Réforme de la formation professionnelle : ce qu'il faut retenir pour les PME
Le Gouvernement a dévoilé lundi 5 mars 2018 le nouveau visage de la formation professionnelle. Compte personnel de formation en euros, refonte de la gouvernance et du financement, soutien aux TPE et PME, les changements sont particulièrement nombreux. La loi a été définitivement adoptée le 1er aout.
[Mis à jour le 22 août 2018 après le vote définitif de la loi le 1er août]
Le deuxième volet de la réforme des parcours professionnel prend forme. Après la présentation du projet gouvernemental en faveur de l'apprentissage, le Gouvernement a dévoilé, lundi 5 mars 2018, ses pistes de refonte de la formation professionnelle, complété par une présentation d'une première version du projet de loi vendredi 6 avril (à consulter ici). Une réforme indispensable, d'après Muriel Pénicaud pour redonner de la compétitivité aux entreprises et lutter contre le chômage de masse en renforçant les compétences des salariés et des demandeurs d'emploi.
Un élément clair pour la ministre du Travail qui a redit la volonté du Gouvernement d'adapter le système de formation actuel aux enjeux de notre temps. "10 à 20 % des emplois sont menacés par la robotisation et le numérique et 50 % des emplois seront transformés d'ici à dix ans. Il ne suffit pas de réformer à la marge mais de transformer notre système de formation professionnelle", a répété Muriel Pénicaud.
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À cet égard, elle a dévoilé douze mesures de transformation de la formation professionnelle qui doivent être incluses, avec la réforme de l'apprentissage et de l'assurance chômage, dans le projet de loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel, présenté en Conseil de ministres, mi-avril 2018.
Démocratisation du CPF
Pour préparer les salariés et les demandeurs d'emploi aux évolutions engendrées par la révolution numérique et technologique, le Gouvernement propose de leur accorder des droits plus importants et les rendre plus faciles d'accès. Ainsi, les crédits du Compte personnel de formation (CPF) se comptabiliseront désormais en euros, en lieu et place du système actuel à l'heure. Il sera crédité chaque année pour un salarié de 500 euros avec un plafond de 5 000 euros au bout de dix ans.
Les entreprises et les branches, via des accords collectifs, pourront abonder le CPF. Une manière d'investir dans la formation de leurs salariés. Les salariés non-qualifiés disposeront, quant à eux, d'un compte personnel de formation majoré à 800 euros chaque année dans la limite de 8 000 euros.
Les salariés à temps partiel, qui sont aujourd'hui majoritairement des femmes, bénéficieront des mêmes droits que les salariés à temps plein. Les femmes seront les premières à disposer de ces nouveaux droits.
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Pour faciliter l'utilisation des crédits du CPF, le Gouvernement frappe fort en se passant du rôle des OPCA. Une application mobile sera créée pour que chaque salarié et demandeur d'emploi puisse s'inscrire et payer la formation choisie, sans passer par un intermédiaire. Cet outil permettra également de connaître les droits acquis, les différentes formations disponibles dans sa région ainsi qu'avoir accès à des informations précises sur les débouchés et les taux d'insertion dans l'emploi.
Pour faciliter l'accompagnement des salariés, des conseils en évolution professionnelle seront créés sur tout le territoire, "au plus près des besoins", a précisé Muriel Pénicaud. L'idée est d'apporter, gratuitement, à chaque salarié, les réponses et les aides aux questions qu'ils peuvent avoir dans un projet de formation et de définition d'un projet professionnel.
Lors de l'examen du texte à l'Assemblée nationale, les députés ont ajouté la possibilité laissée aux étudiants d'effectuer un stage d'observation d'une semaine en entreprise, à l'image de ce qui existe déjà pour les élèves de troisième.
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Soutien aux TPE et PME
Du côté des entreprises, Muriel Pénicaud a été claire : "les TPE et PME doivent être aidées" dans la formation professionnelle de leurs salariés. Pour cela, le Gouvernement compte sur la solidarité financière des grandes entreprises pour leur faire bénéficier d'un accès facilité à la formation. Si le plan de formation sera toujours pris en charge par un système mutualisé, il sera financé par une contribution de toutes les entreprises mais seulement dévolue aux TPE et PME de moins de 50 salariés. "Les TPE et PME sont souvent des fournisseurs ou des distributeurs des grandes entreprises qui ont donc un rôle à jouer", a précisé la ministre du Travail.
D'autre part, pour simplifier la lisibilité des cotisations payées par les entreprises, la contribution formation et la taxe d'apprentissage seront fusionnées en une seule aide, la cotisation formation professionnelle. Le projet de loi prévoit trois taux de contribution : 0,99 % de la masse salariale pour les TPE jusqu'à onze salariés, 1,48 % pour les PME jusqu'à 250 salariés et 1,6 % au-delà. Une période de transition progressive est prévue jusqu'en 2023. Les entreprises de plus de onze salariés devront par ailleurs s'acquitter d'une contribution additionnelle de 0,08 % pour le financement des formations technologiques et professionnelles ou d'insertion professionnelle.
La construction du plan de formation sera lui aussi revu. Les entreprises n'auront plus l'obligation de distinguer les actions mises en place pour l'adaptation au poste de travail ou en lien avec l'évolution et le maintien dans l'emploi. Les actions de développement des compétences et les périodes de professionnalisation sont également supprimées du plan de formation. L'entreprise devra toujours s'assurer de l'adaptation des salariés à leur poste et de veiller à garder leur employabilité.
Une gouvernance revue et corrigée
Si l'objectif est de simplifier l'accès à la formation professionnelle des salariés et des entreprises, ces dernières, avec les branches, disposeront également d'un soutien dans l'établissement de la gestion prévisionnelle de l'emploi et des compétences grâce à des opérateurs de compétences qui remplaceront les OPCA. Ces acteurs "seront bâtis sur des logiques de filières économiques cohérentes", a précisé Muriel Pénicaud.
En outre, une agence nationale, intitulée "France compétences", verra le jour et remplacera les instances de gouvernances actuelles (FPCPP, Cnefop et Copanef). Composée par collèges avec l'État, les partenaires sociaux et les régions, elle aura pour objectif de réguler la qualité et les prix des formations, assurer la péréquation interprofessionnelle pour la formation et l'alternance dans les TPE et PME.
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Ce rôle de régulation de "France Compétences" permettra aux trois collèges d'avoir un regard sur la qualité des formations dispensés par un organisme de formation. Une évaluation qui lui permettra de bénéficier ou non de financements publics. La vérification du contenu des formations constituait un des axes prioritaires du Gouvernement lors du lancement de la concertation à l'automne 2017. D'autre part, le directeur général de France Compétences sera régulièrement auditionné par le Parlement, notamment avant sa nomination et au cours de sa mission.
Ce qu'en pensent les patrons
Dans un communiqué de presse, la Confédération des PME a loué la volonté du Gouvernement de simplifier la gouvernance, d'améliorer la qualité des formations et de créer des opérateurs de compétences pour adapter les besoins des entreprises et des salariés. Toutefois, elle met en garde contre le risque de voir se créer "une usine à gaz" entre l'Urssaf, chargée de collecter la cotisation formation professionnelle, et les acteurs de la formation, à l'image de ce qui a pu exister avec "la mise en place du RSI", précise l'organisation patronale.
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