Recherche

Transformation digitale des directions financières: comment avancer ?

Pour avancer sur le sujet de leur transformation digitale et ainsi diminuer les tâches à faible valeur ajoutée, les directions financières vont devoir mettre en place des outils technologiques interopérables. Les Daf devront aussi être vigilant sur l'accompagnement de leurs équipes, principaux freins à cette digitalisation.

Publié par Florian Langlois le | Mis à jour le
Lecture
6 min
  • Imprimer
Transformation digitale des directions financières: comment avancer ?

Depuis la crise du Covid, les directions financières ont progressé sur le sujet de leur digitalisation. Pour une majorité d'entre elles, elles ne restent cependant que peu avancées sur le sujet et ont encore de grands projets à mener. « Sur la partie transactionnelle du métier, nous n'avons fait que peu de progrès finalement, reconnait Eric Gouy, Directeur Général adjoint Finances et Juridique chez Pierre Fabre, à l'occasion d'une table ronde organisée lors de l'événement Innovation for Finance. Nous avons certes mis en place de nouveaux ERP, des outils divers et variés mais il faut tout de même se dire que les choses n'ont pas beaucoup progressé. »

Moins de tâches répétitives et plus de pilotage

L'idée derrière cette transformation digitale serait de diminuer les tâches répétitives pour se concentrer davantage sur les missions à plus forte valeur ajoutée. « Il est urgent depuis plusieurs années de mettre derrière nous les sujets transactionnels qui sont moins porteurs de valeur, même s'ils revêtent d'un caractère obligatoire, pour se concentrer sur le pilotage et les activités à forte valeur ajoutée. Aujourd'hui, ces activités peuvent être digitalisées et automatisées par des solutions très matures existantes sur le marché, » indique Xavier Gardiès, associé June Partners.

Christophe Adam, product marketing manager chez Sage, complète en ajoutant qu'avec cette digitalisation, la data va prendre un rôle beaucoup plus important, facilitant le pilotage de l'entreprise. « Avec les différentes crises que nous avons traversées, le besoin de data en temps réel s'est accentué pour pouvoir prendre des décisions encore plus rapidement. Etant donné que tout change très rapidement, il faut que l'entreprise fasse preuve d'agilité grâce à des indicateurs qui, auparavant, n'étaient pas forcément mis en place. Les sociétés doivent désormais capter un maximum d'informations qui proviennent de l'extérieur pour pouvoir les intégrer à leurs propres KPI, ce qui permettra de prendre les bonnes décisions rapidement et au bon moment. » Une approche qu'approuve Eric Gouy. « C'est tout à fait ça, il faut associer des données de marché à nos propres données financières, ce qui va permettre d'agir sur l'avenir. »

Des outils interopérables

Pour que cette digitalisation de la fonction finance s'effectue efficacement, il est essentiel d'installer des solutions interopérables, qui communiquent entre elles. « Les directions financières sont plutôt dans une logique de composer autour d'un ERP coeur avec des solutions expertes en fonction de ses besoins. Il est nécessaire de bien faire communiquer ces systèmes. Pour ce faire, il faut réfléchir son architecture data, qui va permettre d'échanger les données et de piloter les données financières et extra-financières, » décrit Xavier Gardiès. Un point de vue partagé par Christophe Adam. « L'interopérabilité, c'est avant tout cette capacité de se connecter avec d'autres solutions métiers expertes qui vont apporter encore plus de valeur au-delà de ce que peut proposer simplement un ERP. Cette interopérabilité est aussi essentielle pour pouvoir connecter des outils à sa solution ERP, qui va rassembler, consolider toute la donnée et permettre de l'exploiter. Il faut des solutions expertes pour construire des budgets, pour parler de S&OP, tout un ensemble de solutions qui ne se sont pas forcément intégrées à l'ERP et qui vont devoir échanger en temps réel pour pouvoir accompagner les équipes financières. »

La plus grande résistance : l'humain

Instaurer ces outils ne sera toutefois pas efficace si les équipes ne sont pas formées à leur utilisation. « Nous avons par exemple mis en oeuvre un ERP, SAP, avec des montants colossaux d'investissement. Cet outil ne nous a pas apporté ce à quoi nous nous attendions, simplement parce que nous n'avons pas traité le sujet de l'organisation des processus et surtout des compétences en interne pour faire fonctionner ces outils, qui pourraient nous amener à améliorer notre performance. Les outils seuls ne servent à rien, » constate Eric Gouy.

L'humain est d'ailleurs l'élément le plus délicat à prendre en compte lors cette transformation digitale puisqu'il représente la plus grande source de résistance, comme l'explique le CFO de Pierre Fabre. « L'automatisation des activités transactionnelles supprime des emplois transactionnels pour aller vers de la valeur ajoutée, vers de l'analytique. Cette transition est très compliquée. Nous nous rendons compte à quel point la résistance interne est présente. »

Il est donc important de penser à l'évolution des compétences pour les collaborateurs. « Le problème c'est qu'il est difficile de faire adopter des nouvelles technologies ou de l'innovation lorsque des méthodes de travail sont ancrées dans l'entreprise. Pour instaurer ce changement, il faut des collaborateurs qui ont, nécessairement, une compétence financière pointue, il n'est pas possible de transiger sur l'expertise du chiffre dans la Daf. Mais il faut que ces salariés deviennent aussi maîtres de la data, des nouveaux systèmes d'information avec la capacité à réunir ces deux mondes. La compétence data au sein des équipes finance est essentielle pour réussir ces projets et apporter de la valeur, » complète Xavier Gardiès.

Des risques minimes

Avec la mise en place de toutes ses solutions digitales, se pose forcément la question de la sécurité de ces outils et des risques cyber qui en découlent. Cette problématique est pourtant loin d'être la principale préoccupation pour Xavier Gardiès. « Il faut bien évidemment mettre en place des solutions sécurisées, faire un audit des vulnérabilités et un plan de remédiation pour couvrir vos risques cyber que ce soit sur vos infrastructures ou les vulnérabilités des applications vis-à-vis de l'extérieur de vos systèmes. Mais le principal risque cyber aujourd'hui est le risque humain : c'est le phishing, la fraude au virement etc. Aujourd'hui, le meilleur moyen de se prémunir contre la cybersécurité est de former les employés et de les sensibiliser aux différents risques. »

Victime d'une cyberattaque massive en 2021 avec le groupe Fabre, Eric Gouy met, lui aussi, l'accent sur la prévention. « Le sujet le plus important est de savoir quoi faire lorsque l'on est attaqué et qu'ils ont réussir à rentrer dans nos systèmes et comment remédier à cette situation. Bien souvent, si les entreprises ne s'en remettent pas, c'est qu'elles n'avaient pas de plan de sauvegarde de l'entreprise. »

Une des solutions toute trouvée est de passer un maximum de données dans le Cloud. « Un des bénéfices du Cloud est d'être capable de dupliquer la donnée sur plusieurs sites. Lorsque la donnée va être attaquée sur un site en particulier, une redondance va exister ailleurs et on perdra que peu de temps de transaction sur son système, » développe Christophe Adam. Ce que confirme Eric Gouy : « tout ce qui n'a pas été touché durant cette attaque est tout ce qui était sur le Cloud, » conclut le CFO de Pierre Fabre.

S'abonner
au magazine
Retour haut de page