Financements internationaux et intérêt social : enjeux clés et points de vigilance
La mise en place d'une politique d'endettement par un groupe répond à divers besoins, en fonction des objectifs poursuivis : consolidation et refinancement de l'endettement existant des membres du groupe, financement d'une opération de croissance externe, financement du besoin en fonds de roulement (affacturage), sécurisation d'une ligne de crédit non tirée, etc.
D'un point de vue financier, le niveau maximal d'endettement net acceptable pour un groupe peut être évalué en fonction de sa capacité à le rembourser. Un ratio de levier, rapportant l'endettement net à l'excédent brut d'exploitation du groupe, est presque systématiquement utilisé pour surveiller ce niveau maximal dans les documents de financement.
D'un point de vue juridique, la structuration de cet endettement et le schéma des garanties doivent également être analysés au regard des contraintes légales et réglementaires applicables aux membres du groupe.
En droit français, une société doit être gérée dans son intérêt social, en prenant en considération les enjeux sociaux et environnementaux de son activité (article 1833 du code civil). Les systèmes juridiques étrangers ne connaissent pas nécessairement cette notion, rendant nécessaire l'analyse de la structuration des financements internationaux arrangés par des banques étrangères sollicitées par des emprunteurs français.
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Conformité à l'objet et à l'intérêt social et responsabilité du dirigeant
Rappelons que l'acte conclu par un dirigeant doit d'abord être conforme à l'objet social de la société, faute de quoi il sera en principe inopposable à la société, voire, dans certains cas, sanctionné par la nullité (article 1849 du code civil pour la société civile ; article L. 221-5 du code de commerce pour la société en nom collectif et la société en commandite simple).
L'acte doit également être conforme à l'intérêt social de la société. La contrariété de celui-ci à l'intérêt social d'une société civile ou commerciale n'est pas, en principe, une cause de nullité de cet acte (article 1844-10, alinéa 1 du code civil pour la société civile ; article L. 235-1, alinéa 2 du code de commerce pour les sociétés commerciales). La jurisprudence a toutefois retenu, s'agissant d'une société civile, que la sûreté émise en garantie de la dette d'un associé qui compromet l'existence de la société est contraire à son intérêt social et donc nulle (Cass. com., 23 septembre 2014, n° 13-17.347).
Enfin, l'acte ne doit pas engager la responsabilité civile du dirigeant, déclenchée tant à l'initiative d'un tiers (lorsqu'est caractérisée une faute séparable des fonctions), qu'à celle des actionnaires ou de la société. Il ne doit pas non plus exposer le dirigeant à une responsabilité pénale, souvent encourue au titre de l'abus de biens sociaux (arrêt Rozenblum, Cass. crim., 4 février 1985).
Points d'attention pour les dirigeants
Au regard de ce qui précède, les dirigeants doivent porter une attention particulière aux points suivants.
Clauses de solidarité passive
Les clauses du contrat de crédit prévoyant une solidarité passive entre les différents emprunteurs.
Upstream guarantees
La constitution par une filiale d'une sûreté réelle ou personnelle garantissant les obligations de la holding emprunteuse, susceptible de constituer une infraction d'assistance financière (article L. 225-216 du code de commerce) ou d'abus de biens sociaux (article L. 242-6 du code de commerce).
Une vigilance doit également être portée sur les sûretés constituées en garantie du tirage par la holding d'un crédit de croissance externe destiné à l'acquisition d'une nouvelle filiale ; lorsqu'elles sont constituées sur des actifs de la filiale concernée, elles ne pourront garantir que la partie du tirage destinée à refinancer son endettement existant, et dans la limite de ce montant.
Cross-stream guarantees
La constitution par une filiale d'une sûreté réelle ou personnelle garantissant les obligations d'un autre membre du groupe, également susceptible de constituer une infraction d'abus de biens sociaux.
Accords intercréanciers
Les accords intercréanciers incluent quasi systématiquement une « waterfall » prévoyant l'ordre d'affectation des sommes reçues par l'agent des créanciers (par exemple, en cas de réalisation des sûretés constituées en garantie du financement) au paiement des montants dus au titre des documents de financement ; ces stipulations ne doivent pas entraîner ou avoir pour effet un paiement contraire à l'intérêt social des sociétés concernées ni constituer une assistance financière (par exemple, lorsque les obligations garanties remboursées ne sont pas celles du constituant dont la sûreté est réalisée).
Le cas échéant, ces stipulations devront être revues et modifiées par les conseils juridiques du groupe afin de les rendre compatibles avec les exigences de notre droit positif.
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