Comment négocier en l'absence de délégué syndical ?
Des règles variant selon la taille de l'entreprise donnent aux élus et salariés un rôle dans la négociation collective. Objectif : adapter la négociation aux interlocuteurs et ajuster l'organisation et le statut social au plus près des besoins de l'entreprise, même en l'absence de délégué syndical.
Les ordonnances du 22 septembre 2017 ont libéralisé la négociation dans les entreprises en élargissant les domaines de la négociation dérogatoire, c'est-à-dire en l'absence de délégué syndical. Ainsi, en l'absence d'un tel partenaire de négociation, les salariés mandatés et les membres du CSE (Comité Social et Economique) peuvent, en fonction de l'effectif " habituel " de l'entreprise, être acteurs de la négociation, sur tous les thèmes ou sur des thèmes restreints.
Le point sur les différentes procédures applicables selon l'effectif de votre entreprise.
Lorsque l'effectif de la société est inférieur à 11 salariés ou de 11 à 20 salariés sans représentant élu
Les salariés consultés sur un projet d'accord d'entreprise sont, selon nous, l'ensemble des salariés de l'entreprise, y compris ceux des établissements non couverts par le projet d'accord et/ou ne remplissant pas les conditions pour être électeurs aux élections du CSE.
L'employeur présentera directement à l'ensemble des salariés de l'entreprise un projet d'accord et leur fera parvenir, dans le même temps, les modalités de leur consultation fixées unilatéralement ainsi que le texte de la question et la liste nominative des salariés devant être consultés.
A l'issue d'un délai de 15 jours à compter de la communication du projet aux salariés, l'employeur consulte l'ensemble du personnel.
L'employeur doit organiser la consultation : elle a lieu en dehors de sa présence et pendant le temps de travail, et doit être personnelle et secrète.
La validité de cet accord sera subordonnée à son approbation par la majorité des deux tiers des salariés, à défaut il est réputé non écrit.
Le résultat de la consultation devra être consigné dans un procès-verbal et, en cas d'approbation, annexé à l'accord. Il conviendra enfin de respecter la procédure de dépôt de l'accord.
Dans cette hypothèse, il est recommandé, pour les entreprises comprenant entre 11 et 20 salariés, de disposer d'un procès-verbal de carence aux élections aux fins de justifier de l'absence de CSE.
Lorsque l'effectif est compris entre 11 à 49 salariés avec des représentants élus
L'employeur a le choix : il peut décider de négocier avec les élus titulaires non mandatés, les élus titulaires mandatés ou les salariés expressément mandatés par une organisation syndicale représentative dans la branche ou, à défaut, au niveau national et interprofessionnel. Aucune priorité n'est donnée à l'un de ces acteurs et l'employeur n'est pas tenu d'informer les organisations syndicales représentatives de sa décision d'engager des négociations.
Précisons que dans les entreprises dont l'effectif est supérieur à 20 salariés et dépourvues de CSE, il n'est pas possible de négocier directement avec les salariés, la négociation doit être menée avec un ou plusieurs salariés mandatés par une organisation syndicale.
Les conditions de validité de l'accord collectif dépendent du mode de négociation retenu :
- Lorsque la négociation a lieu avec des élus du CSE, mandatés ou non, les accords doivent être signés par les membres représentant la majorité des suffrages exprimés en faveur des membres du CSE lors des dernières élections professionnelles(1).
- Lorsque la négociation a lieu avec des salariés mandatés qui ne sont pas membres de la délégation du personnel du CSE, l'employeur doit organiser dans les 2 mois suivant la conclusion de l'accord, un référendum et informer l'ensemble des salariés 15 jours avant sa tenue. La validité de l'accord est subordonnée à son approbation par les salariés à la majorité des suffrages exprimés.
Lorsque l'entreprise a un effectif d'au moins 50 salariés
L'employeur doit respecter l'ordre de priorité suivant : les élus titulaires du CSE mandatés par une ou plusieurs organisations syndicales représentative ; les élus titulaires du CSE non mandatés et, à défaut, avec des salariés mandatés non membre du CSE.
La première démarche consiste donc à informer le CSE et les organisations syndicales représentatives dans la branche ou, à défaut, au niveau national et interprofessionnel de son intention de négocier.
Les membres du CSE disposent d'un délai d'un mois, pour indiquer s'ils négocieront en qualité d'élu mandaté ou non. La négociation peut ensuite être engagée à l'expiration de ce délai d'un mois.
En l'absence de négociation avec les élus (mandatés ou non), celle-ci peut s'engager avec un salarié mandaté par une organisation représentative dans la branche ou, à défaut, par une organisation syndicale représentative au niveau national et interprofessionnel.
Lorsque l'entreprise dispose d'un procès-verbal de carence confirmant l'absence de CSE, elle pourra directement négocier avec un salarié mandaté.
Relevons que lorsque la négociation est engagée avec des élus non mandatés, les thématiques de la négociation sont encadrées : l'accord ne peut alors porter que sur les mesures dont la mise en oeuvre est subordonnée par la loi à un accord collectif, il en est ainsi notamment en matière de durée du travail.
La validité des accords est subordonnée aux mêmes règles que celles énoncées en cas de conclusion d'un accord dans un entreprise de 11 à 49 salariés à une exception près : la validité de l'accord conclu avec des élus mandatés est subordonnée à son approbation par les salariés à la majorité des suffrages exprimés.
En savoir plus:
Membre d'AvoSial, Maïté Ollivier est spécialiste en droit du travail. Elle est avocate au sein de CMS Francis Lefebvre avocats. Elle intervient auprès des entreprises sur leurs questions en droit social, notamment en matière de représentation du personnel.
(1)Des dispositions spécifiques s'appliquent en présence d'un CSE central
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