Futures réglementations RSE : vers plus de transparence
Les réglementations RSE semblent s'empiler, imposant sans cesse aux entreprises de nouvelles obligations. Pour aider les sociétés à s'y retrouver, le cabinet CMS Francis Lefebvre Avocats, Smart Global Governance et la société Altares ont consacré un webinaire aux lois et réglementations RSE en France et en Europe. De quoi se préparer et anticiper.
C'est parti pour la CSRD ! En effet, la NFRD ( pour non-financial reporting directive) qui encadre aujourd'hui les déclarations de performance extra-financières (DPEF) a été remplacée par la CSRD (pour corporate sustainability reporting directive). Cette nouvelle directive, qui a pour objectif d'harmoniser les reportings de durabilité des entreprises au niveau européen mais aussi d'améliorer les disponibilités des données, va s'appliquer progressivement dès le 1er janvier 2024. « Il faut s'y préparer car le 1er janvier 2024 c'est demain. De plus, c'est un sujet complexe qui va demander du temps pour s'y conformer », a avertit Véronique Bruneau Bayard, avocate chez CMS Francis Lefebvre, à l'occasion d'un webinaire CMS Francis Lefebvre-Smart Global Governance-Altares sur le sujet des réglementations RSE à venir.
Cinq facteurs clés environnementaux
Qu'est-ce que cela va impliquer au niveau des entreprises ? D'un point de vue environnemental, tout d'abord, la CSRD va plus loin que la NFRD : non seulement les entreprises doivent rendre compte de la manière dont leur modèle d'entreprise influe sur la durabilité (comme l'exigeait la NFRD) mais aussi de la manière dont les facteurs externes influent sur leur activité. « L'objectif est de donner aux investisseurs une idée claire sur le niveau de durabilité d'un actif », a indiqué Céline Cloché Dubois, avocate au sein de CMS Francis Lefebvre.
Plus précisément, cinq facteurs clés vont guider la rédaction des rapports de gestion : le changement climatique et la limitation des gaz à effet de serre, le ressources aquatiques et marines, l'utilisation des ressources et l'économie circulaire, la pollution et enfin la biodiversité. Des facteurs très larges qui vont faire l'objet de normes ESRS, pour european sustainability reporting standards, qui seront publiées le 30 juin 2023 : « Ces nomes préciseront les informations qui devront figurer dans le rapport, aussi bien au niveau environnemental que social. De nouvelles normes devraient être publiées le 30 juin 2024 », a précisé Céline Cloché Dubois. De quoi éviter le greenwashing, d'autant plus que les rapports de gestion devront être vérifiés, soit par un commissaire aux comptes, soit par un organisme tiers indépendant (OIT).
Les entreprises devront donc mener une analyse autour de ces normes dans une perspective de double matérialité (impacts l'environnement sur l'entreprise et impacts de l'entreprise sur l'environnement) en réalisant à chaque fois un état des lieux suivi des mesures mises en place et des effets de ces mesures. « Tout ceci est guidé par la transparence et l'accessibilité de l'information : cela permet non seulement d'activer le droit d'alerte environnemental pour le CSE, le cas échéant, mais aussi de répondre aux soucis des utilisateurs en termes d'implication des entreprises en matière climatique », a souligné Céline Cloché Dubois. Ces derniers sont en effet à la recherche d'informations fiables.
Au niveau social, à combiner avec les autres dispositions
Côté social, ce sont trois grands thèmes qui vont guider la rédaction des rapports de gestion : l'égalité des chances, les conditions de travail et le respect des droits de l'homme. Là aussi, les normes ESRS vont préciser en juin ce qui est attendu.
Caroline Froger Michon, avocate chez CMS Francis Lefebvre, a surtout insisté sur les autres dispositions avec lesquelles le CSRD devra être combiné : la BDESE (base de données économiques, sociales et environnementales), les droits et obligations des représentants du personnel (notamment via le CSE), la cartographie des risques et le rapport de gestion (qui doit être désormais public et digital pour facilité l'accès à l'information). « Il faut que les informations soient cohérentes d'un document à l'autre mais aussi avoir bien à l'esprit que la directive va conduire à la transparence et à l'accessibilité de l'information, ce qui va rendre certaines attribution du CSE plus effectives, comme le droit d'alerte environnemental », a-t-elle mis en avant. A anticiper, donc.
Vers la directive CSDD ?
Ce mouvement initié par la CSRD d'une information plus transparente et plus accessible va se poursuivre avec une nouvelle directive, la CSDD (corporate sustainability due diligence). Encore seulement à l'état de projet, elle a pour objectif de rendre les entreprises responsables tout au long de la chaîne d'activité. Cette directive devrait donc renforcer le devoir de vigilance qui, en France, oblige les entreprises à prévenir les risques sociaux, environnementaux et de gouvernance liés a leurs opérations mais également aux activités de leurs filiales et de leurs partenaires sous-traitants et fournisseurs.
La CSDD prévoie six actions : intégrer le devoir de vigilance dans les politiques et systèmes de gestion des risques (notamment via la rédaction d'un code de conduite interne à l'entreprise), recenser les incidences négatives réelles ou potentielles de leurs activités, prévenir et atténuer les incidences négatives potentielles et mettre un terme aux incidences négatives réelles et en atténuer l'ampleur, mettre en place une procédure d'alerte relative aux plaintes, contrôler l'efficacité de la politique et des mesures de vigilance et enfin communiquer publiquement sur le devoir de vigilance. « Un peu comme pour la loi Rixain, on devra communiquer demain sur ce que l'on fait en matière de vigilance, quelles actions proactives ont été menées en matière de droits humains et de protection de l'environnement », a résumé Caroline Froger Michon.
Face à ces nouvelles directives qui apparaissent sans cesse, l'avocate se questionne sur la façon dont le législateur va articuler ces nouvelles réglementations avec celles qui existent déjà : « Il serait bien qu'un toilettage ait lieu afin de ne pas multiplier les reportings nationaux et européens », a-t-elle supputé. Espérons en effet que les réglementations ne vont pas s'empiler tel des millefeuilles, obligeant les entreprises à répondre à des dispositions réglementaires plutôt que de relever concrètement les défis sociaux et environnementaux actuels.
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