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DossierLes évolutions de la comptabilité dans les PME et ETI

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1 - Et si vous optiez pour l'externalisation comptable?

Perçue comme une perte de pouvoir il y a encore peu de temps, l'externalisation de ses services comptables a de plus en plus la faveur des Daf. Le point sur les atouts et les faiblesses des solutions outsourcées avec les professionnels du secteur.

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L' externalisation, ou business process outsourcing (BPO), semble aujourd'hui largement pratiquée par les entreprises françaises: 82% d'entre elles externalisent au moins une fonction, selon l'Observatoire Cegos 2011 "Les stratégies d'externalisation des entreprises françaises", les PME n'étant pas vraiment en retard en la matière (78%).

À première vue, la comptabilité, à l'instar des fonctions finance ou gestion, n'est pas facile à externaliser, comparée à des fonctions du type logistique, informatique, SI. Pourtant, plus de 15% des entreprises privilégient une telle solution, selon ce même observatoire. D'après des chiffres publiés par Grant Thornton/Ifop, les entreprises de 100 à 2000 salariés ont un taux d'externalisation comptable stable depuis 2008. Néanmoins, ce taux augmente en fonction de la taille de l'entreprise (18% pour les entreprises de 500 salariés).

"Initialement, les Daf n'étaient pas favorables à l'externalisation de leur comptabilité, qu'ils vivaient comme une perte de maîtrise de l'information et donc de pouvoir, explique Sophie Salomé, associée, responsable de l'activité expertise comptable de PwC France. Ce n'est plus le cas." Les acteurs du secteur soulignent une mutation culturelle sur ce point. "La pression exercée sur les directions financières pour qu'elles réduisent leurs coûts et qu'elles se concentrent sur l'analyse et la prospective a changé la donne, reprend Sophie Salomé. On assiste à un vrai regain d'intérêt pour les solutions BPO, notamment chez les PME de bonne taille."

Quel périmètre d'activité ?

Le périmètre d'externalisation apparaît variable. Comptabilité client, comptabilité fournisseurs, comptabilité générale, consolidation, audit ou contrôle interne, voire la direction financière pour une période temporaire, il existe des solutions sur mesure en fonction des besoins des entreprises. "On distingue traditionnellement deux types d'externalisation. La première consiste à déléguer des tâches à faible valeur ajoutée: validation de règlements, de notes de frais, de bons de commande par exemple. Puis viennent les missions à haute valeur ajoutée comme la consolidation, explique Alain Ouaniche, expert-comptable, président d'OCA. Un groupe de petite ou moyenne taille n'a pas nécessairement les moyens de se doter en interne d'un spécialiste de la consolidation, ni d'investir dans des logiciels très coûteux. Il va préférer faire appel à nos services, car nous pouvons mutualiser ces ressources."

À cet égard, le recours à un tiers à la signature connue est perçu par beaucoup comme un moyen de crédibiliser les chiffres de l'entreprise, ce qui facilite le travail des CAC. Pour Sophie Salomé, "le scope de nos interventions a tendance à s'élargir: tenue de la comptabilité, compliance fiscale, préparation des règlements fournisseurs. Les nouveaux outils collaboratifs qui nous offrent une grande réactivité et qui laissent au client un accès continu à ses informations ont accéléré ce mouvement."

Les avantages ciblés par les Daf

Quelles sont les raisons avancées par ceux qui optent pour l'externalisation de leur comptabilité? Avant tout, recentrer leur activité et celle de leurs équipes sur le coeur de métier de l'entreprise. "Grâce au temps gagné sur la production de chiffres, les équipes comptables peuvent allouer plus de temps au contrôle des informations générées et le Daf peut se consacrer à l'analyse de ces informations", résume Alain Ouaniche. Opter pour l'externalisation permet en outre à la direction financière de mieux maîtriser les coûts liés à cette fonction (masse salariale chargée, coûts de formation, d'exploitation et de maintenance du ­système d'information comptable, etc.) voire d'optimiser ces coûts, via à un partenaire externe, afin de développer des économies d'échelle.

La réduction des coûts d'exploitation reste d'ailleurs le premier critère pour près d'une entreprise sur deux optant pour des solutions BPO. "Attention à ne pas surévaluer ces économies, analyse Fabienne Borremans, RAF de France Télévisions Distribution (37 millions d'euros de CA en 2012), qui s'avoue peu convaincue par le principe de l'externalisation, qu'elle n'a en conséquence encore jamais mis en pratique. Je vois mal comment mettre en place ce type de solution sans une interface de liaison importante. Et cette interface va avoir un coût."

Mais un autre argument peut être avancé en faveur de l'externalisation comptable: le manque de compétences en interne. "On se heurte à un déficit de ressources comptables de bonne qualité, témoigne en effet Fabienne Borremans. Depuis une dizaine d'années, les jeunes se sont détournés de la comptabilité pour privilégier d'autres métiers jugés plus attractifs. J'ai de vraies difficultés à recruter un comptable fournisseur ou un comptable client. À cet égard, l'externalisation pourrait incarner une solution."

L'externalisation, pour qui?

L'outsourcing convient-il à toutes les équipes? Il est particulièrement adapté aux entreprises dont les opérations comptables de base, saisie et contrôle des factures fournisseurs par exemple, ont un volume important. "Ce volume va permettre des économies d'échelle significatives en faisant appel à un prestataire extérieur qui aura standardisé ces opérations et réduit d'autant ses marges", explique Alain Ouaniche, dont la société OCA a créé une filiale dédiée basée en Tunisie. "Cette plateforme back-office centrée sur les tâches d'exécution nous permet d'offrir des prix très attractifs à nos clients."

Autre situation dans laquelle l'externalisation s'impose: celle des entreprises qui souhaitent une plus grande flexibilité face aux variations d'activité. Ainsi, les PME qui doivent effectuer chaque mois rapidement un reporting à leurs sociétés mères ont, pendant les journées de préparation de ces éléments, des besoins en main-d'oeuvre bien supérieurs à ceux qu'elles connaissent habituellement. Il en est de même des entreprises qui sont traditionnellement confrontées à des pics de production ou de vente.

"Autres consommatrices de solutions externalisées, les sociétés rachetées par des fonds d'investissement: les nouveaux actionnaires vont non seulement chercher à rationaliser les coûts, mais également souhaiter fiabiliser et accélérer la production de ­l'information comptable", analyse Alain Ouaniche.

Quels risques?

"À mon sens, il est difficile pour un prestataire externe d'avoir la même connaissance métier qu'une équipe internalisée, explique Fabienne Borremans. Or, la fonction support des équipes comptables est de plus en plus valorisée. On nous demande de pouvoir concrétiser un modèle économique pour accompagner les commerciaux dans la vente d'un nouveau produit, de réfléchir d'un point de vue financier à l'intégration d'un nouveau métier au sein de l'entreprise, etc. Autant de fonctions qui ne me semblent pas délocalisables."

Autre crainte affichée par les directions financières, une perte des compétences en interne sur les processus externalisés et donc une difficulté à réinternaliser le cas échéant. Le manque de maîtrise ou de compréhension de l'information sur ses propres données et un risque de déperdition des procédures de contrôles sont également mis en avant.

Manon Sandrini

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