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Coface Risque Pays 2019 : où va l'Europe ?

En pleine zone de turbulences sur le plan intérieur, au milieu d'un jeu de go sino-américain sur le plan extérieur, l'Europe doit absolument trouver sa ligne de conduite si elle ne veut pas que ses entreprises y laissent trop de plumes.

Publié par Camille George le - mis à jour à
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Coface Risque Pays 2019 : où va l'Europe ?

"Cette planète, sauf la Chine qui vit en autarcie, ne peut pas fonctionner sans le système financier américain". Cette assertion, qui résonne telle une sentence, a été lâchée par Patrick Pouyané, dg de Total lors du dernier colloque Coface "Risque pays 2019". Mais justement, coincée entre la Chine et les États-Unis, où va l'Europe ? Difficile à dire tant les signaux sont contradictoires. Et d'ailleurs, le sait-elle elle-même ? Pour le moment, l'Europe semble figée au milieu du gué, incapable d'avancer dans une direction ou dans une autre. Sur fond de Brexit et de montée des partis populistes, la maison Europe vit des heures troublées.

"L'Europe a une certaine propension à laisser les chantiers inachevés, juge Pierre Sellal, ambassadeur de France, ancien représentant permanent de la France à l'UE et, actuellement, senior counsel au sein du cabinet August-Debouzy. Le marché intérieur existe et fonctionne, mais reste incomplet. Idem pour la zone euro, qui aurait besoin d'une politique ordonnée et d'union bancaire. Il devient urgent de terminer les travaux de cette grande maison." La question du modèle européen qui aurait besoin d'être dessiné, redessiné, affiné, selon les interlocuteurs, doit trouver réponse.

Capitalisme à l'européenne

Pour Jean-Dominique Senard, président de Michelin et depuis peu président de Renault, "Nous avons devant nous un modèle possible : il nous faut définir le capitalisme à l'européenne en regard du capitalisme à l'anglo-saxonne". L'idée développée par le patron de Michelin-Renault est d'aller vers un capitalisme responsable. "Il faut, bien sûr, faire appel aux profits, l'avenir de l'entreprise en dépend, mais on peut aller au-delà en prenant en compte l'impact social, où l'entreprise avec un grand 'E' a un rôle à jouer", insiste-t-il.

D'autant que les bases existent, à en croire Sylvie Goulard, sous-gouverneure de la Banque de France : "Un concept d'économie sociale de marché a déjà été proposé et quand l'UE se dote de la directive Reach, c'est aussi pour favoriser cette idée". D'après les experts, il suffirait donc de transformer l'essai. "Pour résister à l'hégémonie américaine, l'Europe doit se doter des mêmes outils, des mêmes armes que les États-Unis", estime Jean-Dominique Senard, qui prône un plus grand pragmatisme dans l'application des règles de concurrence.

Pour Pierre Sellal, il s'agit surtout d'un manque d'élan volontariste des politiques européennes, qui n'ont toujours pas résolu les questions de souveraineté et d'extraterritorialité engendrées par la création de l'UE. À l'image de la transformation qui s'opère au sein des entreprises, l'Europe doit changer de logique. "Il faut penser réciprocité en permanence et adopter une vision mondiale. Dans le monde, le rapport de force existe. L'Europe doit se doter de cette force politique, qui sera obligatoirement aussi une force économique", affirme Jean-Dominique Senard.

4 risques majeurs menacent la croissance mondiale en ce moment selon les analystes Coface :

- -Le risque politique, à l'image de ce qui se passe au Royaume-Uni, en Grèce, au Brésil mais aussi en Hongrie, Roumanie, Pologne ou encore au Venezuela. Le nombre de conflits politiques a ainsi été multiplié par deux.

- - La montée du protectionnisme . La confrontation, qui est tout sauf temporaire, entre la Chine et les États-Unis en est le triste reflet.

- - Le risque lié à l'innovation technologique, qui crée de nouveaux rapports de force entre entreprises et États, avec des enjeux stratégiques en ce qui concerne la transition énergétique, la mobilité urbaine ou encore les télécommunications et l'arrivée de la 5G notamment.

- - L'évolution de la dette mondiale, avec une augmentation du nombre d'entreprises "zombies" (entre 4 et 6 % des entreprises au global) et un risque d'impact de sortie brutale de capitaux dans les pays émergents (Brésil, Afrique du Sud et Inde), qui ont un niveau de dette externe important.

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