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Que font les fonds : 360 Capital accélère le développement des climate tech et deep tech

360 Capital, spécialiste du capital-risque, investit en Europe dans des solutions dites climate tech (décarbonation) et deep tech (innovations de rupture) à forte valeur ajoutée. Rencontre avec Alexandre Mordacq (Partner) et Emanuele Levi (Partner et co-fondateur) à l'occasion du lancement du nouveau fonds « 360 Life 2 ».

Publié par Christina DIEGO le | Mis à jour le
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Que font les fonds :  360 Capital accélère le développement des climate tech et deep tech
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Quelle est la spécificité du fonds 360 Life 2 ?

Alexandre Mordacq : Lancé dans le sillage du fonds pilote 360 Life 1, initié en 2020, le fonds 360 Life 2 s'inscrit dans une stratégie d'investissement articulée autour de trois grandes thématiques liées à la lutte contre le changement climatique : la transition énergétique, l'économie circulaire et la ville durable. Fort d'un premier closing de 140 millions d'euros réalisé en décembre 2024, il vise un montant final de 200 millions d'euros d'ici la fin de l'année 2025. 360 Life 1 avait été conçu comme un fonds expérimental doté d'environ 30 millions d'euros. Il a permis d'investir dans huit sociétés implantées dans cinq pays européens, avec des tickets allant de 1 à 5 millions d'euros.

360 Life 2 se distingue par son positionnement à l'interface de la climatech et de la deeptech, avec une conviction forte : les enjeux climatiques ne peuvent être adressés sérieusement sans solutions technologiques tangibles et robustes, notamment dans le domaine du hardware. Cette approche repose sur une décennie d'expérience dans l'investissement en technologies industrielles à fort contenu scientifique. Ce positionnement est renforcé par un écosystème d'investisseurs industriels et corporate, mobilisés en amont pour qualifier les projets, et capables de co-développer des solutions avec les start-up en portefeuille. Cette proximité entre finance, technologie et industrie permet de sécuriser des premiers contrats, d'ancrer les innovations dans un usage réel, et de construire des trajectoires commerciales solides.

Quels sont les axes d'investissement au coeur de la stratégie ?

A. M. : Nous avons priorisé trois axes d'investissement. Un premier « La transition énergétique » qui constitue près de la moitié des opportunités étudiées, couvre des secteurs tels que le stockage (batteries), la production et la distribution d'énergie, les carburants alternatifs (hydrogène, méthanol), ainsi que les technologies de décarbonation, dont la capture de carbone.

« L'économie circulaire », moins courue par les fonds d'investissement en raison de sa complexité technologique, est néanmoins stratégique. Elle inclut le traitement des déchets industriels, la gestion de l'eau et la préservation des ressources naturelles. Deux des premiers investissements de 360 Life 2 s'inscrivent dans ce domaine.

Enfin, la verticale « La ville durable » regroupe des innovations visant à améliorer les conditions de vie dans les zones urbaines en pleine expansion, dans une logique de résilience et de sobriété environnementale.

Comment la société 360 Capital est-elle née à la fin des années 90 ?

Emanuele Levi : Au moment de la création de 360 Capital, en 1997, le paysage du capital-risque en France - et plus largement en Europe - était encore embryonnaire. Il ne comptait qu'une dizaine d'acteurs significatifs, et la structuration des approches d'investissement y était encore largement généraliste. Les fonds, à cette époque, se concentraient essentiellement sur le numérique, qui représentait alors le coeur des dynamiques d'innovation. Dans ce contexte, 360 Capital s'est initialement positionné autour de l'idée d'un spectre large, couvrant l'ensemble du champ de l'innovation technologique. C'est d'ailleurs ce principe d'ouverture et de diversité sectorielle qui a inspiré le choix du nom « 360 » : un fonds se donnant la liberté d'investir à 360 degrés, sans se contraindre à une verticale.

Comment vous êtes-vous intéressé aux verticales Climate et Deep Tech ?

E. L. : Comme de nombreux acteurs du capital-risque européen, 360 a progressivement évolué vers davantage de spécialisation. Le positionnement actuel, bien plus ciblé, s'inscrit dans une dynamique partagée par plusieurs confrères, avec un recentrage sur des thématiques structurantes comme la deep tech, la climate tech ou les technologies industrielles. Cette spécialisation s'est naturellement accompagnée d'une transformation du profil des équipes. À l'origine, en 2007, les équipes étaient principalement composées de profils issus d'écoles de commerce ou du conseil en stratégie, dans la lignée des parcours classiques du capital-risque de l'époque. François Tison, premier ingénieur du bureau parisien, représentait alors l'exception.

Aujourd'hui, la montée en complexité technique des sujets traités - notamment dans les domaines du climat ou de la transition énergétique - impose un niveau d'expertise différent. Le fonds a donc opéré une inflexion claire dans ses recrutements, en intégrant désormais des collaborateurs issus de formations d'ingénieurs ou de filières scientifiques, capables de conduire une analyse fine des dossiers, au croisement de l'innovation technologique et de la faisabilité industrielle. Cette évolution n'a pas remis en cause l'ADN de la maison, mais l'a fait mûrir. Le coeur de l'équipe senior reste composé de professionnels ayant suivi des trajectoires comparables dans l'investissement et l'entrepreneuriat. Seul Nader Sabbaghian, qui a rejoint le fonds en 2015 après un parcours d'entrepreneur et de business angel, s'est distingué par un profil plus atypique au sein du collectif. Ce parcours illustre l'évolution progressive, mais déterminée du capital-risque européen vers des logiques de spécialisation et d'adossement à l'expertise sectorielle.

Quels ont été les moments-clés de la création de 360 Capital ?

E. L. : Trois dates-clés marquent, à mes yeux, l'évolution de notre trajectoire en tant qu'investisseurs en France. Le premier se situe en 2007, année où nous avons amorcé un véritable renforcement de notre présence sur le territoire. L'ambition était alors claire. Nous positionner durablement comme un acteur significatif du capital-investissement en France. À partir de 2007, nous nous sommes développés en France, ouvert des bureaux à Paris, à travers une structuration plus robuste de nos effectifs et de nos activités locales.

Le second moment charnière intervient en 2015, avec une étape décisive : la fusion avec le fonds Robolution. Cet événement a agi comme un catalyseur stratégique, en nous offrant l'opportunité de faire évoluer en profondeur notre approche d'investissement. C'est à partir de là que nous avons initié un mouvement vers la spécialisation sectorielle, ou verticalisation. Entre 2007 et 2014, notre portefeuille était principalement composé d'opérations B2C, souvent peu technologiques - parmi lesquelles Yellow Corner ou Le Slip Français. L'année 2015 marque donc une inflexion nette dans notre positionnement, impulsée en partie par une conjoncture favorable. Il est important de souligner que ces choix naissent d'opportunités concrètes qu'il convient de saisir au bon moment.

Ces deux étapes - 2007 et 2015 - symbolisent ainsi à la fois notre enracinement dans l'écosystème français, et notre montée en sophistication en tant qu'investisseur thématique. Il faut d'ailleurs rendre justice à l'environnement institutionnel français qui, dès cette époque, s'est révélé attractif et propice au développement. Le dynamisme croissant de la place parisienne, soutenu par des politiques publiques volontaristes, a joué un rôle essentiel dans notre décision de nous établir durablement en France et d'y déployer notre stratégie de croissance.

Un troisième moment structurant dans notre trajectoire correspond à 2020, qui est est né en partie d'une opportunité extérieure, mais qui s'est avéré déterminant par la suite. Nous avons été approchés à cette époque par A2A, notre partenaire italien dans le secteur de la climate tech, dont le rôle en Italie est analogue à celui d'un acteur tel qu'Engie en France. Leur volonté était claire : structurer un fonds dédié à la climate tech, et plus spécifiquement à la transition énergétique. À ce moment-là, nous ne disposions pas encore en interne des expertises techniques nécessaires pour adresser pleinement ce champ d'investissement. Toutefois, l'idée nous a immédiatement paru pertinente et porteuse. Nous avons alors décidé de lancer un fonds pilote, de taille modeste, dans une logique d'exploration et de validation de thèse.

Le succès rencontré a très rapidement confirmé la justesse de cette intuition. Ce fonds expérimental a non seulement permis d'attirer des projets à fort contenu technologique, mais aussi de poser les fondations d'une expertise sectorielle qui manquait jusque-là à notre plateforme. Ainsi, 2020 peut être considéré comme le point de départ de notre engagement structuré dans l'univers de la climate tech, et constitue à ce titre un troisième jalon significatif dans l'évolution de notre positionnement stratégique.

Quelle est la spécificité du capital-risque italien ?

E. L. : Notre particularité en Italie réside dans le fait que nous demeurons, à ce jour, le seul acteur du capital-risque italien à porter une véritable ambition internationale. Si notre ancrage opérationnel principal est à Paris, nous avons, dans le cadre de notre activité, investi dans cinq pays européens distincts - notamment en Espagne, au Royaume-Uni et en Suisse - avec une attention particulière portée aux thématiques liées à la Climate Tech.

Ce positionnement transfrontalier reflète une conviction stratégique : l'émergence de modèles plus innovants, en particulier dans les secteurs de rupture, ne saurait être observée de manière isolée. L'internationalisation de notre approche nous permet d'enrichir considérablement notre lecture des tendances, des technologies et des dynamiques entrepreneuriales. À cet égard, notre présence significative à Paris constitue un atout de premier ordre. Elle nous donne accès, de manière directe et continue, à l'un des écosystèmes d'innovation les plus dynamiques d'Europe, mais aussi à un point d'observation privilégié sur l'Allemagne, souvent plus pertinent à nos yeux que le marché londonien.

En termes de développement pour 360 Capital, quels pays visez-vous ?

E. L. : L'Espagne constitue aujourd'hui, après la France et l'Italie, le marché sur lequel nous sommes le plus actif. Si je devais formuler une projection à l'horizon des vingt-quatre prochains mois, il est probable que l'Espagne s'impose comme un pôle majeur de notre activité. D'ailleurs, en termes d'écosystème, elle a désormais dépassé l'Italie. Leur progression est manifeste. Ils ont accompli un travail remarquable de structuration et de dynamisation. Le pays bénéficie en outre d'un atout spécifique, avec deux pôles d'innovation distincts mais complémentaires : Madrid et Barcelone. Ce sont deux écosystèmes autonomes, différents dans leur fonctionnement et leur orientation, mais tous deux très dynamiques. Cela contraste avec la situation italienne, où la scène technologique est très fortement concentrée autour de Milan. C'est, dans une certaine mesure, comparable à la configuration française, où Paris reste le centre de gravité incontesté.

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