CFO, DAF... Comment gagner la confiance de la direction générale ?
Dans un contexte économique tendu, les directeurs administratifs et financiers se retrouvent au coeur des décisions stratégiques. Au-delà de leur rôle traditionnel de garants des coûts, ils doivent aujourd'hui convaincre les autres membres du comité de direction de leur légitimité à co-piloter la croissance. Une mission d'autant plus complexe que chaque membre du Comex - RH, IT, direction générale - poursuit ses propres priorités et dispose d'une vision différente du rôle de la finance. C'est la vision que partage Kahina Belmiloud dans cette tribune exclusive.

Pendant longtemps, la croissance a été pilotée comme un indicateur purement financier. Mais cette logique cloisonnée montre aujourd'hui ses limites. Trop de DAF se considèrent encore comme les seuls moteurs de la croissance, quand d'autres membres de la direction perçoivent leur rôle davantage comme un appui qu'un leadership.
Pour éviter les crispations et gagner en efficacité, il est temps d'opérer un glissement de posture : il ne s'agit plus d'imposer des arbitrages, mais de co-construire des dynamiques de performance avec les autres départements. Cela passe par exemple par l'intégration d'indicateurs de croissance dans les tableaux de bord RH, commerciaux ou IT. Ou encore par une meilleure synchronisation des investissements technologiques avec les prévisions financières. Cette logique de coresponsabilité facilite l'adhésion aux plans d'action et renforce la légitimité du DAF comme partenaire stratégique.
Alignement RH/Finance : au-delà des budgets
Alors que la pression sur les coûts est forte, les directions RH doivent continuer à faire de l'expérience collaborateur une priorité. Or, trop souvent, les directions financières interprètent ce besoin comme une demande de budget, là où il s'agit avant tout d'un besoin de soutien stratégique.
Là encore, une meilleure collaboration est nécessaire. L'apport de la finance ne doit pas se limiter à un rôle de financeur, mais s'étendre à une aide à la décision : analyses de rentabilité des programmes RH, appui à la gestion prévisionnelle des effectifs, construction de KPI communs sur la performance humaine. A` travers des groupes de travail mixtes ou des points réguliers, la DAF peut se repositionner comme un allié des RH dans la transformation managériale de l'entreprise.
Cybersécurité : sortir de la logique de silos
Sujet devenu central dans la stratégie d'entreprise, la cybersécurité est encore trop souvent considérée comme l'affaire exclusive des DSI. Pourtant, les risques cyber ont un impact direct sur la continuité d'activité, la réputation, voire la rentabilité. En ce sens, leur gestion ne peut rester isolée du pilotage financier.
Les DAF ont tout intérêt à intégrer cette dimension dans leurs modèles de prévision et dans leurs allocations budgétaires. En instaurant des marges d'investissement flexibles sur les projets IT critiques ou en participant aux arbitrages sur les outils de détection, ils peuvent contribuer à une approche proactive et transversale des enjeux de sécurité. Ce changement d'approche est d'autant plus nécessaire que la plupart des DSI souhaitent aujourd'hui une coopération renforcée avec la finance.
Pour une culture de la performance partagée
Ce que révèlent ces trois exemples - croissance, talents, cybersécurité - c'est la nécessité pour les DAF de dépasser leur posture d'experts des chiffres pour devenir des architectes de dialogue. Le pilotage de la performance ne peut plus être un exercice solitaire. Il implique une vision élargie, un langage partagé et des indicateurs co-construits.
C'est en décloisonnant les fonctions que l'on peut réellement faire converger les priorités et répondre aux défis complexes des organisations : attractivité, rentabilité, sécurité, innovation. Le DAF de demain ne sera pas seulement celui qui tient les comptes, mais celui qui relie les mondes.
L'auteur : Kahina Belmiloud est Director, Product Marketing EMEA North chez SAP Concur.
Sur le même thème
Voir tous les articles Gouvernance & Stratégie