Didier Padellec (CHG Meridian) : « Je suis VP Finance, un Daf aux fonctions élargies »
Depuis près de 20 ans, Didier Padellec accompagne la croissance organique et externe d'ETI, en travaillant sur les processus et les systèmes pour renforcer la productivité et les outils de pilotage, tout en gérant les financements. VP Finance de la filiale française du groupe allemand CHG Meridian, il revient sur son parcours et les spécificités d'une gouvernance en duo avec son homologue, le VP Sales. Entretien.

Quel a été votre parcours avant de devenir Vice-Président Finance du groupe CHG Meridian ?
Didier Padellec : Je travaille depuis 25 ans dans la finance. J'ai débuté ma carrière en salle de marchés financiers, pendant cinq ans, en tant que trésorier pour une banque. Puis j'ai intégré le monde Corporate. J'ai été pendant onze ans le directeur de la trésorerie des financements d'une ETI qui faisait de la location. Ensuite je suis devenu Daf. C'était vraiment un objectif, je souhaitais évoluer rapidement vers des fonctions de directeur financier. J'ai travaillé quelques années dans une ETI du secteur agroalimentaire, puis j'ai été le directeur financier d'un groupe de transport.
Depuis cinq ans, je suis le VP Finance chez CHG Meridian France, un groupe allemand qui existe depuis 45 ans, présent dans 32 pays et dont près de 60 % du business se fait en dehors de l'Allemagne. La France est un des pays qui représente un portefeuille important dans le monde de la location.
Le groupe affiche une particularité dans sa gouvernance basée sur la règle des « 4 Eyes principle », la règle des « quatre yeux ». Ce qui veut dire une personne « fait » et une autre « contrôle ». En clair, la direction générale se répartit entre un VP Finance et un VP Sales. Il n'y a pas de CEO.
En quoi consiste cette gouvernance en binôme entre le VP Finance et VP Sales ?
D. P. : En général, le président joue un rôle d'arbitre unique dans l'entreprise. Il peut trancher sur certaines problématiques, parce que les enjeux financiers ne sont pas les mêmes que ceux des commerciaux. Dans notre cas, nous assurons ensemble la direction générale. Une de nos priorités est de bien s'entendre. C'est une alchimie qui, finalement, fonctionne très bien, et nous arrivons très souvent à la même conclusion sur de nombreux sujets.
Comment cela se traduit-il ?
D. P. : Il y a un certain nombre de choses qui relèvent du fonctionnement du groupe CHG. En fonction des enjeux, la décision ne va pas forcément se prendre au même niveau. Il y a des décisions qui vont être dans les mains du directeur commercial, et d'autres du directeur financier. Et certaines vont remonter encore au niveau du board et des actionnaires. Dans le quotidien, je m'occupe des sujets de mon périmètre direct, le juridique, les RH, la comptabilité, le contrôle de gestion, le financement, les opérations et les services généraux. Je suis un Daf aux fonctions élargies. D'autres sujets concernent le commerce, mais les règles de gestion du groupe font que je dois apporter ma validation sur certaines opérations.
En effet, le financier est là parfois pour freiner les dépenses des commerciaux. Comment faites-vous pour tomber d'accord ?
D. P. : Il n'est pas nécessaire que l'un de nous deux ait toujours le dernier mot, car en réalité on arrive très souvent à la même conclusion. Il y a beaucoup de sujets sur lesquels je ne m'implique pas, et d'autres sur lesquels lui ne s'implique pas non plus. Sur les sujets que nous partageons, parfois l'un prend le lead et l'autre est heureux de le laisser faire, et parfois c'est l'inverse. Ce qui fait un peu la magie de ce fonctionnement, c'est qu'il n'y a pas forcément besoin d'en discuter à l'avance pour savoir qui va s'en charger. Nous échangeons autant sur des sujets d'organisation commerciale que sur les équipes et le management. Il est absolument essentiel de travailler main dans la main.
Quelles sont les spécificités du modèle économique de la location chez CHG ?
D. P. : La grande particularité du modèle économique de la location de matériel est de privilégier l'usage plutôt que la propriété et d'éviter aux entreprises clientes de mobiliser du cash. Lorsque le matériel est acheté, cela engendre des coûts cachés, comme ceux de l'entretien et de la gestion de vie du matériel, qui sont difficiles à modéliser. Nous proposons un package assorti d'un certain nombre de services. Notre modèle intégré nous permet également de nous différencier, avec une usine en Allemagne qui reconditionne un million d'actifs par an. Nous avons un savoir-faire dans le reconditionnement et un réseau de partenaires pour développer nos services.
Le volet décarbonation doit être important. Comment la RSE est-elle gérée ?
D. P. : Le périmètre RSE est rattaché au service communication et géré au niveau du groupe. L'entreprise a comme business model, la circularité. Nous sommes assez avancés sur le volet RSE. En 2023 nous avons obtenu la certification Ecovadis Silver, puis le niveau Gold l'année suivante et nous venons d'être certifié Platinium en 2025. Un autre aspect de la RSE est le volet social. L'entreprise est certifiée « Great Place to Work », au niveau du groupe et de onze filiales y compris la France. Je suis très fier de travailler pour une entreprise certifiée ainsi.
Quels sont les enjeux de votre direction Finance ?
D. P. : Mon rôle de Daf de filiale est avant tout centré sur l'opérationnel, même s'il existe une part de stratégie, mais l'essentiel consiste à travailler au quotidien avec les collaborateurs et les responsables de départements. C'est donc un métier très ancré dans la pratique et la décision, dans un contexte de croissance, puisque le groupe CHG se développe à la fois en France et à l'international. Notre modèle vise à proposer des solutions adaptées aux clients, ce qui signifie qu'opérationnellement, le sur-mesure doit s'intégrer dans nos systèmes. Cela demande de retravailler nos process, notre mode de fonctionnement, mais aussi d'analyser les profils nécessaires dans nos équipes afin de s'adapter à ces méthodes. Nous commençons également à explorer l'IA.
Concernant l'IA, avez-vous identifié des cas d'usage à la finance ?
D. P. : A l'échelle locale, nous formons tous les collaborateurs à l'IA générative, car nous pensons qu'il s'agit d'un changement majeur dans notre manière de travailler et qu'il faut s'y préparer collectivement. Au niveau du groupe, de nombreuses démarches sont lancées autour de l'IA, avec des outils internes, des développements de use cases et des agents spécifiques créés pour certains besoins.
Pour l'instant, à la finance, nous n'avons pas encore de véritables cas d'usages qui seraient vraiment transformants, même si nous menons des essais sur les volets juridique et financier. En revanche, sur le sujet de l'automatisation, les avancées sont beaucoup plus nombreuses.
A mon sens, il faut distinguer l'automatisation des process de l'intelligence artificielle. Le groupe travaille depuis plusieurs années sur ce sujet, et la France fait partie des pays qui utilisent le plus ces outils. Je suis convaincu qu'il reste encore un potentiel important de développement pour que l'IA nous rende beaucoup plus performants chez CHG.
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