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Capital talent : plus qu'un coût, un levier de valeur pour les entreprises

Que ce soit dans un contexte d'hyper-croissance ou de transformation, le capital talent est un pilier central de création de valeur et doit être piloté et valorisé dans ce sens. Nouvelle économie, nouveaux KPIs...

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Capital talent : plus qu'un coût, un levier de valeur pour les entreprises

Afin de déployer leur stratégie de transformation, des entreprises comme la Maif, Accor ou P&G se sont focalisées sur le changement de culture et d'organisation comme un élément pivot de cette évolution. Des programmes remettant au centre la confiance, la reconnaissance, dissociant les processus d'évaluation des discussions d'évolution plus long terme, ou encore réinternalisant certaines compétences clés et qui in fine ont eu un impact positif sur le modèle économique. Investir dans ses talents, un levier de performance ?

Une approche trop centrée sur l'optimisation des coûts

Paradoxalement, dans le contexte de guerre de talents que l'on vit aujourd'hui, ce type d'approche est loin d'être majoritaire. Historiquement, le talent a été davantage considéré comme une ressource à optimiser afin de protéger voire d'augmenter les marges. Cette approche s'est traduite par des méthodes de pilotage, de reporting et de valorisation centrées sur le coût généré plus que sur le potentiel de création de valeur associé.

Pourtant à l'heure de la révolution digitale, qui est aussi une révolution de la valeur, les projets d'innovation ne peuvent plus être valorisés uniquement par le biais des flux financiers. Il est aujourd'hui nécessaire que les directeurs financiers et le comex en général adoptent une vision à 360°, qui englobe des actifs immatériels clés tels que le capital client, talent, technologique, l'écosystème, ou l'impact social et environnemental. Plus encore que des piliers de création de valeur, ces actifs, s'ils sont laissés de côté, peuvent être destructeurs de valeur sur le long terme.

On voit apparaître des signes de changement, que ce soit dans la place que le capital talent prend dans les plans stratégiques communiqués aux investisseurs comme chez Accor, ou dans l'émergence de stratégies d'investissement dédiées de certains fonds institutionnels, comme Sycomore et son fonds Happy@work. Un indice de cette évolution est l'apparition de KPIs liés aux talents dans les critères de plans de rémunérations du top management, intégrés par plus de 50% des entreprises du CAC 40.

Plus qu'un coût, un actif vecteur de création de valeur ?

Au même titre que le capital client, le talent doit être abordé comme un actif dont il est possible d'amplifier l'impact sur la performance ou la valorisation des entreprises. En effet sur les 15 entreprises les plus appréciées de leurs talents dans le classement"Great Place to Work", plus de 60% ont surperformé par rapport à leurs pairs sur les 3 dernières années. Et le fonds Happy@work sur 4 ans affiche une performance bien supérieure à son benchmark de comparables.

Le fait de piloter son capital talent permet d'être plus efficace opérationnellement, déployer une nouvelle stratégie et générer des revenus supplémentaires, mais aussi mieux engager ses parties prenantes, notamment ses investisseurs. C'est donc une approche qui doit être partagée par les principaux décisionnaires de l'entreprise et notamment les directeurs financiers dont le rôle pivote de plus en plus vers celui de partenaire des métiers et support de l'innovation.

Et cette centricité talent s'avère un enjeu incontournable des entreprises à toutes les phases de leur développement.

En effet dans les phases d'hypercroissance, les talents sont l'actif numéro un sur lequel s'appuient les start-up, et un élément central dans l'approche de valorisation des fonds VC.

C'est également un pivot essentiel pour des entreprises plus matures engagées dans une phase de transformation. Alors que les modèles évoluent vers plus de centricité-client, la capacité à challenger les métiers historiques, à faire évoluer la relation client-collaborateur, à accroître la culture de l'innovation et à recruter les bonnes expertises sont déterminants.

Mano Mano dans le premier cas, Maif dans le second, en sont des illustrations réussies. A la base de ces stratégies, une relation désormais symbiotique entre talent et employeur où créativité et engagement répondent au sens et à la montée en compétence infinie.

Piloter différemment pour optimiser la création de valeur ?

A l'image de l'approche Customer Lifetime Value permettant d'identifier la création de valeur associée à un client ou une cohorte de clients, de nouvelles méthodologies permettent de mettre en exergue l'impact positif d'un investissement dans les talents et les principaux leviers à chaque étape de leur cycle de vie. Parmi celles-ci, la méthode de l'Employee Lifetime Value développée par la société de logiciels Greenhouse, qui propose un framework de mesure de la création de valeur du talent.

Mais dans cette approche, il faut considérer l'écosystème talent au sens large. Au-delà de l'employé, le talent peut être un collaborateur externe, (freelance, chercheur) ou un alumni. Cela suggère ainsi un potentiel de création de valeur et des possibilités de collaboration infinis entre un talent et une organisation. Cette nouvelle approche de pilotage et de valorisation du capital talent passe par la redéfinition des bons KPIs, qui suivent les différentes problématiques liées au talent, et servent aussi bien à mesurer la performance ou piloter des leviers d'amélioration.

Tant pour développer et piloter leurs talents, que pour mesurer la création de valeur de leur entreprise et engager leurs parties prenantes, les dirigeants, et notamment les directeurs financiers, doivent dès maintenant pivoter dans leur approche. Nouvelle économie, nouvelle approche de valorisation ... le talent est plus que jamais un actif immatériel critique.

Pour en savoir plus

Axelle Ricour-Dumas, associée conseil en stratégie et valorisation, Fabernovel

Elle est associée chez Fabernovel en charge des sujets de Stratégie Corporate et Valorisation de l'Innovation. Avant cela, Axelle fut analyste pendant 15 ans chez Kepler Cheuvreux, où elle co-dirigea l'équipe Midcaps France, puis responsable des Relations Investisseurs chez Ipsos, avant de créer sa propre agence de communication financière. Aujourd'hui, elle accompagne les directions d'entreprise dans la structuration et la valorisation de leurs plans stratégiques.


Gabrielle Peyrelongue, analyste, Fabernovel

Gabrielle a rejoint Fabernovel en 2018 en tant qu'analyste. Elle a travaillé au sein des équipes Fabernovel à Paris et à San Francisco, se concentrant sur plusieurs projets liés à la stratégie d'innovation et aux nouveaux modèles de valorisation basés sur des critères extra-financiers. Elle a également travaillé sur la première publication de la série "New KPIs", dédiée au client.


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