Hors licenciements économiques, quels dispositifs pour sécuriser l'emploi ?
La crise a fragilisé le marché du travail. Le nombre de chômeurs de catégorie A a augmenté de 7,5%, avec 265 400 inscrits de plus au 4e trimestre 2020 par rapport à 2019, selon la Dares. Dans ce contexte, les dispositifs d'aides apparaissent plus que jamais nécessaires pour préserver l'emploi.
Alors que les perspectives de relance sont aujourd'hui fortement incertaines, il devient primordial pour les entreprises de faire preuve de souplesse et d'agilité. Mais comment s'y retrouver face à la multitude de dispositifs existants et à la complexité d'une réglementation mouvante ? Quels sont les dispositifs de gestion RH à privilégier pour assurer la sauvegarde de l'emploi ?
Le chômage partiel pour surmonter les baisses d'activité exceptionnelles
Revu en profondeur par la loi du 14 juin 2013 relative à la sécurité de l'emploi, le dispositif de chômage partiel, conçu pour permettre aux entreprises de surmonter les baisses d'activité exceptionnelles sur une courte période, a connu de multiples assouplissements depuis le début de la crise sanitaire : délai d'instruction réduit à 48 heures, allocation employeur plus favorable, augmentation du nombre d'heures indemnisées...
Compte tenu des derniers décrets parus en janvier 2021 et du cadre arrêté à ce jour, les salariés des secteurs non protégés continuent de percevoir en mars des indemnités correspondant à 70% de leur rémunération horaire brute, dans la limite de 4,5 Smic. L'employeur bénéficie, lui, d'une allocation de 60% de la rémunération horaire brut du salarié, dans la limite de 4,5 Smic.
Le régime d'indemnisation de l'activité partielle reste également inchangé pour les salariés relevant des entreprises les plus touchées par la crise (tourisme, hôtellerie, sport...) et/ou les entreprises fermées administrativement jusqu'au 31 mars 2021 et 30 juin 2021, selon les cas.
Toutefois, en raison des incertitudes liées à la crise économique et sanitaire, la modification des taux relatifs à l'indemnisation de l'activité partielle pourrait être de nouveau décalée à une échéance ultérieure.
Lire aussi : Trésorerie dégradée, incertitudes politico-économiques: quels impacts sur les PME/TPE ?
Avantage du chômage partiel : l'indemnité versée aux salariés est exonérée de cotisations sociales dans une certaine limite, à l'exception de la CSG et de la CRDS. A noter que les associations peuvent également bénéficier du dispositif.
L'application pratique de certains sujets (prise en compte d'heures supplémentaires structurelles sous certaines conditions, rétroactivité de l'indemnisation) mériterait cependant d'être précisée.
L'activité partielle longue durée (APLD) pour soutenir les entreprises durablement touchées
Depuis le 17 juin 2020, le mécanisme d'activité partielle de " longue durée " a été instauré, avec pour ambition de prendre le pas sur l'activité partielle " classique " pour les entreprises présentant un risque de réduction d'activité durable. Ce dispositif, qui s'applique jusqu'au 30 juin 2022, est conditionné par la signature d'un accord collectif (accord de branche, d'entreprise...) ou d'un document unilatéral adossé sur un accord de branche. L'APLD présente la particularité de ne pas dépasser une réduction de 40% de l'horaire légal par salarié, avec une indemnisation constante. Elle peut être mise en oeuvre dans la limite de 24 mois (contre 12 mois actuellement pour le chômage partiel), qui se suivent ou non, sur une période de 36 mois consécutifs.
Lire aussi : L'état d'urgence lié à la pandémie de Covid-19 constitue-t-il un cas de force majeure ?
L'entreprise ayant recours à l'APLD s'engage à préserver l'intégralité des emplois de l'entreprise, sauf accord de branche en disposant autrement. L'indemnité horaire versée par l'employeur correspond à 70% de la rémunération brute du salarié, dans la limite de 4,5 Smic. L'allocation versée à l'employeur est, elle, équivalente à 60% de la rémunération horaire brute, limitée également à 4,5 Smic.
Selon la ministre du Travail, Elisabeth Borne, à date du 14 janvier 2021, seules 6000 entreprises ont eu recours à l'APLD. En cause : un intérêt limité du dispositif tant que perdura une activité partielle de droit commun au moins aussi avantageuse.
L'accord de performance collective (APC) : un outil de flexibilité et d'amélioration de la compétitivité
Issu de l'ordonnance Macron du 22 décembre 2017, l'accord de performance collective (APC) permet à l'employeur de modifier les contrats de travail sur la base de trois critères : la rémunération, la durée de travail et les conditions de mobilité professionnelle et géographique interne à l'entreprise. Comme défini par l'article L.2254-2 du Code du travail, ce dispositif permet " de répondre aux nécessités liées au fonctionnement de l'entreprise " mais surtout de " préserver ou de développer l'emploi ".
Si l'APC offre à la négociation collective une grande liberté pour redéfinir les contrats de travail, il doit toutefois être manié avec pédagogie et transparence par les entreprises. Cet accord, impliquant bien souvent une négociation à la baisse pour le salarié, doit amener les dirigeants et actionnaires à prévoir des efforts proportionnés (pas d'augmentation des dividendes, d'attribution de nouveaux bonus et autres revalorisations de rémunérations...).
RCC, PDV... des alternatives aux licenciements " secs " pour motif économique
Non règlementé par le Code du travail, le plan de départs volontaires (PDV), permet à une entreprise de réduire ses effectifs sans procéder à des licenciements pour motif économique. Il peut être autonome ou considéré comme une phase préalable à un plan de sauvegarde de l'emploi. Après consultation des représentants du personnel, l'employeur peut présenter aux salariés un plan, auquel ils seront libres d'adhérer ou non. Si le salarié accepte, la rupture de contrat prendra la forme d'une rupture amiable sans préavis, ni obligation de reclassement. Le coût demeure toutefois important pour l'employeur qui doit s'acquitter d'une indemnité incitative plus favorable que les indemnités légales ou conventionnelles de licenciement.
Ce dispositif se distingue de la rupture conventionnelle collective (RCC), qui permet de procéder à des suppressions d'emplois ciblées, après candidatures volontaires des salariés. Mais celle-ci ne peut en aucun cas être proposée dans un contexte de difficultés économiques.
Pour en savoir plus
Charles-Emeric Le Roy est associé, directeur du pôle RH du cabinet GMBA. Il accompagne quotidiennement les dirigeants et directions RH dans de nombreux secteurs d'activité (industrie, transport, immobilier...).
Sur le même thème
Voir tous les articles RH