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Investissements et attractivité : une première place pour la France en trompe-l'oeil

En 2024, dans un contexte national ralenti par l'incertitude politique et budgétaire, la France se positionne comme le pays le plus attractif en Europe pour la sixième année consécutive, dévoile le baromètre du cabinet EY publié ce jeudi 15 mai. Dans le détail, ce résultat est à relativiser. Explications.

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Investissements et attractivité : une première place pour la France en trompe-l'oeil
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Le Baromètre EY « Nouveaux chocs, nouveaux défis pour la France et l'Europe en 2025 »*, publié ce jeudi 15 mai, offre une lecture contrastée de la position de l'Hexagone sur l'échiquier européen des investissements directs étrangers (IDE). Avec le plus grand nombre de projets annoncés par des investisseurs étrangers en 2024, la France conserve pour la sixième année consécutive la première place européenne en termes de nombre de projets. Mais sous cette performance quantitative se cachent plusieurs signaux faibles : troisième rang sur la création d'emplois, taille moyenne des projets limitée et progression modérée des investissements « greenfield » (créations de sites). Face à la concurrence renforcée des États-Unis et de la Chine, l'heure est à l'action, tant en France qu'en Europe, pour préserver et stimuler notre attractivité.

Une première place à relativiser

En 2024, la France a attiré 1 025 projets d'investissement international, devançant le Royaume-Uni (853) et l'Allemagne (608). Cependant, cette performance s'inscrit dans un contexte de repli généralisé. Premièrement les projets ont diminué de 14 % par rapport à 2023, et les créations d'emplois associées ont chuté de 27 %, plaçant la France au troisième rang européen derrière le Royaume-Uni et l'Espagne.

Autre indicateur, le ratio d'emplois créés par projet reste faible, avec une moyenne de 30 emplois par projet en France, contre 125 en Espagne. Cette situation reflète une prédominance des extensions de sites existants (63 % des projets) au détriment des nouvelles implantations ("greenfield"), qui ne représentent que 37 % des projets en France, contre 76 % en Espagne.

Des signaux d'alerte sur la compétitivité

Le baromètre souligne des préoccupations croissantes des investisseurs concernant la compétitivité de la France. Les coûts salariaux élevés, l'instabilité politique et la complexité réglementaire sont régulièrement cités comme des freins majeurs. L'industrie automobile, en particulier, subit une érosion, avec plus d'emplois supprimés (2 029) que créés (1 133) en 2024, en raison de la concurrence asiatique et des écarts de coûts énergétiques avec les États-Unis.

En revanche, certains secteurs affichent une résilience notable. La France se distingue dans les domaines de l'énergie (74 investissements), de l'intelligence artificielle (41) et de l'agroalimentaire (68), où elle occupe la première place européenne. Ces secteurs bénéficient d'une dynamique positive, malgré le contexte économique incertain.

Une Europe en perte de vitesse face aux États-Unis

Le recul des investissements étrangers ne concerne pas uniquement la France. En 2024, l'Europe a enregistré une baisse de 5 % du nombre de projets d'IDE, atteignant son niveau le plus bas depuis neuf ans. Parallèlement, les investissements étrangers aux États-Unis ont progressé d'environ 20 %, attirés par des politiques incitatives telles que l'Inflation Reduction Act et un environnement pro-business.

Les investisseurs expriment des inquiétudes quant à la compétitivité de l'Europe, pointant les tensions géopolitiques (35 %), le contexte macroéconomique (34 %) et les barrières commerciales (30 %) comme principaux risques. Ils appellent à des réformes structurelles pour renforcer l'innovation, adapter les compétences aux enjeux futurs et améliorer la compétitivité énergétique.

Quelles perspectives pour 2025 ?

Les prévisions d'investissement pour 2025 en France sont en baisse, avec seulement 62 % des dirigeants interrogés envisageant d'investir, contre 73 % en 2024. Pour inverser cette tendance, les investisseurs recommandent des mesures telles que la protection de la compétitivité à court terme sans alourdir la fiscalité, le soutien aux PME et ETI, la réduction de la dette publique, le développement des secteurs stratégiques (cleantech, IA, défense), l'innovation numérique et l'investissement dans les infrastructures.

À l'échelle européenne, les attentes portent sur une amélioration de la compétitivité énergétique (32 %) et une réponse coordonnée aux tensions commerciales (26 %). Ces actions sont jugées essentielles pour maintenir l'attractivité de la France et de l'Europe dans un environnement mondial de plus en plus concurrentiel.

Méthodologie

*Le baromètre de l'Attractivité de la France repose d'une part sur l'enquête auprès de 200 décideurs internationaux, interrogés du 20 février au 26 mars 2025 (enquête en ligne sur les perceptions et les attentes en matière d'attractivité pour la France) et d'autre part sur le recensement des projets d'investissement étrangers annoncés en 2024 dans 45 pays européens

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