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DossierReprendre une entreprise à la barre du tribunal

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3 - Évaluer le potentiel d'une entreprise en ligne de mire

Certains candidats pensent faire une "bonne affaire" en reprenant une entreprise à la barre. Mais attention au montant des investissements nécessaires, voire aux conséquences susceptibles de gangrener votre propre activité ! Conseils pour faire le bon diagnostic.

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" Dans la vie des affaires, on a rarement l'occasion de se poser une question aussi cruciale : cette entreprise a-t-elle une raison d'exister ? ", observe Yahya Daraaoui, president managing director d'Alix Partners, cabinet-conseil en retournement d'entreprises. S'il est un bon moment pour se la poser, c'est bien lorsque la reprise d'une entreprise en redressement judiciaire est envisagée : la seule perspective de reprendre des actifs "à bon marché" ne doit en aucun cas l'occulter.

Mener à bien un tel projet commence par une analyse approfondie des difficultés ayant conduit au dépôt de bilan. La conjoncture économique a certes pesé lourd dans les défaillances d'entreprises depuis 2008. Mais, outre les causes conjoncturelles, des causes structurelles peuvent être à la source des difficultés : le dirigeant a-t-il fait de mauvais choix stratégiques ? A-t-il perdu un fournisseur ou un client-clé ? L'entreprise a-t-elle manqué un virage technologique ? Elle peut aussi avoir subi une rupture managériale, ou souffrir d'une organisation inefficace. Des zones d'ombre que seul un audit, dont les éléments chiffrés seront fournis par le Daf, pourra éclaircir.

Dresser un bilan économique et social

Les premières informations utiles au Daf pour mener son audit d'acquisition seront réunies sur les "data rooms" des administrateurs judiciaires. Consultables par les intéressés, sous réserve de la signature d'un accord de confidentialité, elles rassemblent l'ensemble des renseignements concernant l'activité de l'entreprise : clients, parts de marché, contrats, marques, licences, liste des immobilisations, comptes et informations sur les salariés... Autant d'éléments que le Daf scrutera d'un oeil attentif.

Toute la difficulté consiste, en effet, à travailler sur des comptes fiables : " Il peut arriver que la qualité des comptes soit médiocre. Quand l'entreprise va mal, il peut être tentant de surévaluer les stocks ou d'autres actifs pour améliorer artificiellement les résultats ", prévient Philippe Campos, fondateur du cabinet Afival Audit & Conseil, spécialiste des missions d'audit et de restructuration d'entreprises en difficulté. Ce professionnel recommande également d'écouter d'une oreille critique les raisons avancées par les dirigeants : " Soyez vigilant sur ce que le management en place veut vous vendre ", suggère-t-il.

Quant aux méthodes d'évaluation proprement dites, elles devront prendre en considération le contexte particulier : " Il est nécessaire, dans un premier temps, de se baser sur les comptes retraités d'après une rentabilité normative, déduction faite des coûts de restructuration ", explique Jean- Michel Vignaux, associé fondateur de Blue Cell Consulting, cabinet spécialisé dans les audits d'acquisition et l'évaluation de sociétés.

Enfin, dresser un bilan RH est aussi primordial. " Il faut savoir à quels contrats sont liés les salariés, de quelles conventions collectives ils dépendent et quel est leur statut individuel ", avertit Anne Guérin, directrice régionale Paris Oseo. Au-delà de ces aspects légaux, la reprise d'une entreprise en difficulté implique un volet humain essentiel. " Il est important de rassurer des salariés traumatisés par le dépôt de bilan et de les écouter, car ils détiennent des informations essentielles, tout à fait complémentaires de celles que délivre la direction ", analyse Michel Dubois-Coutant, président de Onsen Conseil, cabinet-conseil en stratégie et d'accompagnement des PME et membre du réseau APERE (Accompagnement des entrepreneurs et repreneurs d'entreprise).

Tous ces éléments permettront au repreneur de construire son "business plan" et de déterminer les besoins en cash afin de bâtir un plan de trésorerie prévisionnel.


Vanessa Bernard et Florence Klein

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