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De l'art de renoncer à une clause de non-concurrence dans les temps

Un employeur ne peut plus valablement renoncer à une clause de non-concurrence une fois que le salarié a effectivement quitté l'entreprise, y compris en cas de rupture conventionnelle.

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De l'art de renoncer à une clause de non-concurrence dans les temps

Revirement de jurisprudence en matière de levée de clause de non-concurrence lors de la rupture conventionnelle d'un salarié.

Pour être valide, une clause de non-concurrence doit impérativement être, tout à la fois, indispensable à la protection légitime des intérêts de l'entreprise, limitée dans le temps ainsi que l'espace et assortie d'une contrepartie financière.

Parfois, à l'occasion de la rupture du contrat de travail d'un salarié, considérant que le risque d'atteinte à ses intérêts est limité et ne souhaitant pas avoir à verser de contrepartie financière, l'employeur renonce à la clause de non-concurrence.

La possibilité de « lever » la clause de non-concurrence donne lieu à une jurisprudence abondante et sévère pour l'employeur. Si ce dernier ne respecte pas les conditions imposées par la Cour de cassation, il ne sera pas dégagé de l'obligation de verser la contrepartie financière.

Une question déterminante : le délai

A cet égard, la condition la plus délicate est celle du délai dont dispose l'employeur pour valablement lever la clause. En général, le contrat de travail stipule le délai laissé à l'entreprise pour y procéder. Cependant, le strict respect de ce délai peut se révéler insuffisant et la renonciation à la clause de non-concurrence être jugée inopposable au salarié. Tel est le cas lors d'un licenciement sans préavis (pour faute grave ou en cas de dispense d'exécution du délai congé). Dans ces situations, il est jugé que la levée de la clause de non-concurrence doit intervenir au plus tard lors du départ effectif du salarié « nonobstant stipulations ou dispositions contraires ».

Le cas particulier de la rupture conventionnelle

La position de la jurisprudence était toutefois différente s'agissant des ruptures conventionnelles. Jusqu'à présent, il était jugé que le délai de renonciation à la clause de non-concurrence stipulé au contrat de travail courait à compter de la date de rupture fixée par la convention de rupture (c'est-à-dire celle figurant sur le formulaire cerfa de rupture conventionnelle). Autrement dit, postérieurement au départ effectif du salarié, l'employeur conservait la possibilité de lever la clause durant le délai stipulé. Cette jurisprudence a volé en éclat le 26 janvier dernier.

Un revirement de jurisprudence bienvenu

Dans un arrêt particulièrement didactique (Cass. soc., 26 jan. 2022, n°20-15.755), la chambre sociale de la Cour de cassation procède à un rappel historique de ses précédentes décisions, notamment en cas de dispense de préavis et affirme – pour justifier son revirement – que « le salarié ne peut être laissé dans l'incertitude quant à l'étendue de sa liberté de travailler ». Elle en conclut ensuite « qu'en matière de rupture conventionnelle, l'employeur, s'il entend renoncer à l'exécution de la clause de non-concurrence, doit le faire au plus tard à la date de rupture fixée par la convention, nonobstant toutes stipulations ou dispositions contraires ».

Le principe est désormais harmonisé ; quelle que soit l'origine de la rupture du contrat de travail et quel que soit le contenu de la clause, l'employeur ne peut plus y renoncer après le départ effectif du salarié de l'entreprise. A défaut, la contrepartie financière reste due au salarié.

Pour aller plus loin

vincent hoel

vincent hoel

Romain Pietri – avocat spécialiste en droit du travail, associé du cabinet nomos – Co-responsable du département droit du travail. Membre d'AvoSial.

Fondée en 2004, AvoSial est une association composée d'avocats qui consacrent leur activité professionnelle à la représentation en justice et au conseil des employeurs dans le domaine du droit du travail et de la sécurité sociale.

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