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Les enjeux d'une gestion fiscale 2.0 en temps de crise

La fiscalité est aujourd'hui un sujet qui fait écho auprès de l'opinion publique. Mais la crise du Coronavirus a changé la donne et la méthode pour la gestion fiscale.

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Les enjeux d'une gestion fiscale 2.0 en temps de crise

Gouvernements, administrations fiscales, régulateurs directs ou indirects comme l'OCDE, souhaitent par exemple que les grands groupes communiquent un certain nombre d'informations concernant la répartition géographique de leurs profits ou de leur chiffre d'affaires.

Les données à fournir aux administrations fiscales, toujours plus précises et plus détaillées, sont à transmettre dans un laps de temps qui est, quant à lui, toujours plus court voire quasi instantané. Parallèlement, les observateurs sont avides de détails et de granularité dans les positions fiscales communiquées par les entreprises et alimentent régulièrement le débat public.

La crise liée au Coronavirus : révélateur d'une nécessaire digitalisation de la gestion fiscale

Certains outils technologiques se révèlent alors de mise pour gérer les sujets de conformité qu'elle soit fiscale (préparation des déclarations, télédéclaration, suivi des obligations, documentation prix de transfert, ...) ou financière (calcul des impôts différés, ...). Pour autant, leur utilisation reste encore marginale dans les groupes français, notamment car les enjeux évoqués sont traités pour la plupart par les équipes comptables et finances.

Les derniers mois écoulés dans un contexte de crise sanitaire et de télétravail généralisé, ont révélé la complexité pour gérer et partager en temps réel les informations chiffrées, les documents nécessaires à la conduite des activités et leurs analyses techniques.

L'enjeu de gestion des données chiffrées

Les entreprises ont été confrontées à une première difficulté majeure : récupérer les chiffres nécessaires au bon travail des fiscalistes (comptabilité locale, déclarations fiscales antérieures ou en cours, fichiers des années antérieures, fichiers partagés...). Fréquemment indisponibles en temps réel et de manière systématique, ces informations chiffrées se demandent traditionnellement par mail ou sont stockées dans des outils comme MS SharePoint. L'intervention humaine reste nécessaire à plusieurs titres et lorsque l'une des parties est empêchée la chaine ne peut fonctionner correctement. Ajoutons que le niveau de sécurité de ces modes de partage reste, quant à lui, très faible.

Si les entreprises se heurtent à ces obstacles, c'est notamment car elles n'ont pas encore intégré la fiscalité dans l'évolution de leurs systèmes comptables et de leurs outils informatiques pour assurer la prise en compte de leurs besoins. De même, elles ne donnent pas encore accès aux fiscalistes, comme aux autres départements des services financiers, à des outils modernes qui leur permettent de travailler dans des conditions optimales.

Pour faire face à ces défis, les éditeurs développent depuis plusieurs années des systèmes intégrés qui apportent confort de travail et performance. Estimables en période de croisière, ils sont inestimables et indispensables en période de tempête et permettent également une meilleure gestion des risques fiscaux, techniques mais surtout opérationnels.


L'enjeu de gestion documentaire

La gestion documentaire est un autre domaine où des outils technologiques performants existent et sont encore trop souvent sous-exploités. Déclarations fiscales, avis de paiement, notes techniques, analyses externes, sont autant de documents nécessaires à la gestion fiscale d'un groupe. Si le classement physique de ces documents apparaît aujourd'hui suranné, il subsiste néanmoins dans beaucoup de juridictions et le classement digital reste fortement décentralisé. Pourtant, la mise en commun systématique et la sécurisation des documents à l'aide de droits d'accès spécifiques peuvent être mis en oeuvre aisément et permettent un gain de temps conséquent. Construire une data room électronique, par exemple, devrait être l'affaire de quelques clics mais demande encore trop de temps aux professionnels. Il en est ainsi du besoin de tous documents, hors ceux produits localement.

L'enjeu des analyses de données

Disposer en temps réel des données chiffrées et des documents utiles soulève la question de leur pertinence et de leur utilisation. Ce qui ne sert jamais doit-il continuer à être produit et archivé ? Ce qui est produit et archivé peut-il rester inutilisé ?

Les réponses à ces deux questions semblent évidentes mais leur traduction pratique reste marginale alors qu'il est maintenant possible de traiter toutes ces informations de façon positive. Par exemple, il est possible de mieux gérer le cash-flow impôt en ayant le détail en temps réel de tous les prélèvements supportés par l'entreprise à travers le monde. Ceci permet par exemple de comparer les variations multi-périodes, de rattacher ces paiements aux bases qui les induisent et d'analyser les incohérences.

De même, l'utilisation d'outils adaptés concentre le temps disponible là où le besoin est le plus grand. Ainsi, suivre l'historique des risques connus dans chaque entité, les conclusions des contrôles ou contentieux et in fine les décaissements opérés permet d'avoir une lecture claire des enjeux fiscaux, techniques et humains dans les différentes entités. Des écarts importants entre l'anticipation des risques et les décaissements finalement supportés montrent les points d'attention où un support est nécessaire.

Enfin, les outils digitaux permettent de simuler les analyses sur des périodes différentes avec des données variables ou prévisionnelles, ce qui se révèle être le meilleur moyen de pouvoir gérer les réformes fiscales à venir, que ce soit dans n'importe quel pays du globe. Grâce à eux, les entreprises peuvent identifier, par exemple, les conséquences budgétaires de la crise sanitaire.

Anticiper ou subir s'avèrent être les deux options qui s'offrent aux entreprises et à leurs équipes fiscales. En effet, mesurer les enjeux fiscaux de leur trésorerie, simuler les impacts sur le taux effectif des changement fonctionnels ou techniques ou encore définir une tendance fiscale à moyen terme, sont autant d'exemples qui définiront la performance de la gestion fiscale interne des entreprises. La digitalisation et l'usage quotidien d'outils spécifiques se révèlent inéluctable ! S'il y a bien une leçon à tirer des quatre derniers mois, c'est qu'il est urgent de prendre le tournant de la digitalisation fiscale !

Pour en savoir plus

Thierry Morgant est avocat associé au sein du cabinet d'avocats Deloitte | Taj . Il conseille les grandes entreprises françaises et étrangères dans la gestion de leur taux effectif d'impôt et la digitalisation de leur gestion fiscale.



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