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Fin du LIBOR : il est temps d'en parler avec vos banquiers

A partir du 31 décembre 2021, le LIBOR commencera à disparaître au profit de taux dits sans risque. Un événement qui n'est pas sans conséquence sur certains contrats financiers. Il est temps de s'y pencher pour se mettre d'accord avec les banques.

Publié par Eve Mennesson le | Mis à jour le
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Fin du LIBOR : il est temps d'en parler avec vos banquiers

Le LIBOR a fait les frais d'un scandale de manipulation des taux de grande ampleur qui a coûté plusieurs milliards de dollars : il va être remplacé par des taux dits sans risque (RFR pour "risk free rates"), ne permettant plus aucune manipulation. Le taux LIBOR en livres sterling britanniques disparaîtra au 31 décembre 2021, au profit du SONIA, et sera suivi par le LIBOR en dollars américains, remplacé par le SOFR, ainsi que le LIBOR en francs suisses, détrôné par le SARON. "Il n'est par contre pas prévu que l'EURIBOR disparaisse : il perdurera sous un format un peu différent, hybride", précise Yann Beckers, avocat associé en financement au cabinet Stephenson Harwood.

Taux rétroactifs vs taux prospectifs

Cet événement n'est pas sans conséquence : les taux qui remplacent le LIBOR sont rétroactifs alors que le LIBOR est prospectif. "Auparavant, on savait le jour du tirage du financement à combien s'élèveraient les intérêts puisqu'on allait sur le marché regarder la cotation du LIBOR pour un emprunt à un, deux, trois mois ou plus. Désormais, le calcul se fera à partir de taux journaliers qui s'agrègeront tous les jours et on ne saura donc qu'à la fin de la période d'intérêt le taux applicable", décrit Yann Beckers.

Autrement dit, la méthodologie de calcul est grandement différente et les contrats financiers utilisant le LIBOR devront faire évoluer leurs clauses. "Deux méthodes de calcul sont possibles : soit on fait partir la période d'intérêt au jour où on tire le financement et on calcule tous les jours un taux journalier qu'on agrège en fin de période ; soit on fait partir le calcul des intérêts 5 jours avant la demande de financement et on stoppe le calcul 5 jours plus tôt afin de notifier le montant du taux avanat la fin de la période d'intérêt", explique Yann Beckers. Il semblerait que les banques anglaises et celles qui agissent sur le marché anglais préfèrent la seconde méthode.

Négociations autour de la méthodologie

Le problème c'est que les banques françaises ne sont pas tenues par les contraintes réglementaires qui s'appliquent aux banques anglaises : il n'existe aujourd'hui pas de loi ou de règlement européen qui notifie la disparition du LIBOR et exige l'utilisation du SONIA en remplacement. Pourtant, le LIBOR en livres sterling britanniques va bel et bien disparaître et ce taux est présent dans de nombreux contrats financiers : contrats de prêts, contrats dérivés, swap, contrats multi-devises, contrats de couverture de devises...

"La difficulté aujourd'hui est de contractualiser la nouvelle méthodologie de calcul du taux dans tous les contrats qui perdurent après le 31 décembre 2021. Comme il n'y a pas de support législatif, cela va se faire au cas par cas, contrat par contrat", avance Yann Beckers. Et, pour chaque contrat, il va falloir négocier une nouvelle méthodologie, sachant que les banques peuvent être tentées d'appliquer un spread, le taux au jour le jour étant moins élevé.

"Si les parties ne sont pas d'accord sur la nouvelle méthodologie à appliquer, le contrat peut être résilié", met en garde Yann Beckers.

Repérer les contrats qui contiennent du LIBOR

Il est donc temps de prendre rendez-vous avec ses banquiers pour parler de la fin du LIBOR et ne pas avoir à se mettre d'accord en urgence sur un taux à appliquer... au risque d'un désaccord qui mettrait fin au contrat. D'autant plus qu'il s'agit de repérer quels contrats contiennent du LIBOR et si ces derniers se prolongent au-delà de l'année 2021. Un vrai travail de titan !

Yann Beckers recommande également de faire passer l'EURIBOR à l'ESTER, taux qui utilise aussi une méthodologie au jour le jour, dans les contrats multidevises, dans un souci d'harmonisation. Les discussions avec les banques ne font donc que commencer.



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