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DossierLa RSE, c'est aussi une affaire de Daf !

Développement durable oblige, l'entreprise doit désormais intégrer les enjeux environnementaux et sociaux dans son business model. Désormais, les enjeux liés à la RSE font donc partie des nouveaux risques à gérer pour le Daf. Retour sur les différents aspects de cette mission.

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La RSE, c'est aussi une affaire de Daf !
© Mathieu de Muizon

1 Qu'est-ce que le "développement durable" appliqué à l'entreprise ?

Le rapport Brundtland, paru en 1987, donne une définition du développement durable qui fait encore référence. Il s'agit d'un "mode de développement qui permet de satisfaire les besoins du présent sans compromettre la possibilité pour les générations futures de satisfaire les leurs".

Côté acteurs économiques, le développement durable se traduit par la responsabilité sociétale (ou sociale) des entreprises (RSE). Autrement dit, c'est la réponse des entreprises aux enjeux du développement durable par des actions en faveur de la durabilité ou de la "soutenabilité" des ressources. Expression issue de l'anglais "sustainable development", développement durable en français. Selon la définition d'Antti Hautamäki - chercheur finlandais -, le développement durable vise à préserver quatre capitaux fondant tout type de système :

- le capital matériel et financier,

- le capital sociétal et culturel (identité d'un groupe),

- le capital naturel,

- et le capital humain.

" Certains de ces éléments, comme les capitaux financier et naturel, sont limités. D'autres, comme le capital humain, sont illimités. Dans le premier cas, il faut les préserver. Dans le deuxième, il convient de les développer. C'est ainsi que doivent être compris le développement durable et son application en entreprise, la responsabilité sociale et environnementale ", indique Bruno Rebelle, directeur général de Transitions, un cabinet spécialisé en stratégie, ingénierie et communication du développement durable.

Devenue officielle en 1992, avec le Sommet de la Terre qui s'est tenu à Rio sous l'égide des Nations unies, la notion de développement durable comprend depuis trois piliers : économie, social et environnement. Elle bénéficie en 2001 de l'attention de l'Union européenne, d'où une stratégie qui décline des objectifs et instaure un dispositif de suivi et une évaluation biennale fondée sur un ensemble d'indicateurs élaborés par Eurostat.

Enfin, la France a également mis en place sa propre politique de développement durable. Celle-ci prévoit des plans d'action, notamment à travers le vote des lois dites de Grenelle : Grenelle 1, le 3 août 2009, et Grenelle 2, le 10 juillet 2010.

2 Un engagement adaptable à chaque entreprise

Au regard de ces axes, les entreprises doivent construire des plans d'action qui concilient l'économie, le social et l'environnement. Leur réussite dépend de la manière de les piloter : c'est ce que l'on appelle la "gouvernance". Une bonne gouvernance suppose un dialogue constructif avec les parties prenantes internes et externes à l'entreprise (salariés, clients, partenaires commerciaux, institutions...).

Des réglementations relatives au développement durable, comme les lois de Grenelle, imposent certaines actions aux grandes entreprises (reporting, bilan carbone). Cependant, l'intégration de la RSE dans la stratégie globale d'une entreprise repose essentiellement sur le volontariat. Ce qui rend le concept de développement durable assez flou. " Une réglementation générale ne peut exister car chaque entreprise doit pouvoir définir sa propre stratégie de développement durable en fonction de ses activités et son secteur", souligne Bruno Rebelle (Transitions). Une mission pour les directeurs administratifs et financiers ?


Mise en lumière en 1971 par l'association internationale Club de Rome, le développement durable est une problématique visant à concilier croissance économique, cohésion sociale et préservation des ressources naturelles. La notion s'est traduite en responsabilité sociétale pour les entreprises (RSE).

3 Politique RSE : quel rôle pour le Daf ?


Les évolutions induites par le développement durable font partie intégrante des paramètres de transformation de la fonction de Daf. La profession doit procéder à un changement significatif de grille de lecture et à une modification de registre. Les dimensions à couvrir s'élargissent au-delà de la "routine" des ratios financiers et de gestion conventionnels ou des seules questions d'optimisation des processus et des organisations. Ne pas s'emparer de ces sujets risque de conduire le Daf à n'avoir qu'une vision tronquée des paramètres de nature et d'origine très variées qui, demain, vont conditionner les performances de l'entreprise.

4 RSE : la difficile mutation du Daf

Cette transformation est complexe. Les principes sont relativement récents, perturbants, différents et, par conséquent, plus difficilement appréhendables au premier abord et encore moins maîtrisables que les ratios "mécanistes" de la gestion financière traditionnelle. Les référentiels élargis, qui ne sont pas encore stabilisés, sont plus complexes à concevoir et gérer que les référentiels financiers, de comptabilité ou de contrôle de gestion classiques, ce qui laisse des espaces d'innovation et de créativité importants dans ce domaine.

Quitte à ouvrir le débat, posons l'hypothèse que la direction administrative et financière devienne actrice de la transformation de sa fonction. Comment ? En abordant de façon proactive les évolutions profondes liées au développement durable et en proposant d'en animer la démarche, en totale coordination avec les acteurs-clés de l'entreprise. Même si les Daf sont attendus sur leur capacité à contribuer au pilotage stratégique, le "logiciel" de la plupart d'entre eux - et, dans une certaine mesure, le marché et les impératifs financiers poussent à ces postures - a, d'une part, été "paramétré" avec des principes qui ne tiennent pas compte de ces nouveaux critères environnementaux et sociétaux. D'autre part, ce "logiciel" est généralement calé sur un horizon à court terme, voire à très court terme ("délivrer la marge" au mois, trimestre ou à l'année), la projection à trois ou cinq ans restant souvent un exercice de style quand il est fait.

La crise de 2008, en révélant au plus grand nombre les excès d'un marché insuffisamment régulé et ses effets collatéraux, a remis au goût du jour les notions d'investissement de long terme et d'économie réelle. À l'inverse, l'investissement sur des projets ou des initiatives développement durable ou RSE est encore trop souvent considéré, notamment dans les PME, comme générateur de coût, sans effet immédiat sur le compte d'exploitation, autrement dit avec des ROI ou des paybacks insuffisants. C'est pourquoi ce sont des budgets "faciles" à geler.

Pourtant, l'image du Daf obsédé par la gestion des coûts, le maintien des marges, la génération de cash flow et de paybacks inférieurs à deux ans, en opposition à celle du manager développement durable ouvert sur l'écosystème rendu plus complexe de l'entreprise moderne, désireux d'écouter les parties prenantes et souhaitant intégrer les externalités dans les outils de pilotage, est sans doute caricaturale.

5 Comment mener une stratégie DD-RSE ?

S'il est souhaitable que les PME s'en emparent, les ETI, elles, ont une taille suffisamment importante pour leur interdire d'être discrètes sur leur dispositif en matière de développement durable et de responsabilité sociétale. Elles doivent avoir des ambitions et développer des actions cohérentes, visibles et étayées dans ce domaine. Pour autant, elles n'ont pas les moyens des grandes structures "corporate" pour mettre en place des structures et des systèmes dédiés.

Une des pistes pour favoriser l'irrigation du développement durable dans toutes les strates de l'entreprise sans créer de structure et processus additionnels est de viser l'intégration optimale dans les cycles de l'entreprise, les processus et procédures de gestion existants. L'initialisation d'une démarche DD-RSE est l'opportunité de revoir le dispositif existant dans une logique de lean management.

Pour mettre en oeuvre cette démarche, il est essentiel d'avoir en permanence le souci de l'adaptation aux moyens et à la taille de l'entreprise en termes d'allocation de ressources (temps et euros, compatibilité du plan d'action avec les tâches existantes dans tous les métiers, etc.). En ce sens, le Daf est plutôt bien placé! Mais s'il existe des lignes directrices, chaque démarche est unique et propre à chaque entreprise. C'est l'une des conditions d'appropriation par l'ensemble de la société. À chaque fois que cela sera possible, il faudra rechercher la mutualisation des dispositifs de pilotage, la chasse aux circuits parallèles en termes de reporting et d'instances de pilotage, dans l'adaptation et le réalisme d'une démarche structurée de responsabilité d'entreprise. Cette dernière nécessite un véritable volontarisme et du réalisme sur la chronologie des étapes.

En effet, tout n'est pas possible tout de suite dans un domaine qui relève du temps long et passe par le respect de chaque étape. Mais une fois la décision prise, la compréhensible inertie qui accompagne ces démarches de changement, compte tenu des enjeux traités, ne devra pas servir de prétexte à un report parce qu'une priorité à court terme ou une turbulence viendra toujours perturber sa mise en oeuvre. Ce risque est un vrai défi. Il faudra donc faire preuve de lucidité sur les arbitrages et disposer d'amortisseurs qui permettront de tenir compte des évolutions de cycles, tout en assurant une implication continue et prolongée, afin de ne pas stopper la dynamique, ce qui pourrait se révéler contre-productif en interne et en externe.

Dans cette même logique, privilégiez les actions réalisables à court terme visant à démontrer opérationnellement, via les résultats obtenus, la pertinence de la démarche. Convaincu de la supériorité d'une stratégie DDRSE qui saurait articuler, dans un même mode de management, les leviers de performance ESG et de performance financière? Vous trouverez ci-dessous une feuille de route qui vous permettra d'approcher cette vision.

Agir pour conjuguer finance et gestion d'entreprise avec développement durable, c'est une manière de réconcilier l'entreprise avec son avenir, celui de la société et de ses parties prenantes. Voici quelques explications et un plan d'action pour mener à bien ce projet.

6 Politique RSE : le rôle du commissaire aux comptes


Depuis 2013, les sociétés cotées et les entreprises non cotées de plus de 500 salariés sont tenues de mettre en place un reporting spécifique portant sur la RSE. Concrètement, comment doivent-elles procéder ?

La loi prévoit 42 thématiques, mais toutes ne sont pas pertinentes selon les profils des entreprises. Les plus importantes sont la diversité ou encore l'égalité homme-femme. Les entreprises sont habituées à ce genre de critères car ils figurent déjà dans les bilans sociaux. Les DRH les connaissent bien. Au-delà de ça, les indicateurs environnementaux sont particulièrement importants pour les entreprises industrielles : consommation d'énergie, d'eau, émission de gaz à effet de serre... Il y en a d'autres plus accessoires tels que la biodiversité, qui n'est pas toujours facile à illustrer.

Une fois que l'entreprise a déterminé les critères importants en fonction de son activité (aucun minimum n'est requis), elle doit collecter et consolider les données. À compter de 2016, toutes les entreprises, y compris les non cotées, seront soumises à un process de vérification. Actuellement, seules les entreprises cotées le sont.

C'est là qu'intervient le commissaire aux comptes ?

Oui, c'est à ce moment-là qu'intervient un organisme tiers indépendant qui peut être le commissaire aux comptes. Aujourd'hui, celui-ci n'émet qu'une attestation validant le fait que la démarche a été menée correctement. À compter de 2016, il devra en plus s'assurer que l'information transmise par l'entreprise est sincère, pertinente, et que les données ont été déterminées en fonction d'une méthodologie précise. L'idée est de conférer au reporting RSE une qualité comptable. Notre rôle n'est pas de faire du "greenwashing".

Est-ce là un pas de plus vers le reporting intégré ?

Le reporting RSE n'est pas complètement déconnecté de la notion d'integrated reporting. Mais ce dernier est seulement en train d'être testé dans une poignée d'entreprises pilotes. Par ailleurs, il ne concerne pas les ETI. Il ne s'adresse qu'aux entreprises cotées. Le reporting intégré est davantage une vision de moyen terme qui vise deux objectifs : rendre l'information pertinente et concise, et donner une vision des différents capitaux de l'entreprise (humain, immatériel, financier...). Et, très clairement, la RSE est l'un des capitaux de l'entreprise.

"Notre rôle n'est pas de faire du greenwashing". Tel est l'avertissement lancé par Jean-Luc Barlet, président du groupe de travail RSE à la Compagnie nationale des commissaires aux comptes (CNCC), qui détaille les missions du CAC dans ce cadre précis.

7 L'importance du reporting extra-financier

Avec la loi NRE de 2001, la France a engagé ses entreprises cotées dans l'exercice de l'information extra-financière, mais sans grande impulsion ni incitation à la clé. Désormais, le dispositif va fonctionner sous l'oeil vigilant des parties prenantes, qui pourront réclamer les informations que l'entreprise n'aura pas délivrées. La loi Grenelle 2 apporte plusieurs évolutions. Elle élargit le champ des entreprises concernées (celles de plus de 500 salariés), le champ des indications à fournir, en posant le principe de l'intégration dans la gouvernance - via le rapport de gestion présenté au Conseil d'administration et à l'Assemblée générale devant inclure ces données - et installe le principe de vérification par un tiers indépendant. Compte tenu de l'effort que cela nécessite au départ, la loi prévoit une progressivité dans l'application, selon la taille de l'entreprise, et l'absence de sanction, laissant aux vérificateurs et aux parties prenantes le soin de rappeler à l'ordre l'entreprise déficiente.

L'innovation importante est la fourniture de ces données, ainsi solidifiées, dans le document de référence, le rapport d'activité et sur un site accessible. Terminée la présentation à l'écart dans une plaquette de développement durable dont la crédibilité était largement contestée et la forme jugée inappropriée par les utilisateurs financiers.

Cet impératif, qui va concerner plus de 2000 entreprises en France d'ici à 2017, constitue un tournant considérable dans la transparence financière.

En attendant que ces démarches voient le jour et soient estampillées par les autorités comptables dans quelques années, apportant une meilleure transparence sur les risques et les opportunités de développement des entreprises, la démarche de communication extra-financière doit se construire méthodiquement et selon trois caractéristiques :

- Une information qui éclaire les enjeux sociétaux significatifs vis-à-vis du modèle économique et qui se fonde sur des référentiels que l'entreprise explicite, soit parce qu'ils sont de l'ordre de la conformité, soit parce qu'ils expriment ses choix.

- Des indicateurs présentés d'une façon lisible et exploitable, en termes de définition, de périmètre, de choix d'unité, d'évolution dans le temps et selon les activités et les pays, pour exprimer une matérialité économique.

- Des résultats ordonnés, priorisés, commentés pour nourrir des analyses stratégiques au plus haut niveau, des positions de management et des comparaisons sectorielles qui établiront la situation réelle de l'entreprise. La mesure extra-financière est faite pour aider les entreprises à se projeter dans le monde qui vient et à dégager des analyses et des actions qui les incitent à entrer plus rapidement dans l'économie durable, de façon rationnelle. Jusqu'ici, les meilleures l'ont fait par conviction. On attend de toutes, désormais, qu'elles le fassent par des calculs et des stratégies de management qui les rendront plus compétitives, face à la pression de la rareté, de la régulation et de l'exigence sociétale qu'on n'arrêtera pas. La compétitivité est de plus en plus extra-financière.


L'information extra-financière s'est confirmée depuis peu avec l'ouverture d'un nouveau chantier : l'intégration. Celle-ci vise à rendre cohérentes et complémentaires les données financières et extra-financières au sein d'un même document destiné aux parties prenantes de l'entreprise.

8 [Tribune] RSE : ne pas confondre notation et transparence extra-financière

Le français est-il encore cartésien ? Il est en tout cas devenu très contradictoire, si on en juge par la dernière démarche lancée par le gouvernement pour étudier la systématisation de la notation sociale et environnementale des entreprises (et qui a donné naissance au Rapport Molinié-Brovelli-Drago : lire notre actualité ).

L'idée, lancée pendant la campagne présidentielle, veut faire croire qu'en notant nos entreprises sur la place publique comme des écoliers, on rendra la vie sociale meilleure. Il est vrai qu'au classement Vigeo l'année dernière la meilleure entreprise sociale était : PSA... En mobilisant bons esprits et corps d'inspection sur le sujet, le gouvernement oublie qu'il a confirmé deux mois plutôt une obligation de transparence sociale et environnementale des entreprises, considérée comme la plus avancée au monde aujourd'hui. Cette demande de transparence extra-financière qui monte en puissance dans tous les pays a l'avantage de répondre aux exigences des marchés financiers et des autres parties prenantes qui ont besoin de données fiables pour se faire leur idée de la responsabilité des entreprises et de leur gestion des risques sociétaux; elle devrait faire l'objet d'une directive comptable de l'Europe pour contribuer à une meilleure valorisation de nos entreprises.

9 Notation sociale et environnementale des entreprises ? Cherchez le mobile...


Alors que l'appropriation de ce processus de transparence fait de plus en plus consensus, notamment chez les partenaires sociaux, et dans les entreprises les plus dynamiques, pourquoi demander une mise sur le marché de la notation extra-financière dont l'analyse au premier degré révèle vite le côté " liste noire " qu'elle induit inévitablement ?
Si on est suspicieux, on va penser à la manoeuvre d'acteurs intéressés pour se faire attribuer une rente publique, dans la grande tradition nationale ?

Si on est naïf, on va imaginer que des experts sont légitimes pour dire qui agit bien ou mal, dans une société où tout est simple et binaire comme chacun sait ?

La seule conclusion raisonnable est que nos dirigeants en phase d'apprentissage de l'enjeu RSE ont confondu la notation qui fige un jugement de tiers arbitraire, entre parties privées, avec la transparence qui donne les éléments publics de jugement, aux acteurs concernés, lesquels en tirent librement les conclusions qui leur conviennent dans leur prise de décision.

10 Une affaire de compétition au sein de l'État ?

Cette bévue ne serait pas grave si elle ne venait pas jeter une confusion préjudiciable à l'effort de reporting RSE que les entreprises accomplissent de mieux en mieux mais qui s'arrêtera si on en fait un usage culpabilisant et provocateur. Bien plus, la notation dessert la RSE dans sa logique politique qui est d'aider les acteurs à se rapprocher autour de compromis de progrès, à en discuter en confiance et leur permettre de se fixer des objectifs communs en matière sociale, environnementale, sociétale. Jamais cette démarche RSE n'est apparue aussi pertinente dans une France minée par la défiance collective, par l'inertie des acteurs institutionnels et des mécanismes de pouvoir à très courte vue.
Quelle démarche peut permettre de poser au centre de la discussion sociale la recherche d'un intérêt commun, si ce n'est la RSE qui compare les résultats du moment aux objectifs à atteindre du point de vue du développement durable ? Reprenons nos esprits et si on peut inventer un espace nouveau de négociation contractuelle entre parties prenantes, laissons leur apprécier les situations objectivement et dans leur complexité, autour de référentiels sectoriels, internationaux, qui existent de plus en plus, faits dans les règles et vérifiés ; encourageons les audaces de terrain et non les classements péremptoires.

La RSE est une idée trop précieuse et nouvelle pour être manipulée idéologiquement, alors même qu'elle doit assumer un défi de crédibilité énorme, lié à des détournements promotionnels tentants et qu'on n'a même pas installé ses codes de fonctionnement et sa reconnaissance dans la gouvernance d'entreprise. La notation est une affaire privée. La transparence extra-financière est un enjeu public. Ne perdons pas de temps à désigner les entreprises ; occupons nous à rechercher des progrès collectifs.

La commande puis le contenu même du rapport Molinié-Brovelli-Drago conduit à confondre notation et transparence. Au moment où les entreprises développent leur reporting, cela dessert la RSE dont on ne sait plus si c'est une pression institutionnelle ou une relation de marché.

11 Le bilan carbone, pour réduire les coûts

Bon nombre d'entreprises n'ont plus le choix en matière de comptabilité carbone. Depuis le décret n° 2011-829 du 11 juillet 2011 relatif au bilan des émissions de gaz à effet de serre (GES) et au plan climat énergie territorial, à partir de 500 salariés (en métropole), le bilan carbone est en effet obligatoire. Les entreprises concernées ont jusqu'au 31 décembre 2012 pour réaliser le bilan de leurs émissions de GES.

Extraite du pétrole, du gaz et du charbon, il est désormais acquis que l'énergie fossile est la grande émettrice des GES. Or, ces ressources naturelles sont épuisables et leur utilisation intensive fait flamber leur prix. À l'ère du réchauffement climatique et de la prise de conscience internationale de la nécessité de réduire les émissions de CO2, il y a fort à parier que la réglementation de 2011 va s'élargir à toutes les entreprises.

D'ailleurs, certaines petites structures, ne serait-ce que pour répondre à la demande de leurs donneurs d'ordres ou des consommateurs, ont commencé à réaliser leur bilan carbone ou plutôt leur bilan GES. Bien que rentré dans le langage courant, le Bilan Carbone® est une méthode de comptabilisation mise au point par l'Ademe (Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie). Cette solution française est devenue la propriété de l'association Bilan carbone. Mais il existe d'autres méthodes de comptabilisation comme la GreenHouseGAs Protocol Initiative. Couramment appelée "GHG protocol" et développée en partenariat avec des entreprises, des ONG et des gouvernements, cette méthode est la plus reconnue sur le plan international.

12 Les utilités du bilan carbone

Dans tous les cas, " le bilan GES permet d'identifier les postes générant le plus de CO2 en vue d'établir un plan d'action visant à limiter l'impact des activités de l'entreprise sur l'environnement ", explique Abdellatif El Assad, p-dg d'Eliadis, éditeur de logiciels, qui a lancé EliCarbon®, une solution collaborative de management des émissions de GES.

Selon la loi, la comptabilité carbone doit définir en équivalent de tonnes de dioxyde de carbone les émissions de CO2 provenant de sources fixes et mobiles nécessaires aux activités de l'entreprise (émissions directes) et celles associées à la consommation d'électricité, de chaleur ou de vapeur (émissions indirectes). Une synthèse des actions que l'entreprise envisage de mettre en oeuvre pour chaque catégorie d'émissions devra être jointe au bilan. Ces actions devront porter sur les trois années suivant l'établissement du bilan, qui doit indiquer le volume global des réductions d'émissions de GES attendues.

"Sur le plan économique, les actions en réduction des émissions de dioxyde de carbone peuvent se traduire par une baisse des coûts de fonctionnement, une amélioration de la qualité des produits ou encore en avantage concurrentiel en affichant l'empreinte carbone de son offre pour les donneurs d'ordres et les consommateurs ", insiste Abdellatif El Assad.

Le bilan carbone sert à répondre à l'impératif de réduction globale des GES, mais il reste encore difficile de déterminer la part complète du coût énergétique dans les coûts d'exploitation. " En effet, l'identification des risques énergétiques est encore sous-évaluée par les directions financières. Mais la problématique des coûts énergétiques étant inéluctable, il convient de mesurer les enjeux et de les insérer dans la planification stratégique de l'entreprise. Il va falloir procéder à un retraitement des coûts en fonction de leur nature, à partir des données comptables et analytiques traditionnelles ", constate Olivier Avril, directeur administratif et financier à temps partagé chez Acting Finances.

Quoi qu'il en soit, la réalisation d'un bilan de vos émissions de GES nécessite une expertise méthodologique et technique. Il convient donc de faire appel à un prestataire externe.

La dépendance énergétique et les émissions de gaz à effet de serre de l'entreprise donnent aujourd'hui la température de sa santé économique. Obligation légale ou exigence des parties prenantes, aucune organisation ne pourra plus se passer de mesurer ses émissions de CO2.

13 Le personnel handicapé valorise la responsabilité sociale de l'entreprise

Les mesures prises en faveur de l'emploi et de l'insertion des personnes handicapées font partie des indicateurs qui doivent figurer dans le reporting RSE des entreprises (article 225 de la loi du 12 juillet 2010 dite Grenelle 2). Par ailleurs, " les agences de notation extra-financières vérifient également les actions en faveur de la diversité pour mesurer les démarches RSE des entreprises ", confirme Farid Ben Malek, responsable des partenariats au sein du réseau Gesat (Groupement national des établissements et services d'aide par le travail).

Diagnostiquer ses besoins en capital humain : c'est la première chose que doit faire l'employeur avant d'embaucher un travailleur handicapé. Une analyse de la situation de l'entreprise face à l'emploi s'impose : besoins, contraintes et perspectives. Pour cela, il convient de se faire accompagner par les spécialistes du secteur, en particulier l'Agefiph (Association de gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées), pour bâtir un plan d'action et recruter.

14 Un accompagnement adapté à la taille de l'entreprise

Dans chaque département, l'Agefiph s'appuie sur des partenaires-services qui apportent des aides et des conseils pratiques. L'un d'entre eux, dénommé Alther, conseille les PME de moins de 250 salariés sur les questions liées à l'emploi de personnel handicapé : recrutement, intégration d'une personne, voire construction d'un projet d'entreprise.

Pour les sociétés de 250 à 2000 salariés, la délégation régionale Agefiph peut proposer la signature d'une convention qui définit un plan d'action sur deux ans, intégrant les différentes modalités de réponse à l'obligation d'emploi de personnes handicapées. La convention prévoit un engagement sur des objectifs chiffrés et le déploiement des moyens humains et financiers nécessaires à leur réalisation. L'Agefiph accompagne l'entreprise tout au long de la démarche et cofinance les actions engagées. Elle peut aussi conseiller en vue de la négociation d'un accord d'entreprise avec les partenaires sociaux. Le budget de l'accord est au moins équivalent au montant de la contribution annuelle versée à l'Agefiph. Dans ce cas, l'entreprise est exonérée de la contribution pendant toute la durée de son engagement.

Pour les sociétés comptant plus de 2000 salariés, c'est la direction des grands comptes de l'Agefiph qui accompagne l'entreprise dans sa réflexion sur l'emploi de travailleurs handicapés.

Plusieurs modes de recrutement sont possibles : emploi direct (CDI ou CDD), stage, alternance ou recours à la sous-traitance. Cette dernière solution permet à l'entreprise de s'acquitter pour 50 % de son obligation légale d'emploi de personnel handicapé. La sous-traitance est gérée par le réseau Gesat, composé de représentants d'établissements et services d'aide par le travail (Esat) et d'entreprises adaptées (EA).

15 Préparer l'intégration du travailleur handicapé

L'accueil d'un travailleur handicapé au sein d'une équipe va dans le sens de la promotion de la diversité, mais les préjugés peuvent entraver la réussite de la démarche. Il convient donc d'engager des actions de sensibilisation auprès des collaborateurs.

" Il faut préparer les managers en leur expliquant bien que l'emploi d'un travailleur handicapé crée de la valeur ajoutée, car, comme tout salarié, il apporte une compétence à l'entreprise et non un handicap ", conseille Bruno Tavernier, directeur des projets à l'agence Les Jardins de la cité, un cabinet de conseil en stratégie de responsabilité sociale. Il ajoute: " La réticence provient la plupart du temps d'une méconnaissance de la situation de handicap. Un bon moyen de casser les stéréotypes est d'expliquer que le handicap est rarement visible et que tout le monde peut être concerné à un moment où à un autre : jambe dans le plâtre, allergies ou encore cancer. "

L'intégration du travailleur handicapé se traduit aussi par une adaptation des conditions de travail : horaires aménagés, ergonomie etc. C'est également l'occasion d'associer tous les collaborateurs à une réflexion sur les risques professionnels ou la gestion du temps de travail. " Nous avons constaté sur le terrain que l'intégration d'un salarié handicapé peut faire baisser le taux des arrêts maladies, car cela relativise les petits tracas quotidiens. Le retour sur investissement est donc positif pour l'employeur ", affirme Bruno Tavernier. L'investissement peut aussi être allégé grâce aux aides financières que propose l'Agefiph.

16

Les obligations des entreprises comptant plus de 20 salariés

La loi n° 2005-102 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées a renforcé les mesures en faveur de l'insertion professionnelle des personnes handicapées. Elle réaffirme l'obligation faite aux établissements de 20 salariés et plus d'employer des travailleurs handicapés dans la proportion de 6 % de leur effectif. Ce dernier se calcule en prenant en compte le nombre de salariés en CDI à la date de la déclaration et en ajoutant l'effectif des autres salariés (CDD, intérim...) au prorata de leur temps de présence au cours de l'année écoulée.

À défaut d'emploi de personnes handicapées, l'entreprise doit verser une contribution à l'Agefiph. Ainsi, chaque année, les sociétés de plus de 20 salariés sont tenues de remplir une déclaration obligatoire d'emploi des travailleurs handicapés (DOETH), qui synthétise l'ensemble des actions menées en faveur de l'insertion professionnelle des travailleurs handicapés. C'est à partir de cette déclaration que l'Agefiph calcule la contribution due par l'employeur. Elle s'élève à 400 fois le Smic horaire par salarié manquant pour les entreprises de 20 à 199 salariés, 500 fois le Smic horaire de 200 à 749 salariés et 600 fois le Smic horaire pour plus de 750 salariés.

Lorsque l'entreprise n'a entrepris aucune action pendant trois ans, la contribution passe à 1 500 fois le Smic horaire, majorée de 25 % par salarié manquant.

Nota bene : sur 128 400 entreprises soumises à l'obligation d'emploi, 9 % ont un accord, 51 % remplissent leur obligation de 6 % et 40 % versent une contribution à l'Agefiph.

Au-delà de l'obligation légale de compter au moins 6 % de personnel handicapé dans vos effectifs, vous pouvez valoriser votre démarche RSE à travers une vraie politique d'emploi de personnel handicapé. Mais la réussite de cette action nécessite une vraie réflexion en amont.

17 RSE : l'investissement socialement responsable gagne du terrain

Selon les termes de l'Association française de la gestion financière et du Forum pour l'investissement responsable, la notion d'investissement socialement responsable recouvre l'application des principes du développement durable à l'investissement, d'où la prise en compte de trois dimensions : l'environnement, le social/ sociétal et la gouvernance (ESG) en sus des critères financiers usuels.

18 L'IRS progresse doucement mais sûrement

Banques et compagnies d'assurances proposent désormais des produits labellisés ISR (investissement socialement responsable). Les sociétés de gestion offrent aussi des fonds ISR. Comme l'atteste une étude de l'Institut de recherche de Novethic du 9 juin 2011, l'ISR avance certes pas à pas, mais progresse assurément. Selon cette étude, 30 % des sociétés de gestion ont une politique d'intégration de critères ESG formalisée et 35 % prévoient de la formaliser dans l'année à venir. " L'ISR va prendre de l'ampleur, car il est créateur de valeurs pour les entreprises qui doivent répondre à la demande des parties prenantes. Elles ont donc tout intérêt à aller dans le sens de l'histoire ", affirme Laurence Méhaignerie, présidente de Citizen capital partenaires, une société de gestion qui investit dans des entreprises répondant aux critères financiers et extra-financiers.

La politique environnementale, sociale et de gouvernance des entreprises peut aussi être passée au crible par les agences de notation extra-financière qui transmettent les données recueillies aux investisseurs. Les critères de notation de ces agences reflètent la norme ISO 26000. Cette dernière présente les lignes directrices d'une politique ESG pour tout type d'organisation, quelles que soient leur taille et leur localisation. " La norme doit être considérée comme un simple guide pour aider les entreprises à définir leurs propres indicateurs de reporting. Ce qui explique qu'elle ne peut pas faire l'objet de certification ", précise Olivier Graffin, coordinateur développement durable du groupe Afnor.

Certains investisseurs et actionnaires commencent à prendre en compte l'attitude socialement responsable ou non des entreprises avant de miser sur elles. D'où la mise en lumière des agences de notation extra-financière.

19 Quels indicateurs pour valoriser sa stratégie RSE ?

20 1. Comprendre le contexte réglementaire

Depuis 2001, les entreprises françaises cotées ont une obligation de reporting sur une liste de thèmes environnementaux et sociaux. Novatrice, cette disposition n'a jamais été très contraignante puisqu'elle ne définissait ni indicateurs précis, ni périmètre, et n'était assortie d'aucune sanction. Cette injonction a entraîné la floraison de rapports de développement durable dans les très grandes entreprises. Beaux objets de communication, ils n'ont jamais été partie prenante de la communication financière des entreprises. L'idée était alors de mettre en valeur quelques opérations exemplaires plutôt que de valoriser une stratégie RSE globale.

Après le Grenelle de l'environnement, l'obligation de reporting a été étendue, via l'article 225 de la loi Grenelle 2 adoptée en 2010. Il fait obligation aux entreprises de plus de 500 salariés d'établir un reporting extra-financier et de faire certifier les données par un tiers externe. En tout cas théoriquement puisque, trois ans plus tard, grâce au lobbying intense des entreprises, aux errances sur les décrets d'application et à l'absence de texte sur la certification, le flou règne toujours sur les conditions d'entrée en vigueur d'un reporting fiable et pertinent, permettant de comparer les performances environnementales et sociales des entreprises, d'un exercice à l'autre et au sein d'un même secteur.

Pourtant, il s'agit d'un atout indispensable pour démontrer la pertinence d'une stratégie qui vise à diminuer des impacts environnementaux négatifs (consommation trop élevée d'énergie et/ou de matières premières...) et à améliorer des dimensions sociales-clés (parité hommes femmes, respect des droits des populations locales...).

21 2. Identifier le bon référentiel

Reporting intégré, agences de notation extra-financière, GRI (global reporting initiative)... Que cache ce vocabulaire de spécialistes ? L'évaluation des entreprises sur leur politique sociale, environnementale et de gouvernance s'est considérablement développée depuis une dizaine d'années en Europe, mais aussi dans d'autres parties du monde. Il existe des agences spécialisées dans la notation extra-financière comme la Française Vigeo, dirigée par Nicole Notat.

Elles peuvent faire des audits à la demande des entreprises, mais notent surtout les sociétés sur des critères environnementaux et sociaux. En principe, ces notes ne sont pas publiques et sont utilisées pour l'investissement socialement responsable (ISR), technique d'investissement qui sélectionne dans des portefeuilles les entreprises les mieux disantes en termes de RSE. En France, l'ISR pèse près de 150 milliards d'euros.

Ces entreprises sont repérées grâce à l'analyse de leur reporting, qui permet de constater la mesure ou non de leurs impacts environnementaux et sociaux ainsi que la manière dont elles gèrent leurs risques extra-financiers, et donc d'avoir une vision plus globale de leur stratégie RSE. Une démarche indispensable pour identifier les plus résistantes à long terme. C'est pourquoi le reporting extra-financier enveloppe, sous une même ombrelle, la mesure des émissions de gaz à effet de serre, celle des consommations d'eau et d'énergie, la politique de prévention des discriminations ou encore l'organisation de la gouvernance.

Choisir un cadre pour sa réflexion aide considérablement à structurer une démarche RSE, qui peut sembler partir dans tous les sens, et donc être plus difficilement partagée en interne comme à l'externe. On peut partir d'un premier élément que sont les sept questions centrales portées par l'ISO 26000, référentiel international de définition de la RSE : respect des intérêts des consommateurs et des clients, préservation de l'environnement, loyauté et responsabilité sur les marchés, valorisation du capital humain, respect des droits fondamentaux de la personne, équilibre entre intérêts de l'entreprise et intérêt général, et transparence du système de décision.

Il existe aussi des standards internationaux comme la GRI : elle propose des référentiels sectoriels, dont la qualité de la mise en oeuvre peut, ensuite, être évaluée par la GRI elle-même. Celle-ci est partie prenante d'une autre organisation, l'IIRC (International integrated reporting council), qui fait la promotion du reporting intégré. Il s'agit d'inciter les entreprises à synthétiser leurs données financières et extra-financières pour expliquer de façon concise et pertinente comment elles créent de la valeur. Les entreprises peuvent ensuite le compléter en mettant en ligne sur leur site internet des bases de données sur des indicateurs plus précis et nombreux.

22 3. Définir indicateurs et objectifs

Définir sa stratégie RSE passe par un premier travail d'identification des enjeux-clés pour l'entreprise. Par nature, ils varient selon les métiers mais, à titre d'exemple, on peut citer : forts besoins en eau pour la production de semi-conducteurs ou de verres de lunettes, pénurie de main-d'oeuvre qualifiée pour l'industrie pétrolière ou encore chaîne de sous-traitance pour le textile...

La seconde étape consiste à mesurer l'exposition de l'entreprise à ces enjeux-clés pour, enfin, fixer des objectifs de réduction ou d'amélioration des performances environnementales et sociales de l'entreprise. Or, chiffrer le coût de l'énergie consommée dans un contexte où il augmente inexorablement, identifier la dépendance à telle matière première en voie de raréfaction, mettre en place des politiques garantissant respect des droits humains et traçabilité des produits par ses fournisseurs pour éviter les scandales permet non seulement de gérer ses risques, mais aussi, à terme, de diminuer ses charges ou d'anticiper des changements de processus de fabrication. Cela semble donc logique d'intégrer, à la construction d'un plan stratégique, des objectifs d'amélioration assortis de l'évaluation des besoins en investissement pour les atteindre. Toutes celles qui l'ont fait ont, ensuite, chiffré et valorisé les gains que cela a représentés pour elles.

23 4. Valoriser son capital immatériel

Pour certains, la crise encourage les stratégies habituelles de "cost killing". Pour d'autres, elles ne sont que des palliatifs court-termistes, qui peuvent mettre en péril l'entreprise elle-même en la vidant de ses capacités d'innovation ou en fragilisant ses approvisionnements. Par exemple, la réduction de coûts qu'entraîne la sous-traitance en Chine ou au Bangladesh peut être réduite à néant si les clients désertent pour ne pas être soumis à des délais de livraison extensibles ou à une perte de qualité des produits. Valoriser différemment ses ressources humaines, mettre en avant ses investissements en formation, mettre en place des politiques d'achats qui évitent les fournisseurs les plus exposés aux risques environnementaux et sociaux ne relèvent pas d'une politique "bisounours", mais de l'idée qu'à long terme, les entreprises résistantes sont celles qui protègent les territoires et les emplois, qui sont la source de leur développement.

Cela permet aussi de gagner des parts de marché, mais à condition de fournir des éléments de preuve, de s'appuyer sur des labels, des indicateurs de suivi, et des chiffres démontrant que la RSE n'est pas un gadget, mais un processus stratégiquement intégré.


24

L'experte

Anne-Catherine Husson-Traoré, directrice générale de Novethic

Filiale de la Caisse des Dépôts, Novethic est un centre de recherche et d'expertise sur l'investissement socialement responsable (ISR) et un média expert sur le développement durable. Créé en 2001, Novethic est aujourd'hui l'unique source de statistiques sur le marché français de l'ISR. Le centre de recherche analyse d'un point de vue quantitatif et qualitatif la progression de la prise en compte de critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) dans la gestion d'actifs et y consacre des études thématiques.

www.novethic.fr

Traduire des indicateurs extra-financiers en langage financier semble un casse-tête. Mais, une fois franchis les premiers obstacles, valoriser sa stratégie environnementale ou sociale peut constituer un réel avantage concurrentiel. Mode d'emploi pour le Daf de PME.

25 [Cas pratiques] Des démarches RSE qui rapportent !

26 Un bilan carbone source d'économies pour Norsys

Denis Laplane (BNP Paribas) et Sarah Lefevre (Norsys).

Chez Norsys, petite SSII de 300 personnes qui a réalisé en 2012 un chiffre d'affaires de 27 millions d'euros, le développement durable est une seconde nature (lire la success story qui lui a été consacrée sur DAF magazine). Vue comme un avantage concurrentiel face aux prospects comme aux candidats, la démarche RSE de l'entreprise a été initiée il y a 12 ans. Afin de renforcer cet engagement, notamment au niveau environnemental, la société a décidé d'élaborer son bilan carbone en 2012.

La Daf, Sarah Lefèvre, a choisi de porter ce projet avec un double objectif : identifier les facteurs d'émission de gaz à effet de serre, les mesurer et bâtir un plan d'action ; mais aussi comprendre quels indicateurs environnementaux pertinents pourraient être mis en place et comment les faire interagir avec des indicateurs économiques et sociaux de l'entreprise. Après l'installation entre autres choses d'éclairages leds et d'une démarche d'achat responsable, la consommation de C02 par salarié est passée de 2,7 t en 2006 à 2,6 t en 2012. L'entreprise s'est donné l'objectif d'atteindre une consommation de 2,5 t de CO2 par salarié en 2015.

Repères

Activité : SSII

Forme juridique : SAS

P-dg : Sylvain Breuzard

Effectif 2013 : 300 salariés

CA 2013 (estimé) : 27 millions d'euros


27 Pocheco mise sur l'écolonomie

Denis Laplane (BNP Paribas) et Mehdi Dutheil, représentant Hayat Bensalem (Pocheco).

Entreprise de 114 salariés ayant réalisé en 2012 un chiffre d'affaires de 22 millions d'euros, Pocheco fabrique des enveloppes de gestion. En novembre 2011, la société fait face à un incendie réduisant en cendres son bâtiment de stockage de produits finis, contenant pas moins de 3200 palettes.

La décision a été prise, en accord avec la Daf, Hayat Bensalem, de reconstruire ce bâtiment de stockage en suivant un principe adopté par l'entreprise depuis plus de 15 ans : l'écolonomie. Cette démarche exige que chaque décision prise dans l'entreprise doit respecter les trois critères suivants : réduire la pénibilité et la dangerosité des postes, gagner en productivité et réduire l'impact sur l'environnement. Ainsi, le nouveau bâtiment de stockage bénéficie d'une sécurité incendie renforcée, de systèmes permettant de limiter la nuisance sonore pour le voisinage, d'un toit végétalisé, d'un système de récupération d'eau de pluie et est auto-suffisant en chauffage et en électricité.


Repères

Activité : fabrication d'enveloppes de gestion

Forme juridique : SAS

P-dg : Emmanuel Druon

En 2014, les Trophées DAF Magazine ont récompensé deux sociétés exemplaires en matières de RSE. Découvrez les stratégies de Norsys et Pocheco, respectivement trophées d'or et d'argent de cette édition.

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