premières échéances de déclarations peuvent arriver vite... " L'ensemble des opérations de préparation de la scission a pris 18 mois, avec une phase de pause liée aux confinements. " Une période motivante, se souvient-il, car elle offrait une réelle opportunité pour les équipes et également de revoir notre trajectoire et de grandir. "

Ecouter les équipes

Dans les équipes qui partent avec le spin-off, derrière l'opportunité de voir leur entreprise rebondir il y a également l'inquiétude d'avoir un nouvel actionnaire. Guillaume Cadiou, Délégué interministériel aux restructurations au Ministère de l'Economie, qui admet avoir observé " des opérations de carve-out qui se sont mal terminées ", met en garde les entreprises candidates : " il faut absolument rencontrer les salariés rapidement, car le changement d'actionnaires est un processus stressant, qui risque de démotiver les meilleurs... " Selon lui, parler franchement aux équipes, et les écouter, est l'une des tâches les plus importantes pour réussir son carve-out. C'est en effet une période dangereuse : les bons éléments, quand ils n'ont pas été récupérés par le cédant avant la vente, risquent en effet de quitter le navire.

Tout ne peut pas être anticipé !

Pour Philippe Prouvost, GP Global Strategy et M&A Executive Director chez Pernod Ricard, qui a plusieurs opérations de carve-out à son actif, " tout l'enjeu d'une préparation minutieuse du carve-out est d'assurer la continuité opérationnelle de l'entité. Ce n'est pas simple : pour des raisons de confidentialité, les internes au courant sont peu nombreux, et les consultants et avocats qui ont travaillé sur le sujet ne sont plus là dans l'étape post-deal, au moment où l'opérationnel repart. " Il met en garde cependant : " il faut arrêter de croire qu'on peut absolument tout anticiper ! Les avocats, américains notamment, passent des heures à élaborer des contrats de 1 000 pages pour tout prévoir, et, dans les faits, 50 % de ce qui arrive n'était pas prévu ! Cédant et repreneur doivent être d'accord sur les principes généraux, les formaliser dans un contrat de 50 pages, et pour le reste attendre de voir ce qui se passera vraiment ", conseille le spécialiste.



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