Quand les RH passent de "centre de coût" à "centre de valeur"
Dans cette tribune exclusive, Florent Balayé, directeur LinkedIn Talent Solutions en France partage sa vision d'une fonction RH en pleine mutation, passant de « centre de coût », à créatrice et génératrice de valeur au sein des entreprises.

Dans un contexte de tension sur le marché de l'emploi, la fonction RH se trouve à la croisée des chemins : bras armé du développement des entreprises, elle doit également justifier ses choix, ses outils, et surtout ses résultats. Recruter vite, bien et de manière rentable est devenu impératif. Il n'est donc pas surprenant qu'une de nos études révèle que 70 % des professionnels RH se sentent débordés par leur charge de travail, confrontés à un défi majeur : la pénurie de candidats qualifiés, citée comme la principale difficulté par 47 % d'entre eux.
Une fonction désormais perçue comme stratégique car sur tous les fronts
Longtemps perçue comme un « centre de coût », la fonction RH est désormais reconnue comme créatrice et génératrice de valeur au sein des entreprises. En effet, aujourd'hui, 82 % des professionnels RH estiment que leur impact est bien compris - un chiffre qui grimpe à 88 % chez les DRH. Ce changement de regard s'explique notamment par le rôle accru joué par les RH pendant et après la pandémie, qui ont dû composer avec des impératifs opérationnels sans précédent. Cette reconnaissance révèle toutefois des attentes élevées. La pression exercée par la direction est particulièrement forte : 80 % des DRH et responsables du recrutement ressentent une pression accrue du comité de direction, et 67 % de la part du directeur administratif et financier (DAF). Au total, 85 % des répondants déclarent ressentir une pression en matière d'objectifs de recrutement. Et les indicateurs RH sont désormais suivis de près par les plus hauts niveaux de l'entreprise : le DG/PDG dans 36 % des cas, le DAF dans 31 %.
Cette pression s'accompagne d'exigences multiples : la qualité du matching entre profils et besoins métiers, l'obtention de résultats immédiats, ainsi que l'optimisation du retour sur investissement (ROI). Pour convaincre en interne, les fonctions RH doivent désormais allier rigueur analytique et capacité à raconter leur histoire à travers les données - ou le « data-storytelling ».
IA : un allié pour re-gagner du temps et de la valeur
Dans un contexte où la pression s'intensifie sur les fonctions RH, l'adoption d'outils technologiques - et en particulier l'Intelligence Artificielle (IA) - s'impose comme un levier de performance incontournable. Aujourd'hui, 70 % des professionnels RH déclarent utiliser l'IA dans leurs processus de recrutement. Son apport est pragmatique et immédiat : automatisation des tâches répétitives, rédaction d'offres d'emploi, tri des candidatures, ou encore pré-qualification de profils. Ces usages permettent de dégager du temps pour des missions à plus forte valeur ajoutée. En moyenne ? 1h21 par jour - soit près d'un jour par semaine. Cette efficacité opérationnelle renforce la légitimité des RH face aux directions générales et financières, en apportant des indicateurs tangibles sur leur performance. Loin d'être un gadget, l'IA devient un outil de pilotage stratégique.
Encouragées par les COMEX (81 % des DRH affirment bénéficier d'un soutien explicite dans l'adoption de solutions digitales), les fonctions RH s'approprient progressivement cette transformation. Pour les directions financières, cela représente aussi une opportunité de fiabiliser et d'objectiver davantage les investissements RH, dans une logique de retour sur valeur durable.
Un rôle RH à la fois clé mais très exposé
La fonction RH n'a jamais été aussi centrale dans la réussite des entreprises, mais elle est aussi plus exposée que jamais aux exigences de performance et à la pression des résultats. Entre la nécessité d'attirer des talents, de fidéliser des collaborateurs dans un contexte concurrentiel, et de former en continu des équipes, le DRH doit jongler avec de multiples priorités stratégiques. Cette complexité accrue fait de son rôle un véritable exercice d'équilibriste, où il doit simultanément piloter la transformation de l'entreprise, maîtriser les indicateurs financiers liés au recrutement et à la gestion des talents, et aligner ses actions sur les objectifs globaux de l'entreprise. Pour que cette fonction puisse pleinement jouer son rôle, il ne suffit plus de lui demander des résultats : les entreprises doivent également investir concrètement dans leurs équipes RH. Et cela passe par une montée en compétences via la formation continue et un soutien accru pour adopter des outils innovants qui permettent de gagner en efficacité et en qualité d'analyse.
La profession est largement reconnue comme stratégique. Néanmoins, il est essentiel que l'ensemble des directions considèrent le triptyque « recruter, fidéliser, former » non comme un simple enjeu opérationnel, mais comme un levier stratégique déterminant. Car, dans un contexte de marché de l'emploi tendu, la capacité à bâtir une organisation attractive conditionne directement la performance et la pérennité de l'entreprise. Le rôle de la fonction RH continuera d'être fondamental pour accompagner cette dynamique, en se positionnant comme un véritable business partner au sein du COMEX. Un véritable garant d'une vision globale des ressources humaines.
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