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Cap sur la croissance durable !

Les entreprises doivent dès maintenant se diriger vers une croissance plus durable. Ce défi va considérablement modifier le quotidien des entreprises, tout en étant source d'opportunités pour celles-ci. Le Daf a aussi un rôle clé à jouer dans cette transformation.

Publié par Florian Langlois le - mis à jour à
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Cap sur la croissance durable !

En avril dernier, les experts du Giec alertaient sur l'importance de réduire ses émissions de CO2 dans les trois prochaines années sous peine de faire face à un réchauffement climatique irréversible. Les entreprises ont un rôle extrêmement important à jouer dans ce changement climatique. Elles doivent ainsi se diriger vers une croissance plus verte, plus durable. Il est important de définir ce qu'est cette croissance durable. « En tant que société, il s'agit d'avoir de la croissance mais aussi d'être vertueux. Il faut alors avoir un cheminement tout en étant profitable pour continuer à investir dans des technologies ou dans des équipes. La difficulté est de trouver cet équilibre entre être de plus en plus vertueux tout en restant profitable, » détaille Bruno Vibert, CFO de Technip Energies, à l'occasion d'une table ronde lors de 100% Finance.

Du côté des banques, les attentes concernant cette croissance durable sont quelque peu différentes, comme l'explique Elena Burdykina, Executive Director Sustainable Banking chez CA CIB. « Pour nous, la croissance durable, c'est faire le lien entre ce que nos entreprises clientes portent comme stratégie de développement durable et les différentes attentes qu'elles peuvent rencontrer, soit des investisseurs, soit de nous-mêmes, partenaires bancaires. Nos clients nous aident également à nous projeter dans l'avenir et à construire notre trajectoire positive dans la croissance verte car ce sujet de croissance est très présent et nous voulons capter autant que possible toutes les tendances de marché autour de la question de la RSE. »

Des enjeux stratégiques majeurs

Ce défi de croissance durable est à préparer d'autant plus urgemment que certaines entreprises vont devoir réinventer leur approche au business. C'est par exemple le cas de Technip Energies comme l'indique Bruno Vibert. « Nous intervenons dans des domaines d'infrastructures pétrolières et gazières. La question est de savoir quelle sera notre place demain, avec les mutations énergétiques et le possible passage à l'hydrogène, l'électrique etc. La plus-value que l'on apporte aujourd'hui sera-t-elle toujours aussi pertinente demain ? Une autre interrogation porte sur les compétences de nos équipes, qui ne seront peut-être pas adaptées aux nouveaux enjeux. »

Christophe Adam, Product Marketing Manager chez Sage, observe de son côté trois enjeux stratégiques et opérationnels majeurs dans les retours faits par ses clients, majoritairement PME et ETI, au sujet de cette croissance durable. « Le premier est un enjeu en termes de pilotage, pour pouvoir maîtriser ses investissements et donc avoir une très bonne visibilité. Il y a aussi un sujet très important autour de l'humain. Il faut être capable de réduire le niveau d'effort des collaborateurs, cela passe par l'automatisation et par le partage de l'information afin de donner du sens à leurs jobs au quotidien, finalement de les responsabiliser. »

Sur la question des investissements, Elena Burdykina insiste sur l'importance de réaliser rapidement cette transition afin de pouvoir accéder à des financements dans les années futures, car les investisseurs et les banques seront de plus en plus sensibles à cette question. « Très clairement, on voit venir une réelle différence de perception par rapport aux profils RSE des sociétés. Ces profils jouent un rôle de plus en plus important pour les investisseurs et les banques. »

L'omniprésence du Daf

Pour intégrer ces enjeux et lancer cette démarche au sein de son entreprise, le Daf a évidemment un rôle très important. Il fait également face à de nouvelles problématiques. « Le Daf doit se reposer un tas de questions. Désormais, il doit se demander quel est l'impact des activités de son entreprise. Il fait aussi face à un nouveau défi, celui d'accepter ou de refuser de nouveaux contrats s'ils ne sont pas compatibles avec sa démarche RSE. En interne, on a mis en place des critères où on regardait les risques associés à certains projets et on intervenait que si ces risques étaient maitrisés. On a par exemple refusé des projets qui nous étaient profitables mais qui n'étaient pas compatibles avec notre roadmap et nos ambitions. Il faut alors définir quelle est sa compatibilité et quelle est sa roadmap, » analyse Bruno Vibert.

Le Daf a aussi un rôle très important à jouer concernant la data. « Un des rôles du Daf est désormais d'être gardien de la data et de s'assurer que l'ensemble des indicateurs sont pertinents. Son challenge à ce niveau-là est d'avoir suffisamment d'informations, d'être en mesure de capter cette information et de l'enrichir pour pouvoir mettre en place des démarches autour de la RSE. En résumé, un volume de données significatif permettra de prendre des décisions sur des sujets bien précis et de mieux piloter cette transformation, » complète Christophe Adam.

Un directeur financier qui devra travailler main dans la main avec le département RSE au sein de son entreprise, si celui-ci existe. « Il y a un réel besoin de travailler conjointement lors des structurations des produits de la finance durable. Mais même au-delà de cela, il est toujours plus simple de faire avancer nos idées et nos projets lorsqu'à l'intérieur de l'entreprise, il y a une vraie cohésion entre le Daf et le responsable RSE. Pour revenir à la question de la qualité de la data, cette notion est primordiale pour toutes les entreprises mais aussi extrêmement importante pour nous en tant que banque parce que c'est la base de notre analyse. Ce sont ces indicateurs qui servent à justifier le côté vertueux et les KPIs, » précise Elena Burdykina.

C'est à ce niveau-là, dans la compréhension des KPIs, que l'expertise technique du Daf et de ses équipes va être nécessaire. « Le CSRD, c'est à peu près 130 nouveaux KPIs qui ne sont aujourd'hui pas forcément homogènes en fonction des pays, des façons de calculer, des différents fournisseurs ... Le directeur financier qui avait l'habitude de consolider des données, de travailler avec certaines normes sera forcément partie intégrante de ces projets, » reprend Bruno Vibert.

La taxonomie, toujours flou

De façon à encadrer cette croissance durable, la taxonomie européenne est essentielle. « L'Europe est la seule région aujourd'hui qui a ce référentiel, défend Elena Burdykina. Il est certes imparfait, binaire, ce qui est sûrement son plus grand problème, mais il a le mérite d'exister. Et il aide beaucoup les entreprises sur les réflexions et les structurations de la finance durable. C'est aussi grâce à cela que l'Europe est en avance sur le monde entier sur cette question. »

Mais ce texte reste tout de même assez flou pour les entreprises. « C'est un projet qui est complet mais qui a certaines incohérences. Il est aussi important qu'il y ait un alignement des exigences. En plus de la CSRD en Europe, les Etats-Unis travaillent sur une nouvelle norme, la Chine et le Royaume-Uni également. Aujourd'hui, lorsque l'on intervient un peu partout dans le monde, il est impossible que chaque pays ait des normes différentes. Les banquiers, les investisseurs ou même les pour lesquels ces informations ont une vraie valeur ne peuvent aussi pas comparer les sociétés, » développe Bruno Vibert.

Le passage à une croissante plus verte est enfin source d'opportunités pour les entreprises, notamment concernant ces financements. « Des poches de liquidité sont dédiées aux entreprises ayant un comportement plus vertueux, qui mesurent et comprennent leur impact, » rapporte Elena Burdykina.

Une entreprise responsable sera également beaucoup plus à même de recruter facilement. « Aujourd'hui, si vous ne montrez pas une vraie ambition sur les critères ESG, il sera beaucoup plus compliqué d'attirer ou de retenir des talents. De plus, il y a de très grandes chances que vos salariés se retrouvent démotivés, » relate Bruno Vibert. Sur ce point, Christophe Adam est totalement en adéquation. « C'est effectivement très important de démontrer aux futurs collaborateurs que l'on a cet engagement. C'est pour cela qu'il est essentiel d'avoir des solutions qui intègrent cette capacité à embrasser cette transition et à mettre en place des actions très concrètes. »

Retrouvez la table ronde en intégralité en cliquant ici

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