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Jean-Paul Betbèze, conseiller économique chez Deloitte : "L'incertitude, c'est la mutation"

L'économiste Jean-Paul Betbèze analyse les résultats de la cinquième édition du CFO Survey de Deloitte. Un regain d'optimisme terni, selon lui, par de l'incertitude. Une incertitude due à la mutation. "Où va-t-on ?" semblent se demander les Daf.

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Jean-Paul Betbèze, conseiller économique chez Deloitte : 'L'incertitude, c'est la mutation'

"Ça va mieux mais ça change beaucoup" : voici la formule par laquelle l'économiste Jean-Paul Betbèze, conseiller économique chez Deloitte, résume l'état d'esprit des Daf, à la suite de la publication de la cinquième édition du CFO Survey de Deloitte. En effet, la prudence reste de mise parmi les Daf français interviewés : 59% considèrent la conjoncture actuelle en France identique à celle d'il y a 6 mois (été 2014) tandis que 15% se disent optimistes et 23% pessimistes.

"Les Daf sont partagés entre l'optimisme et l'incertitude", tranche Jean-Paul Betbèze. Une remarque qu'avait déjà formulée Laurence Parisot lors du CFO Dinner en décembre 2014 : "Nous sommes certains d'une chose, c'est que l'incertitude domine". Un fait que souligne l'étude de Deloitte : 75% des Daf interrogés considèrent que c'est l'incertitude économique européenne générale qui est le principal facteur de risque pour la performance de leur entreprise pour les 12 mois à venir.


Investir dans la formation...

Une incertitude vis à vis du climat économique d'ensemble. Mais aussi vis-à-vis de l'évolution des entreprises : nouvelles technologies, désindustrialisation, internationalisation... Où va-t-on finalement ? "L'incertitude, c'est la mutation", insiste Jean-Paul Betbèze. Une mutation qui fait que, d'un côté, certaines activités sont détruites, tandis que de nouvelles compétences deviennent nécessaires.

Ce qui nécessite de nouveaux arbitrages. Notamment au niveau des investissements : "On n'investit plus dans des machines mais dans des logiciels et de plus en plus dans la formation", souligne l'économiste.


... investissement risqué

Les Daf sont plus que jamais conscients de cette nécessité d'investir désormais dans le capital humain : l'étude de Deloitte révèle que la gestion des équipes et des talents est la priorité n°1 des CFO (56% des directeurs financiers interrogés), devant la stratégie de l'entreprise (55%) et les risques et le contrôle interne (40%).

Seul hic : "L'investissement en capital humain, même si c'est celui qui fera la différence, est le plus risqué : l'investissement dans la formation est irrécouvrable", pointe Jean-Paul Betbèze. En effet, contrairement à des machines outils, la formation ne se revend pas... Et part avec l'employé lorsque celui-ci quitte l'entreprise.

Jean-Paul Betbèze regrette donc que la loi Macron 1 se focalise sur les investissements physiques et délaisse les services qui sont, selon lui, "la richesse française".


Nécessité de beaucoup plus de profits

Incertitude, investissements plus risqués... Les entreprises ont du mal à passer le pas et à investir. "Il est difficile de comprendre ce qu'il faut faire. Et il faut plus de profits qu'avant puisque les investissements sont plus risqués", note Jean-Paul Betbèze. Selon lui, nous sommes dans une phase post-Shmidt, en référence à l'économiste qui avait énoncé le théorème "Les profits d'aujourd'hui sont les investissements de demain et les emplois d'après-demain" : "Il faut beaucoup plus de profits pour faire un peu d'investissements et espérer peut-être générer longtemps après des emplois", observe-t-il.

La logique est donc de réduire la voilure sur certaines activités afin d'investir ailleurs. Un auto-financement qui nécessite de la valeur ajoutée. "Or, en France, il manque de la valeur ajoutée : le ratio EBE/VA est de seulement 29%, contre 36% en Allemagne", rapporte l'économiste.

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