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Rétention des talents : avez-vous pensé à l'actionnariat salarié ?

En favorisant un meilleur partage de la valeur, l'actionnariat salarié permet de retenir les talents. Il offre aussi d'autres avantages comme un plus grand attachement à la société et une pérennisation de l'entreprise. Attention cependant à ne pas oublier d'avant tout rémunérer les salariés à un bon niveau.

Publié par Eve Mennesson le - mis à jour à
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Business teamwork join hands together. Business teamwork concept
© RANA - stock.adobe.com
Business teamwork join hands together. Business teamwork concept

En cette période de guerre des talents, les entreprises cherchent toutes les façons d'attirer les candidats et de retenir les salariés. L'actionnariat salarié peut être en ce sens intéressant. Il est cependant encore peu pratiqué. « Il y 3 millions d'actionnaires salariés en France qui se situent essentiellement dans les grandes entreprises », a rapporté Nicolas Aubert, économiste, à l'occasion d'une table-ronde sur le sujet organisée par Equalis Capital.

En effet, d'après Jean-Philippe Debas, président d'Equalis Capital, seules 150 ETI sur 4000 ont mis en place de l'actionnariat salarié. La question est donc de savoir quels sont les freins pour les PME et ETI et comment développer l'actionnariat salarié dans les plus petites structures.

Les avantages méconnus de l'actionnariat salariés

Mais tout d'abord, pourquoi inciter les entreprises à pratiquer l'actionnariat salarié ? Nous avons parlé de l'attractivité de l'entreprise auprès des candidats. Et cela n'est pas dû qu'à la rémunération : les salariés se sentent en quelques sortes « propriétaires » de leur entreprise et s'investissent davantage pour elle. Olivier Babeau, économiste et président de l'institut Sapiens, a parlé d'un « affectio societatis plus développé ».

Christophe Deldycke, président du directoire de Turenne Groupe, a également évoqué la pérennisation de la société. « L'actionnariat salarié permet de transmettre sa société à ses salariés et d'éviter ainsi de la céder. A condition d'avoir un actionnaire professionnel en soutien », a-t-il décrit.

Enfin, l'actionnariat salarié permet aux dirigeants de s'ouvrir en accueillant au conseil d'administration un représentant des actionnaires salariés. « Il faut à tout prix donner accès aux salariés à la gouvernance. Les salariés sont en effet demandeurs car ils donnent ainsi du sens à leur travail au sein de la structure », a noté Christophe Deldycke. Cela permet aussi au conseil d'administration d'accéder à une autre vision, qui peut s'avérer pleinement pertinente.

Changement de culture

Pour accéder à ces avantages, ils reste des freins à lever. Premier frein identifié : les petites entreprises sont souvent non cotées. « Acheter des actions de sociétés cotées est très facile. Pour les sociétés non cotées se pose tout d'abord la question de l'ouverture du capital et ensuite celle de la valorisation », a souligné Jean-Philippe Debas. Il y a donc une nouvelle culture à adopter pour l'entreprise qui s'ouvre à l'actionnariat salarié : elle doit être en mesure d'ouvrir son capital.

Une nouvelle culture qui doit s'étendre aux salariés afin qu'ils comprennent ce qu'est l'actionnariat salarié. François Guérin, pdg de Cetih, a notamment relevé que le grand public associe l'actionnariat aux dividendes. « Or nous ne versons pas de dividendes à nos actionnaires. L'actionnariat salarié doit s'entendre comme un gain à long terme et non à court terme », a-t-il rappelé.

Mobiliser l'épargne d'entreprise

Ces freins peuvent être levés par de la communication mais aussi par des mesures qui incitent à l'actionnariat salarié. Par exemple, Christophe Deldycke a raconté avoir mobilisé le plan d'épargne de l'intéressement de ses salariés. « Ce fut un grand succès ; 100% de nos collaborateurs sont actionnaires », a-t-il annoncé.

Autre bonne pratique, soulignée par Nicolas Aubert : le don d'actions gratuites, ce qui permet véritablement de retenir et fidéliser les salariés. Sans aller jusqu'au don, l'entreprise peut abonder. « L'objectif est d'accompagner les salariés à ce qu'ils puissent être actionnaires sans avoir de l'épargne conséquente », a indiqué Christophe Deldycke qui a déconseillé, quoi qu'il en soit, de mobiliser l'épargne personnelle des salariés mais uniquement l'épargne d'entreprise.

Seulement une composante du partage de la valeur

Face aux chefs d'entreprise dithyrambiques quant à l'actionnariat salarié, Marie-Christine Lebert, secrétaire nationale CFDT Cadres et administratrice salariée de Worldline, a rappelé, toujours lors de la table-ronde organsiée par Equalis Capital, que l'actionnariat salarié ne devait être qu'une composante du partage de la valeur. « Nous préférons du côté des syndicats les dispositifs à plus court terme comme la participation et l'intéressement que le salarié peut placer où bon lui semble », a-t-elle déclaré.

Pour elle, au-delà du risque de voir ses stocks-options varier à la baisse, l'actionnariat salarié présente l'inconvénient de mettre tous ses oeufs dans le même panier. « On n'est pas à l'abri d'événements comme Dexia », a-t-elle mis en garde. La groupe bancaire avait en effet subi la crise des subprimes de plein fouet, ce qui avait conduit à la fois à des licenciements massifs mais aussi à un effondrement de son titre en bourse. Les salariés actionnaires avaient perdu à la fois leur emploi et leurs économies.

Ainsi, il ne faut pas se limiter à l'actionnariat salarié si on souhaite attirer des candidats et retenir des salariés ; ils attendent en effet avant tout une rémunération à un bon niveau. « La rémunération est un élément nécessaire et l'actionnariat salarié un plus », a résumé Marie-Christine Lebert. « Les salariés ne sont pas dupes : s'ils ont l'impression de recevoir moins, les comportements au travail vont évoluer défavorablement », a ajouté Nicolas Aubert. Bien payer ses salariés est donc la priorité numéro un mais l'actionnariat salarié peut être un plus qui fait la différence.

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