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3 recommandations pour transformer les PME en ETI

Véritable enjeu de croissance, la transformation des PME en ETI peine encore à s'illustrer en France. Au-delà de la question du financement, c'est toute la conception du monde de l'entreprise qui doit être reconsidérée, selon l'association Ariane.

Publié par Pierre Lelièvre le | Mis à jour le
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3 recommandations pour transformer les PME en ETI

Grandir, se développer et passer un cap : la route des PME se voudrait toute tracée. Pourtant, si un grand nombre de PME sont sources de croissance, reste la difficile question de leur développement et de leur transformation en ETI. Un sujet délicat que l'association Ariane "Compétences & management" qualifie de "mal français" dans son analyse.

Le passage du statut de PME en ETI s'avère, en effet, compliqué. Alors que la France dénombre près de 140 000 PME (Insee), elle ne compte que 4 500 ETI, soit trois fois moins que l'Allemagne (13 000), d'après les chiffres de la Fondation Entreprendre.

Lors d'une table-ronde organisée mercredi 18 janvier 2017 par l'association Ariane - qui milite pour le développement des PME -, économistes et spécialistes du monde de l'entreprise ont débattu de la situation des PME en France et émis trois préconisations relatives à leur développement et à leur capacité de transformation.

1. Améliorer la connaissance sur les PME

Si la problématique de leur croissance réside, d'une part, d'un manque de fonds et de sources de financement, elle s'appuie également sur une méconnaissance de l'écosystème des petites et moyennes entreprises (PME).

Pour Thierry Aumonier, ancien énarque et conseiller auprès de dirigeants d'entreprises, certaines informations sont parfois nuisibles à la bonne appréhension de l'environnement des PME, notamment en termes statistiques. "L'étude de l'écosystème est trompeuse, constate-t-il. Par exemple, sur le nombre de créations et de destructions d'entreprises, on réduit les entreprises à leurs unités légales alors qu'elles sont nombreuses à ne comporter aucun salarié et à n'avoir aucune activité". Un constat que conforte Robin Rivaton, essayiste et économiste, qui dénonce la posture "figée" de l'étude de la situation des entreprises, alors que cela devrait se faire "dans une dynamique de croissance et de mouvement".

L'autre symbole du biais informatif repose sur la non prise en compte de la diversité des PME. D'après une enquête TNS-Sofres de 2012 auprès de 1 210 dirigeants de PME, commandée par l'association, 57 % des entreprises de 10 à 49 salariés sont indépendantes, alors que dans le même temps, celles employant 200 à 250 salariés sont à 84 % des filiales de grandes entreprises. "Ce chiffre est encore aujourd'hui significatif, confirme Thierry Aumonier. Même s'il se base sur un échantillon représentatif, il constitue une alerte à prendre en compte dans l'appréhension des données sur les PME".

Une dichotomie qui contribue, selon les experts, à mal considérer les PME tant dans les chiffres que dans les politiques publiques mises en place. De fait, s'ils constatent une amélioration récente des études de l'Insee, l'association prône un meilleur affinage des statistiques pour prendre en compte la pluralité des situations.

2. Reconsidérer la relation PME / grandes entreprises

"Les PME ne doivent plus être considérées comme des sous-traitants des grandes entreprises mais comme des partenaires", préconise Gonzague de Blignières, président-fondateur de Raise, une société d'investissement et fonds de dotation. Pendant longtemps, les PME ont, en effet, été considérées comme des entreprises de soutien aux grandes entreprises en leur permettant d'ajuster simplement leur production.

Un temps, aujourd'hui, révolu pour l'association Ariane. Le développement du numérique et le dynamisme des jeunes PME innovantes ont transformé la manière dont doivent s'établir les relations entre ces acteurs. Pour leur permettre de croître, c'est davantage la manière dont les grandes entreprises considèrent les PME de croissance qui doit être revue et adaptée, ainsi que leur capacité à travailler ensemble et à être solidaires entre-elles pour accentuer leur développement.

Dénonçant les freins à l'affranchissement de la tutelle des grands groupes sur les petites entreprises - notamment les délais de paiements - Gonzague de Blignières préfère miser sur le renouvellement générationnel des dirigeants de PME. "Beaucoup de jeunes chefs d'entreprise sont ouverts au numérique, à l'international et à la dynamique de croissance", résume-t-il.

En parallèle, intervenant sur la question de la transmission, l'ancien président de Barclays Private Equity France se dit favorable à la création du statut de fondation - à l'instar de ce qui se fait en Allemagne - afin d'encourager davantage la transmission des PME.

3. Réconcilier la fonction publique au monde de l'entreprise

Enfin, face au constat que les agents de l'État en prise directe avec les entreprises - cadres des ministères des Finances, de l'Économie ou des Finances notamment - ne bénéficient pas suffisamment de formation au monde de l'entreprise, Maud Bailly, inspectrice des finances et ex-directrice du pôle économique auprès de l'ancien Premier ministre Manuel Valls, est revenue sur le besoin d'accroître la formation des futurs cadres de l'Administration par une expérience en entreprise.

S'interrogeant également sur "les rapports qu'entretiennent les élèves de l'école de service public vis-à-vis du monde de l'entreprise", Maud Bailly a plébiscité "le développement de la mixité des parcours entre le privé et le public", jugeant que "le pire piège est le cloisonnement des parcours". Pour Thierry Aumonier, "pendant longtemps et encore aujourd'hui, l'action publique et le privé ont été opposés, il faut en finir avec cette situation". Un constat partagé par l'association Ariane, qui estime également que l'administration française "cultive sa différence". Selon elle, il n'est "pas question, [en France] de mélanger ceux qui sont appelés à la servir à ceux qui intégreront une entreprise". Maud Bailly s'est dite, par ailleurs, favorable au renforcement des épreuves de management dans les écoles de service public.

En lien avec cette proposition, l'association Ariane préconise également d'autres recommandations pour réconcilier l'école et les PME. Développement de l'offre de stage en entreprises pour les étudiants, étude de cas spécifiques au monde des petites et moyennes entreprises, ou encore renforcement de la formation des dirigeants de PME, le chemin est encore long.

Dans cette optique, le besoin de formation des dirigeants est impératif. "Une des questions cruciales de la transformation des entreprises est la nécessité de développer les compétences managériales des cadres dirigeants des PME et de leur proposer une formation continue", conclut Yann Laroche, président d'Ariane.


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