[Tribune] Pacte d'actionnaires : les 5 catégories de clauses incontournables
Il est très fréquent que les actionnaires d'une société (ou certains d'entre eux) concluent, en dehors des statuts de la société, une convention appelée "pacte d'actionnaires". Sa vocation : régir leur relation au sein de la société ainsi que la composition du capital. Focus sur les plus courantes.
Contrairement aux statuts, le pacte d'actionnaires s'impose uniquement à ses signataires. Il sert à régir les relations entre actionnaires et la composition du capital. Il a donc pour vocation de compléter et suppléer les clauses statutaires parfois trop rigides. Il garantit par ailleurs la confidentialité des relations entre actionnaires, contrairement aux statuts qui sont accessibles aux tiers.
Les clauses figurant dans les pactes d'actionnaires sont aujourd'hui très nombreuses et de nature variée. Voici les plus fréquentes :
1. Les clauses de gestion et de contrôle de la société
Généralement, le pacte d'actionnaires comprend des clauses permettant à certains actionnaires d'avoir un contrôle (ou un droit de veto) sur certaines décisions de gestion. Dans ce cadre, le dirigeant doit obtenir la validation préalable d'un organe collégial (comité d'administration, conseil de surveillance etc.) pour les décisions importantes.
Les accords entre actionnaires peuvent également inclure des aménagements spécifiques relatifs à l'équipe dirigeante, tels que les clauses de non-concurrence ou celles organisant le départ d'un dirigeant associé.
2. Les clauses relatives au contrôle de l'actionnariat
Les clauses régissant la stabilité de l'actionnariat de la société sont nombreuses et quasi systématiques dans un pacte. Ainsi, on peut citer :
- les clauses d'inaliénabilité (interdiction pour l'actionnaire de céder ses actions pendant une durée déterminée) ;
- les clauses d'agrément (nécessité d'obtenir l'autorisation préalable, d'un organe collégial, en cas de cession de titres) ;
- les clauses de préemption (en cas de cession de titres, priorité des actionnaires pour le rachat desdits titres) ;
- les clauses de sortie conjointe (droit pour les actionnaires de vendre leurs titres si un actionnaire souhaite vendre ses titres à un tiers acquéreur) ;
- les clauses de retrait (possibilité pour un actionnaire de demander le rachat de ses titres en cas de survenance de certains évènements) ;
- les clauses d'anti-dilution (droit d'un actionnaire de maintenir sa participation dans le capital social de la société en cas d'opération sur le capital) ;
- les clauses de priorité (priorité donné à un actionnaire en cas d'opération sur le capital).
3. Les clauses relatives aux droits financiers
Le pacte peut prévoir plusieurs clauses régissant la distribution de dividendes (obligation de distribuer tous les ans, distribution inégalitaire entre actionnaire etc.) ou du boni de liquidation (bénéfice restant en cas de liquidation de la société).
4. Les clauses de sortie
Il est usuel de prévoir une clause forçant les actionnaires minoritaires à vendre leurs titres en cas d'offre d'achat sur la totalité du capital de la société, acceptée par les actionnaires majoritaires.
Le pacte prévoit également généralement, notamment en cas de présence d'un investisseur financier, une clause dite de liquidité organisant, à terme, la sortie de l'investisseur.
5. Les clauses de rupture ou de situation de blocage
Il est essentiel de prévoir dans un pacte les conditions de sortie d'un actionnaire ou d'un groupe d'actionnaires en cas de situation de blocage de la société ou de grave mésentente entre actionnaires. Certaines clauses permettent ainsi à un actionnaire de forcer la vente des actions d'un autre ou l'acquisition de ses actions (clause de "buy or sell ").
Violation du pacte d'actionnaires : ce que prévoit la jurisprudence
La sanction naturelle de la violation du pacte est la condamnation du responsable à des dommages et intérêts. Cependant, l'octroi de dommages et intérêts ne constitue pas un mode de réparation efficace. L'exécution en nature est plus satisfaisante. À cet égard, les statuts apportent une meilleure sécurité que les accords contractuels. En effet, si une clause figure dans les statuts (agrément, préemption etc.), en cas de violation de la clause, la sanction sera la nullité de la cession (exécution en nature) intervenue en violation et non des dommages et intérêts. Toutefois, ces dernières années, plusieurs décisions de justice ont envisagé l'exécution forcée en nature de certains engagements extra-statutaires, tels que la violation d'un engagement de céder ses titres ou d'une clause de préemption. Ce qui renforce l'efficacité de ces engagements.
L'auteur
Associée du cabinet Bersay & Associés, Me Sandrine de Sousa est spécialisée en droit des sociétés et droit boursier. Elle est diplômée de l'Université de Paris II (Maîtrise de droit des affaires et fiscalité, DESS de droit européen des affaires) et de l'Université de Paris I (DEA de droit de la Common Law). Elle est membre des associations " European Professional Women's Network ", " Dirigeante " et " France-Brésil ".
Sur le même thème
Voir tous les articles Réglementation