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Trésorerie, comment atténuer les dommages de la crise

Avec la crise, beaucoup d'entreprises se sont tournées vers les habituelles techniques de chasse au gaspi, rabotant volontiers la masse salariale. Une solution mal adaptée sur du long terme. Pour s'en sortir, les directions financières doivent modifier l'organisation, dans la durée et sa globalité.

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Trésorerie, comment atténuer les dommages de la crise
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Le Covid-19 a pris tout le monde de court, y compris les entreprises, qui depuis le début de la crise gardent les yeux rivés sur la trésorerie. Evolution du besoin en fonds de roulement, lignes de financement disponibles, ajustement des investissements.... L'état du chiffre d'affaires est devenu l'obsession des entreprises. " Lorsque la crise est arrivée, la réponse immédiate des directions générales a été de prendre des mesures de préservation de trésorerie, des réductions massives d'investissements et des coupes dans toutes les dépenses de fonctionnement ", confie Maryse Lecutier, associée EY Consulting, responsable des activités des directions financières.

Un comportement qui ne semble toutefois pas adapté sur du long terme. " Après plusieurs mois post crise, nous constatons une volonté de transformation très forte dans les entreprises, avec des investissements très ciblés, tout en adoptant une gestion prudente et optimale de la trésorerie ", poursuit Maryse Lecutier.

La crise a révélé la nécessité de renforcer la culture cash à tous les niveaux de l'organisation et pas uniquement au sein de la direction financière. " Cette crise est différente de celle de 2008, car elle nécessite de gérer simultanément réactivité à court terme et reprise future. Cela implique de dégager des marges significatives et des gains de productivité afin de générer plus de cash et de réinvestir. Les directions financières doivent avoir une vision très holistique des transformations ", prévient Maryse Lecutier. En d'autres termes, elles doivent modifier l'organisation, dans sa globalité, dans la durée, de façon progressive et continue.

Chercher de nouveaux marchés

Une approche qui nécessite de mettre un plan d'action structuré et pragmatique. Evaluer ses produits, la solvabilité de ses clients, identifier ceux qui payent un peu moins bien afin d'assainir sa base, faire la même chose sur les stocks pour avoir une idée très précise de l'impact de la gestion des stocks sur son bilan. L'objectif ? Faire apparaître une nouvelle segmentation de produits, et de clients à développer. L

es directions administratives et financières doivent aussi songer à des sources de revenus différentes. Par exemple si une société fait principalement affaire avec des marchés internationaux, elle doit envisager de s'ouvrir à des marchés nationaux, surtout si les stocks sont périssables. Au lieu de réduire les coûts, il faut donc réinvestir le cash de manière ciblée pour des programmes de transformation, diversifier la composition des revenus à plus long terme, acquérir des produits complémentaires à une gamme existante et ainsi dégager des marges significatives. " La direction financière doit avoir un rôle différenciant, être très réactive et agile avec des solutions très court terme. Cela demande de récupérer des informations très rapidement et d'agir sur les conditions de paiement, le bon fonctionnement de la chaîne d'approvisionnement, la situation des clients et celle des fournisseurs ", renchérit Maryse Lecutier.

Se concentrer sur le cycle d'exploitation

Cette démarche doit ainsi être couplée avec une stratégie coordonnée qui tient compte de la dette fournisseur, des créances clients et des stocks afin de réduire au maximum le besoin en fonds de roulement. Dans la mesure du possible, discutez avec vos fournisseurs pour obtenir des délais de paiements plus longs. Attention toutefois à ne pas imposer unilatéralement ce prolongement du délai de paiement au risque de détériorer les relations, et de priver ces acteurs des liquidités dont ils ont besoin pour poursuivre leurs activités, maintenir des délais de livraison raisonnables et un service de qualité.

Autre levier à activer : " maintenir la pression au niveau des clients pour accélérer le remboursement des créances. Il est également possible de consentir des escomptes à ceux qui sont en mesure de payer plus rapidement ", préconise Philippe Sauveplane, Vice-Président du Conseil supérieur de l'ordre des experts-comptables. D'autres méthodes plus musclées mais aussi plus coûteuses comme l'affacturage, à savoir la mobilisation des créances clients par un organisme financier, peuvent rapidement améliorer le flux de trésorerie.

Optimiser la gestion des stocks

La gestion des stocks a une incidence directe sur l'immobilisation de capitaux et l'engagement de frais annexes comme le conditionnement des produits ou la mise à disposition d'un local. Il semble donc pertinent d'évaluer la pertinence de la méthode de réapprovisionnement et à revoir ses contrats avec les fournisseurs pour avoir une rotation satisfaisante du niveau de stocks. Initialement vécue comme une contrainte, la crise peut ainsi se transformer en opportunité pour transformer et réinventer le pilotage, la gestion des dépenses et du cash.

Zoom - Foncez vers les financements

Chômage partiel, chômage partiel longue durée pour certaines activités... Tant que les vannes sont ouvertes, il faut prendre en compte tout ce qu'il y a à sa disposition pour récupérer un maximum de liquidités et rester attentif à tous les dispositifs proposés par l'Etat pour atténuer le choc.

Autres leviers à utiliser : " les prêts garantis par l'Etat (PGE) qui mettent à disposition des entreprises de la trésorerie remboursable au bout d'un an, et sans doute prochainement au bout de deux ans, permettent de tenir en trésorerie en attendant de trouver des solutions pour rebondir. Ce dispositif pourrait être en partie utilisé pour l'investissement à condition qu'il ait pour vocation de financer des projets verts et/ou de production ", estime Philippe Sauveplane. Pour obtenir une bouffée d'air frais supplémentaire, les entreprises ont également la possibilité de solliciter un étalement du paiement de leurs impôts et de leurs cotisations sociales en se tournant vers la commission des chefs de services financiers (CCSF) qui peuvent accorder des délais de paiement aux entreprises. " Attention toutefois à anticiper ces démarches, et ne pas faire les choses au dernier moment quand la situation financière devient délicate au risque de se voir refuser ces dispositifs ", préconise Philippe Sauveplane.

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