Parité dans la finance : « Il ne s'agit pas d'un problème de femmes à résoudre par les femmes »
Pia Kall est CEO de la société finlandaise de capital-investissement CapMan. L'une de ses ambitions est que d'autres femmes occupent à court terme des postes similaires dans le secteur financier. Elle revient sur son parcours professionnel et développe son point de vue sur la question de la parité dans la finance.
Quel est votre parcours professionnel ?
J'ai toujours travaillé dans des secteurs à prédominance masculine. Je suis titulaire d'un master en ingénierie physique et mathématique, avec une spécialisation en systèmes énergétiques et en physique nucléaire. Pendant les dix premières années de ma carrière, j'ai travaillé dans le domaine du conseil en gestion chez McKinsey & Company, principalement avec des clients dans les secteurs de l'énergie, de la construction, des pâtes et papiers et de l'exploitation minière, qui sont tous des domaines à prédominance masculine.
Pendant mon congé de maternité, j'ai été recrutée par un de mes clients et j'ai rejoint le conseil d'administration d'Outotec, une société spécialisée dans les technologies de traitement des mines et des métaux qui livre des sites miniers dans le monde entier. En 2016, j'ai eu l'opportunité de rejoindre l'équipe buyout de CapMan en tant qu'associée, et à partir de 2017, j'ai dirigé l'équipe d'investissement buyout. J'ai ensuite pris le rôle de CEO du groupe CapMan en mars 2023.
Avez-vous rencontré des difficultés en tant que femme dans ce monde encore majoritairement masculin de la finance ?
En tant que femme, dans tout secteur dominé par les hommes, nécessairement on vous remarque. Les gens ont tendance à se souvenir de moi, plus que de certains de mes collègues masculins, dans la mesure où j'étais la seule femme présente dans la pièce. J'ai donc adopté le comportement suivant. Si je dois, quoi qu'il en soit, me faire remarquer, autant remettre en question la pensée générale et le statu quo, pour apporter de nouvelles idées ou de nouvelles manières de voir les choses. Étonnamment, cela fonctionne souvent et je peux ainsi participer à la conduite du changement.
D'une manière générale, quel regard portez-vous sur la parité dans le secteur financier ?
Il y a encore un long chemin à parcourir pour atteindre la parité. On parle beaucoup du recrutement, de l'attraction des talents divers et de la réduction des préjugés inconscients dans les décisions d'embauche. C'est bien entendu essentiel, mais je pense que ce qui est encore plus important, et sur quoi il reste davantage de travail à accomplir, c'est le leadership inclusif.
Il s'agit de changer la manière dont tous les dirigeants financiers - les chefs d'équipe, les cadres moyens à supérieurs - permettent réellement aux collaborateurs issus de la diversité, de réussir, de s'épanouir et de se sentir bienvenus sur leur lieu de travail, afin qu'ils restent dans le secteur. Pour cela, chacun doit changer sa propre manière de travailler, ce qui est beaucoup plus difficile que de promouvoir une politique ou un processus de recrutement ajusté.
Pour finir, quelles sont selon vous les pistes à privilégier pour avancer sur ce sujet de la parité dans la finance ?
Avant tout, il faut réaliser qu'il ne s'agit pas d'un problème de femmes à résoudre par les femmes. Nous avons besoin de modèles et de réseaux féminins, mais cela ne suffira pas à changer le secteur.
Nous devons prendre conscience que la diversité est une décision purement business, que des équipes diversifiées prennent de meilleures décisions et obtiennent de meilleurs résultats financiers. Il est donc dans l'intérêt de tous, et en particulier des hommes en position de leadership, de parvenir à promouvoir la diversité. Avec cette prise de conscience, un véritable changement pourra commencer à se produire.
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