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DossierLa direction administrative et financière et l'organisation interne de l'entreprise

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7 - Daf, n'oubliez pas votre propre responsabilité

Philippe Bouchez El Ghozi répond aux questions de Daf magazine sur la responsabilité civile et pénale de la profession. Périmètre d'actions, délégation de pouvoirs, risque d'investigation, peines encourues, l'avocat associé du cabinet Paul Hastings fait le point.

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Sur quelles actions du Daf sa responsabilité peut-elle être engagée ?

Sa responsabilité peut être engagée, en tant que Daf, comme responsable des fonctions supports rentrant dans son périmètre, voire comme dirigeant de fait. Et si le lien de subordination, avéré, inhérent au statut de salarié, peut exclure la qualification de dirigeant de fait, la responsabilité du Daf peut être recherchée comme complice de l'infraction principale. Pour être complice, pas besoin d'un acte positif : la seule abstention ou omission suffit. De plus, la posture de dirigeant de fait est appréciée très largement pour un Daf d'entreprise en difficulté car il agit en gestionnaire vis-à-vis de l'extérieur et sort de son périmètre. Et ce que les juges reprochent au Daf, c'est de ne pas avoir su dire non : non à une mesure de gestion, non à la communication d'une information trop optimiste, non à tel encours financier... ; en conséquence, les Daf doivent veiller à bien faire définir leur poste (fiche de mission et périmètre), à se faire préciser à qui ils reportent et à reporter. Car le reporting, s'il est traçable, témoigne de ce que la décision est du ressort des dirigeants. Reste l'épineuse question de la délégation de pouvoirs.

Face à une délégation de pouvoirs, quels sont les points de vigilance ?

Une délégation de pouvoirs constitue une exonération de responsabilité civile et pénale du déléguant. Les tribunaux sont donc très vigilants, voire pointilleux, et apprécient la réalité de la délégation au regard de l'organisation de l'entreprise ainsi que son effectivité. Surtout, la chambre criminelle de la Cour de cassation rappelle régulièrement que " la délégation de pouvoirs est une obligation, non une faculté " pour une entreprise ayant atteint un certain nombre de salariés, de sites, d'établissements... Ces critères ne sont pas exhaustifs ni même précis. En fait, le risque pour le dirigeant est de se voir reprocher de ne pas avoir su apprécier sa propre capacité de gestion directe. Le Daf qui se retrouve délégataire ou délégant doit veiller à ce que cette délégation soit cohérente avec les contrats de travail des intéressés, l'organigramme et l'organisation réelle de l'entreprise.

Hors redressement ou liquidation judiciaire, comment la responsabilité pénale du Daf peut-elle être mise en cause ?

À titre d'exemples, par le biais d'une dénonciation au parquet par un salarié mécontent ou des actionnaires minoritaires ou bien encore par un tiers intéressé de l'entreprise (banques, fournisseurs, clients). Ce mode d'interpellation de la Justice est lié aux hypothèses de sociétés en cessation de paiements ou juste avant. Et le parquet ouvre quasi systématiquement une enquête en ce cas. Si le risque de poursuite ou de condamnation de l'entreprise et du Daf existent, le risque le plus prégnant pour le Daf est sans nul doute le risque d'investigation par la police financière, qui bouscule l'entreprise dans son quotidien, sollicite énormément la direction administrative et financière et peut s'étaler sur plusieurs mois. L'autre cas vise les sociétés qui ne publient pas leurs comptes : une injonction en référé de publication des comptes par un concurrent ou un créancier. Ici, l'intérêt à agir, première condition de la recevabilité de la demande, est examiné largement et la non-publication des comptes équivaut bien souvent pour la Justice à une présomption de mauvaise santé financière. Or, avec la multiplication des procédures de redressement judiciaire, le parquet a à coeur d'agir le plus en amont possible.

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