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DossierScale-up : passer de PME à ETI sans accroc... Y a-t-il un pilote dans l'avion ?

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4 - Se transformer en Daf d'ETI

Passer de PME à ETI exige également que le Daf évolue. Il doit, lui aussi, passer du statut de Daf de PME à celui de Daf d'ETI. Ce qui veut dire accueillir de nouvelles missions, développer de nouvelles compétences, mais aussi adopter une nouvelle posture. Une transformation pas si évidente ...

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Quand une PME se transforme en ETI, les problématiques ne sont plus les mêmes. On voit plus grand, plus loin, plus fort. Les ambitions sont l'international, la croissance externe, les levées de fonds ... Et le Daf doit être en mesure de suivre ces évolutions. Au risque, sinon, de se voir supplanter par un Daf plus expérimenté. "Lorsqu'une PME évolue en ETI, la structuration de la direction financière et le rôle du Daf font partie des enjeux clés. Afin de sécuriser la transformation, il peut arriver que le Daf soit remplacé par les actionnaires. Cette situation est encore plus fréquente quand un fonds d'investissement entre au capital d'une PME", remarque Pascal Corcos, associé PwC. Un scénario malheureusement courant, mais non enviable : Daf de PME, mettez tout en oeuvre pour vous transformer en Daf d'ETI !

Un rôle de manager

Nous l'avons dit, un Daf d'ETI se voit confier de nouvelles missions et, en premier lieu, celle de trouver de nouveaux investisseurs pour financer la croissance. "Une entreprise à forte croissance doit pouvoir diversifier ses sources de financement. Un Daf d'ETI doit gérer la relation et la communication avec les marchés, les investisseurs ou les financeurs", indique Pascal Corcos (PwC). Il doit également savoir mener des "due diligences" dans le cadre d'acquisitions, prendre en main des projets de digitalisation d'envergure ... En outre, comme le souligne Jean-François Lécole, p-dg de Katalyse, "le passage d'une PME à une ETI est souvent marqué par le passage d'une activité nationale à une activité internationale. Le Daf doit donc, au minimum, savoir parler anglais".

Parallèlement à son changement de taille, l'entreprise se complexifie, au niveau juridique, fiscal, des ressources humaines ... Pour s'adapter à cette complexité grandissante, il faut choisir les bons outils. "Le Daf doit accompagner son entreprise dans sa croissance en mettant en place plus de pilotage et de contrôle. Il va devoir installer les outils et processus adéquats, mais aussi construire une équipe de confiance. Il va lui falloir apprendre à délégue?", prévient François Fretin, partner chez Julhiet Sterwen.

Avec une équipe plus importante sous ses ordres, le Daf va se muer en manager. Ce qui signifie notamment pour lui de faire confiance afin de se décharger des tâches plus opérationnelles. "Le Daf va devoir apprendre à faire faire et non plus seulement à faire, explique Jean-François Lécole. Même si, contrairement à un Daf de grand groupe, il va devoir continuer à faire lorsque cela sera nécessaire" Ce rôle de manager va lui permettre d'endosser un costume de Daf avec une vision transverse et analytique de l'entreprise, et de changer de posture. "En PME, le Daf est dans un rôle opérationnel et ne participe pas à la réflexion stratégique. Ce n'est plus le cas dans une ETI. Il doit alors s'intéresser aux questions de stratégie, devenir force de proposition et ne plus seulement être dans l'exécution", précise Jean-François Lécole. En résumé, devenir ce "business partner" dont on parle tant.

Changer le regard de la direction générale

Existe-t-il des solutions pour évoluer, pour acquérir les compétences manquantes, pour changer le regard de son directeur général ? "Tout dépend de la vitesse à laquelle croît l'entreprise : si elle évolue très vite, le Daf va avoir du mal à suivre. Si la croissance est plus lente, le Daf pourra évoluer au même rythme, en se faisant aider par un manager de transition, par exemple", observe Julien Poncet, manager au sein du cabinet Wavestone. Jean-François Lécole recommande, quant à lui, de suivre un cycle de formation continue si l'on sent que ses compétences ne suffisent plus.

Pascal Corcos (PwC) nuance ce conseil : "Les formations sont utiles, mais pas toujours suffisantes. Il faut avant tout avoir une bonne gestion des talents et bien s'entourer pour gagner la confiance des actionnaires". En effet, embaucher les compétences que l'on n'a pas semble une bonne option. À condition de savoir manager ! Certains s'entourent d'experts externes, mais on doit savoir les gérer. "Il ne faut pas penser que l'extérieur va nous sauver. On peut s'appuyer sur des ressources externes, mais le plus important est la conviction", assure David Brault, directeur associé d'Objectif Cash. Croire en soi, en ses compétences, et prouver sa valeur en devenant force de proposition et en mettant en place des solutions malines pour l'entreprise : voici la marche à suivre pour passer de Daf de PME à Daf d'ETI.

"Quand le Daf aide l'entreprise à devenir une ETI" - Philippe Brun, directeur général délégué finance de Serge Ferrari

Lorsque Philippe Brun arrive chez Serge Ferrari en 2011, l'entreprise compte 620 personnes, 13 sociétés et réalise un chiffre d'affaires de 140 millions d'euros. Elle n'a alors pas de Daf et Philippe Brun endosse ce rôle. Depuis, la société a évolué : elle totalise aujourd'hui 830 salariés, possède 27 sociétés et affiche un chiffre d'affaire de 185 millions d'euros. Et en 2014, de société familiale elle est devenue une entreprise cotée sur Euronext.

Des changements majeurs auxquels Philippe Brun a dû s'adapter. Préalablement à la cotation, il lui a fallu transformer l'entreprise, mettre en place des indicateurs mensuels, retrouver de la marge et du cash. Il s'est appuyé pour cela sur ses compétences passées - Philippe Brun a une expérience dans des sociétés cotées -, mais aussi sur des compétences externes. "Pour l'IPO, j'ai tenu à me faire accompagner par un listing sponsor pour nous aider à constituer les documents de base, mais également expliquer aux différentes directions les nouveaux comportements à adopter en devenant une société cotée" raconte-t-il.

En effet, le Daf n'est pas le seul à devoir évoluer : c'est toute l'entreprise qui est amenée à se transformer en grandissant. Philippe Brun les entoure dans cette transformation en leur faisant rencontrer des dirigeants qui ont connu la même évolution, d'une entreprise familiale à une société cotée. "Des échanges ont pu avoir lieu autour de leur expérience, cela a beaucoup aidé", estime Philippe Brun. Le Daf s'est fait facilitateur afin d'accueillir des managers de haut niveau pour occuper des postes de direction.

Le choc des cultures n'est pas toujours évident : d'une part pour les collaborateurs de l'entreprise, qui doivent faire confiance à ces éléments extérieurs, d'autre part pour les nouveaux membres du Comex, qui doivent comprendre que la petite structure qu'ils ont intégrée n'a pas les moyens de leurs anciens groupes.

Eve Mennesson

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