DossierInnovation : quelles responsabilités pour le Daf ?
5 - [Cas pratiques] Trois entreprises qui ont osé miser sur l'innovation
Mauna Kea, Sequans Communications et McPhy Energy. Le point commun de ces trois sociétés ? Avoir investi avec succès dans l'innovation. Ce qui leur a valu d'être primées lors des Trophées DAF Magazine 2013.
Mauna Kea Technologies décroche le financement d'Oséo pour son projet R&D
La société Mauna Kea a pour ambition d'apporter le microscope dans le patient. Depuis sa création, elle est soutenue par diverses aides à l'innovation d'Oséo (aujourd'hui Bpifrance). Et ce, dès 2002, avec la qualification "entreprise innovante", renouvelée en 2007, puis pour le développement de Cellvizio, un microscope ultra-miniaturisé qui apporte une vision cellulaire des tissus en temps réel afin de fournir un diagnostic pertinent, notamment en gastro-entérologie, pneumologie et cancérologie. Déjà approuvé en Europe et aux États-Unis, le Cellvizio dispose d'une autorisation de mise sur le marché dans plus de 40 pays.
Depuis son introduction en Bourse à l'été 2011, la société Mauna Kea ne cesse de voir son chiffre d'affaires exploser : ainsi, le chiffre d'affaires du troisième trimestre 2011 est en hausse de 62 % par rapport à la même période sur 2010. Sur un effectif global de 70 salariés, cette société, animée par une culture de l'innovation, compte 20 chercheurs. " Nous fonctionnons comme une start-up avec une hiérarchie horizontale, décrit François Lacombe, directeur scientifique de Mauna Kea Technologies. Nous plaçons l'individu au premier plan et travaillons toujours en mode collaboratif transdisciplinaire. Cette culture d'entreprise nous permet d'être en permanence dans une dynamique d'innovation. Nous déposons ainsi quatre à cinq brevets par an ! "
Retour sur la stratégie déployée par la société pour donner corps à son projet
Combinant l'usage de Cellvizio à des moyens robotisés, le programme Persée a pour objectif de fournir aux médecins, en 20 minutes environ, les informations nécessaires à la prise de décision sur la meilleure stratégie thérapeutique à adopter entre chirurgie, chimiothérapie ou radiothérapie pour les patients atteints de cancer.
Une fois cette nouvelle endomiscrocope mise au point, reste à trouver des solutions de robotisation et de financement pour mener à bien ce projet lourd et ambitieux. Or, la part importante de risque, le coût et la durée d'un tel projet interdisent à l'entreprise de se tourner vers ses investisseurs historiques, ou même vers les mécanismes classiques de subvention publique. D'où le recours à Oséo qui, depuis 2008, a mis en place le programme ISI (Innovation stratégique et industrielle) pour soutenir les PME et ETI qui se lancent dans des projets à finalité industrielle. Le montant des aides peut aller jusqu'à 10 millions d'euros. Mais cette aide n'est attribuée qu'aux projets collaboratifs, d'où la nécessité, pour Mauna Kea Technologies, de trouver un partenaire.
Pour son projet Persée, l'entreprise se rapproche donc d'Endocontrol, un développeur de solutions robotisées, afin de combiner l'endomicroscopie aux moyens robotisés. Ensemble, ils forment alors un consortium avec l'Institut des systèmes intelligents et de robotique de l'université Pierre et Marie Curie, l'Institut mutualiste Montsouris et l'Institut de cancérologie Gustave Roussy.
Présenter un business plan qui prévoit des retombées économiques crédibles
Avec des produits à haute valeur technologique déjà commercialisés qui ne cessent de dynamiser les ventes du groupe, Mauna Kea Technologie a la capacité de décrocher un financement d'Oséo pour son nouveau projet d'innovation. Cependant, une fois le projet d'innovation assis et les partenaires réunis, encore faut-il bâtir un business plan convaincant aux yeux du financeur public, à savoir un business plan aux prévisions commerciales ambitieuses avec, notamment, un débouché sur la création ou l'accélération d'une nouvelle filière ou de nouveaux marchés. Et la construction d'un business plan solide impose de recourir à l'intervention d'un professionnel du chiffre, ici le Daf. " En tant que directeur scientifique, le management du projet de l'innovation m'a été confié, mais le rôle du Daf a été déterminant pour calibrer le projet sur un plan comptable et évaluer les coûts ", reconnaît François Lacombe. " Mon rôle a essentiellement consisté à fiabiliser les chiffres déclarés ", précise Caroline Garnier, Daf de Mauna Kea Technologies.
Par ailleurs, un programme ISI requiert des délais importants. " Il nous a fallu neuf mois pour présenter le dossier de demande de financement. Puis nous avons attendu trois mois pour obtenir la réponse d'Oséo. L'accord de consortium avec nos partenaires a été finalisé quatre mois plus tard ", relève François Lacombe. Le projet Persée a obtenu le financement d'Oséo à hauteur de 7,6 millions d'euros sur six ans, avec une aide ISI accordée par tranche versée chaque année en fonction de l'état d'avancement du projet. Le reste du financement du projet, d'un montant total de 16,3 millions d'euros, provient des fonds propres de la société.
" Démarré en 2010, le projet abordera sa dernière étape en 2014 où nous devrions commencer à tester notre nouvel endomicroscope ", affirme le directeur scientifique de Mauna Kea Technologies.
Pour son introduction en Bourse en pleine crise, Mauna Kea a reçu le trophée d'or de la catégorie Accompagnement de l'innovation lors des trophées DAF Magazine 2013.
Repères
Raison sociale : Mauna Kea Technologies
Activité : imagerie médicale
Forme juridique : SAS
Dirigeant : Alexandre Loiseau
Effectif : 70 salariés
CA 2010 : 4,3 M€
Sequans Communications met le cap sur l'Amérique
Sequans Communications, trophée d'argent de la catégorie Accompagnement de l'innovation des Trophées DAF Magazine 2013, est la seule entreprise française à s'être introduite sur le marché boursier américain depuis dix ans. En 2011, le fournisseur de semi-conducteurs pour la 4G a levé 67 millions de dollars afin de financer ses innovations. " Les marchés européens n'étaient pas accessibles pour des sociétés technologiques comme la nôtre, témoigne la CFO Deborah Choate. De plus, les investisseurs et analystes étaient plus familiers avec notre secteur. "
La Daf a mené le processus d'introduction en Bourse en cinq mois et s'est conformée à son lot d'exigences : procédure de vote des actionnaires, respect de la loi Sarbanes-Oxley... Surtout, elle a déposé en juillet dernier une déclaration d'inscription préalable auprès de la SEC (Securities and Exchange Commission). Celle-ci lui permet de lever jusqu'à 50 millions de dollars sur le marché américain à tout moment jusqu'en juin 2015. De quoi regarder l'avenir avec sérénité.
Repères
Activité : Semi-conducteurs pour les téléphones mobiles 4G
Forme juridique : SA
Dirigeant : Georges Karam
Effectif 2012 : 209 salariés
CA 2011 : 67 M€
CA 2012 : NC
McPhy Energy : le cash, le cash, le cash
Pour une jeune société innovante comme McPhy Energy, trophée de bronze de la catégorie Accompagnement de l'innovation des Trophées DAF Magazine 2013, le plus dur est de convaincre les investisseurs qu'au-delà des pertes initiales se profile un avenir radieux... La mission du CFO Jean-Pascal Bost : trouver des financements publics. " Pour chaque projet innovant, j'anime l'élaboration du plan d'action qui identifie les jalons techniques et les étapes commerciales à franchir, avant de chercher des financements. " Mi-janvier 2013, le fonds Ecotechnologies, géré par CDC Entreprises pour le compte de l'État, s'est laissé séduire et a investi 5 millions d'euros.
Parallèlement, la Daf a instauré une "culture de lutte contre le temps" dans l'entreprise, focalisée sur les cashflows. " La Daf joue un rôle de garde-fou quand la R&D propose des projets trop éloignés du coeur de métier ou ne faisant pas progresser la valorisation de l'entreprise ", souligne Jean-Pascal Bost. Son maître-mot : la vigilance.
Repères
Activité : Équipements d'électrolyse et de stockage d'hydrogène sous forme solide
Forme juridique : SA
Dirigeant : Pascal Mauberger
Effectif 2012 : 50 salariés
CA 2012 : 3 M€