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[Grand angle] Chine: la nouvelle route de la soie, source d'opportunités pour la France?

Relier la Chine au Proche-Orient, à l'Afrique, ou encore à l'Europe, tant par la terre que par la mer: tel est l'enjeu de la route de la soie. À l'occasion de la conférence Coface risque pays 2018, Jean-Pierre Raffarin a analysé les opportunités de ce projet pour la France.

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[Grand angle] Chine: la nouvelle route de la soie, source d'opportunités pour la France?
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Identifiée comme "une des deux opportunités de long terme", a rappelé Xavier Durand, dg de la Coface, mais aussi comme l'un des risques - avec l'Arabie Saoudite - "pouvant avoir un impact systémique", selon Julien Marcilly, dans une interview donnée le 23 janvier 2018 au Figaro, la Chine était l'un des focus du Coface risque pays 2018.

Avec en premier orateur, Jean-Pierre Raffarin. L'ancien Premier ministre, chargé par le président Macron d'une mission de soutien des entreprises françaises présentes en Chine, s'est exprimé sur la question suivante: "Faut-il avoir peur de la route de la soie?"

Un projet politique

Cette route de la soie du XXIe siècle, celle du président Xi Jinping, repose essentiellement sur des travaux d'infrastructures sur "plus de 50 ans pour asseoir la montée en puissance de la Chine face au retrait des États-Unis et de l'Europe". Elle est, selon Jean-Pierre Raffarin, la mécanique d'une vision. Cette vision, "celle de la communauté de destin de l'humanité où la planète est le foyer de tout le monde, nécessite de parler au monde: la coopération est nécessaire, on a besoin des uns des autres, de vivre ensemble."

D'où, selon l'ancien Premier ministre, "leur investissement dans l'accord de Paris: le développement durable et le multilatéralisme sont les deux fondamentaux de cette vision." Et la route de la soie version XXIe siècle en sera la mécanique, donc. Elle consiste à construire un projet politique associant les partenaires à la vision chinoise. La surcapacité industrielle, l'internationalisation de sa monnaie, les relations avec ses voisins sont des problèmes que la Chine veut résoudre par cette démarche. "Un objectif: la connectivité." Au service de cette mécanique: "1000 milliards d'investissements pour la route de la soie, avec un objectif non pas à 5 ans mais à 50 ans. La Chine prend son temps, mais elle ira au bout", a insisté celui se rend dans l'empire du Milieu depuis 48 ans.

La Chine passe de l'émergence au leadership

Pendant 40 ans, la stratégie appliquée par la Chine était celle "du mine de rien, j'avance doucement sans montrer mes ambitions et je constitue un potentiel de situation. Il s'agit là de la période Deng Xiaoping." Et si le PIB/habitant reste très faible, "désormais la Chine est leader dans bien des secteurs et a noué de nombreux partenariats [NDLR: Bric, Russie...]. Elle ne peut plus cacher son ambition et ses positions, elle assume désormais son leadership". Et Jean-Pierre Raffarin de faire référence au discours du président Xi Jinping lors XIXe congrès du parti communiste chinois, où ce dernier insistait sur le dialogue comme unique remède, voulant ainsi se distancier du protectionnisme affiché par les États-Unis de Trump. Et sachant que pour les Chinois, "un bon ami est un ami prévisible", Trump semble dès lors disqualifié, ce qui rend "la logique euro-asiatique puissante, surtout si celle-ci permet de contourner l'Inde".

Si "Bruxelles est frileuse vis-à-vis de la Chine", Jean-Pierre Raffarin estime quant à lui que la seule vraie question face à la route de la soie est: "Peut-on s'y opposer en étant à l'extérieur? Non. Il nous faut nos règles, nos objectifs, nos entreprises dans ce projet." Il juge d'ailleurs que la France est bien placée, et donne pour preuves le récent voyage du président Macron en Chine, sans oublier certaines circonstances externes: "Le Royaume-Uni qui quitte l'Europe, une chancelière qui gagne mais qui ne peut pas gouverner, Barcelone qui veut quitter Espagne... Tout cela, la Chine ne le comprend pas, et par comparaison, la France paraît rénovée et stabilisée. Si on regarde à 30 ou 40 ans, on peut replacer l'Europe au centre de gravité des relations Asie/Afrique."

Le système bancaire chinois décrypté

Dans une interview accordée au Figaro le 23 janvier 2018, Julien Marcilly, économiste en chef de Coface, a particulièrement insisté sur le risque lié au secteur bancaire: "Au-delà des cinq plus grandes banques qui représentent seulement 40% du secteur, il y a tous ces établissements qui vivent sous perfusion du shadow banking (des produits non-inscrits au bilan) et financent des entreprises trop endettées pour avoir des crédits classiques. Tout le système repose sur l'épargne des ménages chinois qui jugent ces placements sûrs. Cela commence à inquiéter les autorités." Et de conclure qu'"un krach est possible, car le risque est plus diffus. Il peut y avoir un effet panique dans une région: les crises commencent souvent comme ça dans les émergents. Les surcapacités industrielles représentent aussi un risque important. Les autorités font face à un choix difficile: soit laisser la dette des entreprises filer avec le risque de panique à un moment, soit commencer à les réduire, mais cela entraînera des destructions d'emplois."

>> Éléments de culture chinoise, exports de capitaux... .

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