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Loi Sapin 2 : un avantage concurrentiel pour les entreprises françaises ?

A l'occasion du Global Anticorruption & Compliance Summit qui s'est tenu le 8 avril 2022 à Paris, une table-ronde s'est penchée sur les impacts de la loi Sapin 2 pour les entreprises françaises et notamment vis-à-vis de leur place sur les marchés internationaux.

Publié par Eve Mennesson le - mis à jour à
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Loi Sapin 2 : un avantage concurrentiel pour les entreprises françaises ?

Cinq ans après la promulgation de la loi Sapin 2, il est temps de faire un bilan : c'est ce que se sont proposés de faire les différents intervenants de la table ronde « Anti-corruption : la loi Sapin 2 protège-t-elle suffisamment nos entreprises sur les marchés internationaux ? » lors du Global Anticorruption & Compliance Summit qui s'est tenu le 8 avril 2022 à Paris.

L'occasion de se demander si la loi Sapin 2 va assez loin alors que Transparency International place la France à la 22e place (sur 180) sur l'échelle de son indice de la corruption des responsables publics et que le rapport de l'OCDE du 16 décembre 2021 met en lumière le faible nombre d'enquête et de condamnation effective et définitive contre les pratiques de corruptions.

Crédibilité retrouvée

Pour Charles Duchaine, directeur de l'Agence française anticorruption (AFA), des progrès considérables ont été réalisés grâce à Sapin 2. Des progrès que Vincent Filhol, conseiller juridique dans la lutte contre la corruption au ministère de l'Europe et des Affaires étrangères, situe du côté de la crédibilité retrouvée de la France en matière de lutte anti-corruption.

« Pour Michel Sapin, cette loi avait pour objectif de placer la France au niveau des meilleurs standard internationaux afin d'éviter que les entreprises françaises soient ciblées par des autorités de poursuite étrangères comme ce fut le cas pour Alstom », rappelle Renaud Jaune, senior counsel chez Baker McKenzie. Ce qui semble avoir fonctionné : les entreprises françaises sont en effet moins poursuivies.

Catherine Delhaye, présidente du Cercle de la Compliance, pense quant à elle que la loi Sapin 2 a la vertu d'avoir permis aux entreprises de prendre en main ce sujet de la lutte contre la corruption. « Cela a aidé les entreprises à se mettre à niveau et à être davantage prêtes alors qu'on observe une convergence des lois anti-corruption », note-t-elle.

Attractivité des entreprises

Si l'objectif semble atteint vis à vis des autorités internationales, Patrick Lefas, président de Transparency International France, invite à étendre les efforts aux collectivités territoriales : « Les investisseurs internationaux jugent la corruption des organisations publiques plutôt que celle des entreprises privées », avance-t-il.

En effet, l'enjeu est également de rendre les entreprises françaises attractives sur les marchés internationaux. Philippe Coen, vice-président directeur juridique de The Walt Disney Company, met en garde contre des normes trop strictes. « Le mieux est parfois l'ennemi du bien. L'équilibre est complexe parce que, pour les entreprises, le but est aussi de conserver une attractivité suffisamment élevée pour attirer des investissements étrangers », explique-t-il, soulignant que la responsabilité du donneur d'ordre n'existe par exemple pas en Allemagne.

Une application plus efficiente

Renaud Jaune conseille donc d'observer les pratiques étrangères afin d'harmoniser les autres obligations en matière de compliance comme la lutte contre le blanchiment ou concernant les lanceurs d'alerte. « La protection des entreprises c'est aussi une administration de la conformité qui ne soit pas trop complexe », ajoute-t-il.

« En cinq ans, il n'y a eu que deux poursuites, nous ne nous sommes pas acharnés sur les sanctions, nous avons préférer inciter car la conformité suppose une adhésion », se défend Charles Duchaine. Il insiste également sur le fait que la France ne fait pas mieux que les autres pays mais aussi bien afin d'être saluée, considérée, par les entreprises étrangères sans pour autant rendre la loi illisible pour les entreprises.

S'il n'est alors pas souhaitable d'aller plus loin dans la sévérité de la loi, l'application peut être améliorée. « On demande instamment d'aller plus loin notamment concernant les moyens des enquêteurs anticorruption et du parquet national financier », indique Vincent Filhol. Renaud Jaune souhaiterait quant à lui davantage d'efficience, en associant par exemple les directions générales des entreprises. La loi Sapin 2 a donc atteint de nombreux objectifs en cinq ans mais peut encore mieux faire.

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