Entreprises innovantes : CII, CIR, quel crédit d'impôt choisir ?
2013 est-elle l'année de l'innovation pour les entreprises ? Au crédit d'impôt recherche (CIR), plébiscité par les dirigeants, s'ajoute désormais le crédit d'impôt innovation (CII). Des avancées qui sont cependant sources de questions et de confusions. Le point sur les contours de ces dispositifs.
L'administration fiscale a publié début octobre une instruction sur le crédit d'impôt innovation explicitant les notions d'innovation et de produits nouveaux pour le marché. Cependant, elle ne résout pas tous les problèmes susceptibles d'être rencontrés par les chefs d'entreprises désireux de bénéficier d'avantages fiscaux auxquels ils peuvent légitimement prétendre, sans s'exposer pour autant à des risques de redressement en cas de contrôle de l'administration !
CIR et CII : deux dispositifs complémentaires à bien distinguer
Les entreprises peuvent utiliser conjointement le CIR et le CII si elles respectent les conditions spécifiques de chaque dispositif. Elles n'auront d'ailleurs qu'un seul formulaire à remplir puisque le CII fait partie du CIR. Bien évidemment, les mêmes dépenses ne peuvent pas ouvrir droit à la fois au CIR et au CII.
Contrairement au CIR qui s'adresse aux entreprises de toutes tailles, le CII n'est accordé qu'aux entreprises répondant à la définition européenne de la PME. Pour cela, il faut remplir deux critères : d'une part, l'effectif salarié doit être inférieur à 250 personnes et, d'autre part, le chiffre d'affaires ne doit pas excéder 50 millions d'euros, ou le total du bilan ne doit pas excéder 43 millions d'euros. Ces critères s'apprécient différemment selon que l'entreprise est autonome, partenaire1 ou liée2 . Dans ces deux derniers cas, les entreprises doivent tenir compte de tout ou partie des données des entreprises liées ou partenaires pour déterminer leur éligibilité au dispositif. Une entité de faible dimension faisant partie d'un groupe important n'est pas une PME !
Le CII, un avantage fiscal moins favorable que le CIR
Le CIR correspond à 30 % du montant de la totalité des dépenses de R&D réalisées sur une année civile (le taux est ramené à 5 % pour la fraction des dépenses au-delà de 100 millions d'euros).
Le taux du CII est, quant à lui, de 20 % et s'applique aux dépenses d'innovation de produit qui sont plafonnées à 400 000 euros. En outre, le CII est soumis à l'encadrement communautaire des aides d'État - encadrement qui ne concerne pas le CIR - qui pourrait être un facteur supplémentaire de réduction de l'avantage obtenu.
CIR et CII : des natures d'activité identiques mais des nouveaux produits bien différents
Les deux dispositifs financent le même type d'activité c'est-à-dire des activités de conception et de réalisation de prototypes. La différence provient des caractéristiques des nouveaux produits.
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Le CII subventionne les opérations de conception de prototypes ou d'installations pilotes de produits nouveaux. Cela concerne donc des produits non encore mis sur le marché, qui se distinguent des produits existants ou précédents par des performances supérieures sur le plan technique, de l'éco-conception, de l'ergonomie ou des fonctionnalités.
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Le CIR finance également la réalisation de prototypes, mais de produits faisant appel à des nouveautés techniques dépassant les connaissances et savoir-faire du métier considéré. En effet, un prototype de R&D vise à lever des incertitudes techniques (ou verrous technologiques) permettant de fixer les caractéristiques du produit. Au contraire, l'innovation de produit, qui donne droit au CII, n'implique pas la levée d'incertitudes techniques. Les performances supérieures peuvent être atteintes en mobilisant des solutions techniques existantes. Par exemple : le lancement d'un nouveau détergent utilisant une formule chimique existante qui n'était utilisée auparavant que comme intermédiaire pour la production de revêtements. La distinction CIR et CII est là !
Du fait de cette nature d'activité identique, la distinction entre les dépenses relevant de la R&D et celles appartenant à l'innovation de produit reste cependant ardue dans la pratique. Les entreprises éprouveront d'autant plus de difficultés à les délimiter que, selon la récente instruction, des phases de R&D peuvent s'intercaler au sein d'un projet d'innovation.
1Lien avec une autre entreprise portant sur 25 à 50 % du capital
2L'entreprise détient ou est détenue par une autre entreprise pour plus de 50 % du capital
Par Franck Debauge
Franck Debauge est animateur de l'Observatoire du CIR et Directeur associé d'ACIES Consulting Group. Il a participé depuis 1994 aux réformes successives du CIR, en contribuant à la montée en puissance du dispositif. Il a milité sur la durée pour l'instauration d'un dispositif utile, efficace, et contribuant directement à l'augmentation des investissements R&D en France. Il est également l'auteur du Guide pratique du financement de l'innovation, publié avec la participation d'Oséo en juin 2012 et du Guide pratique du Crédit Impôt Recherche.
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