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DossierFichier des écritures comptables (FEC) : guide pratique et retour d'expériences

Depuis le 1er janvier 2014, les entreprises tenant une comptabilité informatisée doivent présenter les fichiers des écritures comptables (FEC) sous forme dématérialisée en cas de contrôle fiscal. Règles de constitution, débat contradictoire, retours d'expérience, découvrez notre guide pratique.

Publié par Bénédicte Gouttebroze le
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Fichier des écritures comptables (FEC) : guide pratique et retour d'expériences

1 Qu'est-ce que le FEC?

Depuis le 1er janvier 2014, en cas de contrôle fiscal, les entreprises tenant leur comptabilité sur un système informatisé doivent remettre au vérificateur un fichier des écritures comptables (FEC) accompagné de son descriptif (article L.47 A-I du Livre des procédures fiscales). La remise du FEC consiste en une obligation de forme dont le non-respect peut entraîner de lourdes conséquences pour l'entreprise. Ces fichiers doivent répondre aux normes codifiées à l'article A.47 A-1 du livre précité.

Toutes les entreprises, quel que soit le mode d'imposition BIC, BNC, BA (sauf régime forfaitaire agricole), entrent dans le champ d'application. Les associations exerçant une activité lucrative, les succursales de sociétés étrangères et les SCI soumises à l'IS ou ayant opté à la TVA sont également soumises à ces obligations.


À noter: pour aider les entreprises, l'administration fiscale a publié des commentaires dans le bulletin officiel des finances publiques (BOI-CF-IOR-60-40 et BOI-BIC-DECLA-30-10-20-40) et un questions/réponses, disponible sur le site www.impots.gouv.fr.et désormais un outil pour tester la conformité du FEC

Mis en place depuis janvier 2014, les FEC sont les fichiers dématérialisés que toute entreprise tenant sa comptabilité au moyen de systèmes informatisés est tenue de présenter à l'administration lors d'un contrôle fiscal.

2 Constitution du FEC: rappel des règles

3 Un fichier unique par exercice

Depuis le 1er janvier 2014, le FEC doit être remis au titre des trois derniers exercices clos, en l'absence d'exercices déficitaires, ainsi qu'au titre de l'exercice en cours jusqu'au mois visé par l'avis de vérification, en matière de contrôle de taxes ou impôts autres que l'impôt sur les sociétés.

Le FEC est un fichier de type "plat", ou XML, dont les spécifications sont précisées sur le site www.impots.gouv.fr. Le contenu du FEC, à savoir les données et leur ordre de présentation, est strictement défini par l'article A- 47 A I du LPF.

Ce fichier doit comprendre 18 à 22 champs selon le régime d'imposition. L'entreprise doit constituer un fichier unique par exercice. Celui-ci doit intégrer l'ensemble des écritures validées de l'exercice de la comptabilité générale (y compris les écritures d'à-nouveaux), mais aussi les écritures détaillées des modules auxiliaires centralisés et les écritures d'inventaire.


4 Les écritures exclues du FEC

En revanche, sont exclues du FEC:

  • les écritures de solde des comptes de résultat 6 et 7;
  • les écritures purement analytiques ;
  • les écritures de centralisation des modules auxiliaires (sauf dérogations liées à la volumétrie);
  • les écritures dites "brouillard".

Les enregistrements comptables doivent comporter les mentions minimales précisées par l'article 420-2 du PCG: "Tout enregistrement comptable précise l'origine, le contenu et l'imputation de chaque donnée, ainsi que les références de la pièce justificative qui l'appuie".

À noter que des dérogations existent.

En cas de volumétrie importante, par exemple, la remise sur plusieurs supports est autorisée, en accord avec le service vérificateur. Par ailleurs, en cas d'application métier, le FEC peut comprendre les écritures de centralisation. Les données des applications métiers peuvent également être communiquées dans un autre fichier.

Il existe aussi des dérogations en cas de migration de système ou de fusion.


Le descriptif du FEC

Le descriptif du FEC a pour objectif de faciliter la compréhension du fichier et de communiquer l'ensemble des informations nécessaires à la lecture et à l'exploitation des données. Ce document doit notamment inclure:

  • la codification des établissements;
  • le mode d'identification des écritures de report à nouveau;
  • l'attribution des numéros d'écriture par journal;
  • toute table de concordance;
  • toute information spécifique.

5 Le test du fichier, une étape incontournable

Avant toute remise du FEC, il est important de tester ce fichier et d'anticiper les contrôles de l'administration. Les principaux points de vigilance concernent l'exhaustivité des champs, du format et des données.

Le Daf doit également veiller à la conformité des écritures au regard des réglementations comptables et fiscales, avec une attention particulière sur la comptabilisation des opérations non récurrentes.

Enfin, il est important de contrôler la cohérence entre les données comptables et les déclarations fiscales. Voir sur ce sujet la tribune de Maître Pascal Ngatsing sur Test compta Demat, un outil pour tester la conformité de votre FEC, ou bien encore l'outil Tax analytics du cabinet Taj.

Sur le contrôle informatisé, voir aussi le Bulletin officiel des finances publiques: Conservation et représentation des livres, documents et pièces comptables dans le cadre d'une comptabilité informatisée


La constitution des fichiers d'écritures comptables répond à des normes très précises. Les experts-comptables des cabinets Cofigex et BDO font le point sur les règles à respecter et les normes définies par l'administration.

6 L'impact du FEC sur la relation entreprises/administration

7 Vers des contrôles plus performants ?

L'analyse du FEC peut permettre à l'administration fiscale de relever des faiblesses dans les procédures comptables de l'entreprise et de constater la non-conformité de la comptabilité. Anticiper les demandes de l'administration devient une nécessité.

La mise en oeuvre du FEC étant encore récente, une fois la période de rodage actuelle achevée, les spécialistes anticipent des contrôles plus musclés. "Le FEC offre la possibilité au vérificateur d'appliquer plus facilement des axes de recherche issus de l'expérience de ses collègues", explique Sabine Derboux, directeur de BDO. "Les contrôles devraient être de plus en plus performants avec des échanges de bonnes pratiques entre vérificateurs", ajoute Jean-Marc Allouet, associé du cabinet BDO, responsable du pôle Investigations comptables et audit en système d'information.

Dans ce contexte, les entreprises doivent être attentives au contenu exact de leurs FEC et en amont à leurs pratiques comptables. Transmettent-elles les seuls éléments de comptabilité générale? Comment est tenue leur comptabilité? Selon le PCG? Selon des normes internationales?

"Les entreprises doivent prendre conscience qu'au-delà de l'obligation, les FEC peuvent être source de valeur ajoutée, en leur permettant de faire le point sur leurs process comptables et financiers et renforcer leur contrôle interne", conclut Jean-Marc Allouet.


La mise en place du FEC modifie les rapports entre l'administration fiscale et la direction financière. En permettant des contrôles plus performants, le FEC incite les entreprises à devenir plus rigoureuses dans leurs process comptables.

8 "Le débat oral et contradictoire reste incontournable", Chantal Campagnolo (DGFiP)

9 Qu'est que le FEC change côté DGFiP?

La présentation obligatoire de la comptabilité sous la forme de fichiers standardisés constitue un levier de modernisation pour l'administration fiscale. Elle permet de généraliser le contrôle des comptabilités informatisées à tous les vérificateurs. L'analyse des écritures comptables est plus rapide et les investigations mieux ciblées.

En pratique, le vérificateur procède à la lecture et l'examen des fichiers remis, après en avoir réalisé un contrôle de conformité aux normes applicables. Une application informatique, dénommée Alto 2, lui permet d'effectuer des opérations simples pour vérifier la concordance entre les documents comptables et les déclarations fiscales déposées par l'entreprise.

10 Et côté entreprises?

En modifiant le mode de présentation et de lecture de la comptabilité, qui, il faut le rappeler, n'est qu'une composante de la vérification de comptabilité, la nouvelle procédure permet un débat plus constructif, au bénéfice non seulement des vérificateurs mais également des entreprises.

Je précise à ce propos que le débat oral et contradictoire reste incontournable. En effet, le vérificateur doit toujours conforter ses investigations par la consultation des pièces justificatives et par le dialogue avec l'entreprise, à laquelle il demande des précisions ou justifications sur certaines écritures comptables. Le déroulement du contrôle n'est donc pas fondamentalement bouleversé pour les entreprises.


En octobre 2014, Chantal Campagnolo, chef du bureau expertise juridique du contrôle fiscal à la DGFiP, nous livrait ses impressions sur la mise en place du FEC.

11 Premiers contrôles fiscaux sous FEC: le point de vue des experts

12 Les entreprises ne sont pas encore prêtes

Les FEC sont en vigueur depuis le 1er janvier 2014, soit depuis plus de 18 mois aujourd'hui. Quel premier bilan peut_on en tirer? "Depuis le 1er janvier 2014, l'administration fiscale, comme l'exige la réglementation, a systématiquement demandé aux entreprises contrôlées de fournir ces FEC. Or, toutes les entreprises n'ont pas été en mesure de fournir immédiatement ces fichiers et ont dû solliciter des délais supplémentaires pour les préparer", explique Jean-Marc Allouet, associé du cabinet BDO, responsable du pôle Investigations comptables et audit en système d'information.

Ces fichiers doivent être communiqués au vérificateur lors de sa première intervention dans l'entreprise. Par mesure de tolérance, en 2014 l'administration a accepté que ces fichiers soient remis au cours de la deuxième intervention sur place du vérificateur.

En outre, un délai d'un mois a pu être accordé à l'entreprise pour fournir ces fichiers. Ce délai a une incidence sur la limitation à trois mois de la durée d'exercice sur place prévue pour les vérifications de comptabilités des plus petites entreprises. Le délai de trois mois ne commence à courir qu'à la date de remise effective des FEC conformes pour l'ensemble des exercices vérifiés.

"Moins de 1% des entreprises n'ont finalement pas été en mesure de fournir des FEC conformes" Jean-Marc Allouet, associé du cabinet BDO

13 Pas de nouveau délai pour la mise en place des FEC

"Si ces mesures de tolérance ont été fréquemment utilisées, elles ne seront pas reconduites, l'administration estimant que les entreprises ont eu le temps nécessaire pour se mettre à jour sur ces nouvelles obligations. D'après les chiffres fournis par Bercy, moins de 1% des entreprises n'ont finalement pas été en mesure de fournir des FEC conformes", explique Jean-Marc Allouet.

Pour l'administration, ces chiffres permettent de considérer que l'opération est un succès. Les entreprises se sont bien adaptées. Et les efforts en termes de formation en interne pour que les équipes s'emparent de l'outil portent leurs fruits.

14 Maintien du débat contradictoire

À l'exception de délais de contrôles facilités et donc raccourcis pour certaines TPE, les entreprises n'ont pas encore fait remonter d'impacts significatifs des FEC sur le cours du contrôle, que ce soit en matière de motifs de redressement, de montant de redressement, etc.

"De même, la qualité des échanges entre l'administration et le contribuable n'est pas affectée, explique Sabine Derboux, directeur de BDO. La remise du FEC ne doit pas avoir pour effet de priver l'entreprise d'un débat oral et contradictoire avec le vérificateur. Compte tenu du risque que représente un travail isolé du vérificateur, l'administration fiscale a décidé de porter une attention particulière au maintien de la qualité des échanges avec le contribuable."

Accroissement de la précision et réduction des délais du contrôle pour l'administration, renforcement du contrôle interne et augmentation de la fiabilité de l'information financière pour l'entreprise: les experts du cabinet BDO reviennent sur 18 mois d'utilisation de l'outil FEC.

15 Premier contrôle fiscal sous FEC: le point de vue du Daf


La société Serac a eu à fournir les fichiers des écritures comptables dans le cadre du contrôle fiscal initié par l'administration fiscale en mars 2015 au sein du groupe. Serac group, qui compte huit filiales, quatre à l'étranger et quatre en France, n'a eu "aucune difficulté à fournir ces fichiers, relate son directeur financier, Gérard Guesné. Nous sommes contrôlés environ tous les quatre ans. Nous avions travaillé sur ce sujet bien en amont et avons donc répondu rapidement et facilement aux demandes de l'inspecteur en charge de notre contrôle."

Si le directeur financier déplore "cette nouvelle obligation à l'heure où on nous promet de simplifier la vie de l'entreprise", il en a tiré un plein bénéfice: "En missionnant un tiers pour auditer nos fichiers FEC, nous avons pu utiliser cette obligation pour auditer nos process comptables et financiers, en accroître la sécurité et la justesse et à terme agir pour une plus grande efficience de l'entreprise."

Concernant l'impact de cette remise de fichiers sur le contrôle fiscal en tant que tel, Gérard Guesné précise qu'aucune question concernant ces FEC n'a été posée: "J'ai plutôt le sentiment que le contrôleur a continué à creuser les deux ou trois sujets qui l'intéressaient dès le début du contrôle au moyen des éléments papier qui sont habituellement demandés lors d'une vérification. Il est possible qu'actuellement, l'administration se contente de vérifier la capacité de l'entreprise à transmettre ces FEC sans encore les exploiter pleinement."

Et pour l'avenir? "Les contrôles vont être plus aisés et plus rapides avec les FEC. L'administration pourra aisément utiliser des comparables sur un même secteur et identifier les anomalies, estime le directeur financier de Serac qui s'appuie sur son expérience pour le dire. Dans nos filiales étrangères, notamment en Malaisie et au Brésil, nous avons l'habitude de ces contrôles sur fichiers dématérialisés et ne les redoutons pas. Au Brésil, ces fichiers font partie intégrante de la liasse annuelle et permettent de cibler les contrôles. J'imagine que la France intégrera bientôt ce type d'obligations."


Repères

Raison sociale: Serac GROUP

Activité: Fabrication d'équipements d'emballage, de conditionnement et de pesage

Forme juridique: SAS

Siège: La Ferté Bernard (72)

Création: 1969

Président: Guy Dumargue

Directeur financier: Gérard Guesné

CA consolidé 2014: 110 M€

Effectif 2014: 565 salariés


À lire aussi: car les FEC vous amènent à repenser vos rapports avec la DSI, retrouvez notre dossier "Quand le Daf pilote la DSI"

Gérard Guesné, directeur financier de Serac Group, a connu en mars 2015 un premier contrôle fiscal pour lequel il a dû fournir les FEC de son entreprise. Retour d'expérience.

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