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Libor : où en est-on huit mois après ?

Depuis janvier 2022, le Libor a été abandonné. Huit mois après ce changement majeur, enjeux et difficultés se posent aux directions financières à commencer par le recensement de l'ensemble des contrats de financement qui supportent les positions de ce taux interbancaire en livre sterling, le développement informatique et la coexistence sur le marché de plusieurs méthodes de calcul.

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Libor : où en est-on huit mois après ?

Le taux interbancaire Libor, référence mondiale devenue controversée après de nombreux scandales, n'est plus utilisable pour certaines devises depuis le 31 décembre 2021.

Le «London Interbank Offered Rate» a longtemps été un taux interbancaire de référence dans le monde de la finance, utilisé pour fixer le prix des contrats de prêts, de couverture de devises, des contrats multi-devises, des produits dérivés. Huit mois après ce chamboulement, où en est-on ?

Pour les directions financières, le premier casse-tête repose sur le recensement de l'ensemble des contrats de financement, de dérivés qui supportent les positions du Libor. « Il y a un travail juridique conséquent à réaliser avec les équipes trésorerie pour s'assurer que chacune des positions est identifiée, que la documentation contractuelle qui supporte les transactions est ajustée », explique Charles Sicaud, vice-président de la commission risques de l'AFTE et responsable front office dans une grande entreprise industrielle.

Changer de logiciel

L'autre gros enjeu passe par le développement informatique. Une difficulté pratique, qui nécessite de modifier le paramétrage du système, le changement des méthodes de calcul, puisqu'il faut désormais calculer les intérêts en fin de période. Le Libor était en effet déterminé en début de période d'intérêt, et payé à la fin. Les taux sont ainsi calculés au terme d'une période d'observation donnée, à partir des taux au jour le jour qui ont été effectivement observés, et non sur la base d'anticipations de ce que serait le niveau de ces taux. « Nous ne connaissons pas les taux d'intérêt à l'avance. Nous calculons donc les taux d'intérêt en fonction de la période précédente pour l'appliquer sur la suivante. Cette technique est limitée aux transactions intra-groupes car les banques ne l'acceptent pas, relate Charles Sicaud. L'enjeu est de savoir si le taux appliqué est un taux d'un marché ou s'il s'en éloigne ? »

Un flou autour des modalités de calcul d'intérêt

Sur la partie des contrats de dérivés, d'autres modalités de conversion ont été définies avec les banques. Depuis quelques années en effet, le marché se prépare à cette transition. Parmi les bonnes pratiques relevées par la Banque centrale européenne se trouve l'introduction, quasi-systématique depuis 2018, de clauses de repli (fallback) dans les contrats. Ces dernières prévoient, en cas de disparition de l'indice de référence utilisé dans le contrat, un mécanisme de substitution permettant de désigner un taux de remplacement. Six mois après l'abandon du Libor, il y a toutefois certaines disparités sur les modalités de transitions appliquées. « Les règles de base sur l'application du taux adoptées par le LMA (Loan Market Association) et l'International Swap Dealers Association (ISDA), l'une des plus importantes associations professionnelles dans la finance, ne sont pas les mêmes. Elles ont accouché de modalités de calcul d'intérêt qui diffèrent, avec parfois un décalage de quelques jours sur le taux SOFR, destiné à être utilisé pour les contrats dérivés », rapporte Charles Sicaud.

Le régulateur américain a par ailleurs construit ce nouvel indice par nature quotidien, qui contraint les directions financières à devoir produire des calculs de capitalisation pour déterminer les charges à payer en fin de période. « Nous évoluons dans un marché où le régulateur s'appuie sur le taux SOFR quotidien, qui permet de connaître le taux dès le début de la période. Mais les banques et financeurs proposent une alternative préfixée, le Term SOFR, ce qui apporte de la confusion et qui induit pour les trésoriers des coûts de liquidités supplémentaires pour gérer ces différents indices », conclut Charles Sicaud

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