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Les directeurs administratifs et financiers et la croissance externe : Diam Bouchage, Deleplanque, Rians, Kenzo...

Identification de la cible, connaissance des équipes, gestion des différences culturelles, vigilance sur le timing et le financement: autant de sujets évoqués par les Daf faisant part de leurs retours d'expérience sur la croissance externe, lors d'une table ronde organisée par Daf Magazine.

Publié par Bénédicte Gouttebroze le | Mis à jour le
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Les directeurs administratifs et financiers et la croissance externe : Diam Bouchage, Deleplanque, Rians, Kenzo...

À l'occasion de la 4e édition des Trophées Daf Magazine, la rédaction a organisé deux tables rondes réunissant Daf et experts du secteur financiers, pour un moment d'échanges et de retours d'expérience.

Ce premier moment de réflexion était consacré à la croissance externe de l'entreprise, et au rôle de plus en plus transverse du Daf dans ce type d'opérations. Timing délicat à respecter tout en prévoyant le financement, différences culturelles, identification des acteurs-clés, communication... Autant de problématiques que le CFO doit appréhender lorsque son organisation entreprend une acquisition.

En amont: identifier la cible et ses membres-clés

Avant même de s'interroger sur le "comment", il convient de se pencher sur le "pourquoi". "Une acquisition doit avant tout rentrer dans une stratégie, insiste Sylvie Forero, Daf des Laiteries H. Triballat (marque rians). Dans notre secteur d'activité, l'alimentaire, il peut s'agir de développer sa part de marché, de gagner des canaux de distribution, ou encore de se développer à l'étranger." Une fois l'intérêt de l'acquisition validé, la responsable financière réunit un comité de pilotage restreint, regroupant la DG, la vente, la finance, la partie industrielle et les RH, qui se met en situation de simulation: "Si on acquiert cette cible, quelles sont les projections? Mon rôle de financière, c'est de mettre tout ça en musique pour produire un business plan." Cette analyse permet à l'équipe d'attribuer une note à la cible, en fonction de laquelle l'opération se fera ou non. Une méthode qui permet aux équipes d'appréhender sereinement les opérations de croissance externe.

Car les Daf l'ont régulièrement rappelé au cours de cette table ronde: dans une démarche de croissance externe, le facteur humain est primordial. François Rey, Daf de Diam Bouchage, a déjà connu la position de vendeur dans son précédent poste chez Onedirect et expérimente aujourd'hui celle d'acheteur, avec l'acquisition de Piedade, qui représente près de 40% du CA de Diam Bouchage. Pour lui, "la qualité de l'équipe mise en place pour conduire le deal, ainsi que la connaissance de la cible et des membres de ses équipes" constituent les clés de la réussite d'une opération de croissance externe. Bertrand Vacher, Daf de Kenzo habitué aux joint venture, insiste pour sa part sur la nécessité d'être "très vigilant dans le choix de ses partenaires. Lorsqu'on est en ETI, le choix des personnes est extrêmement important".

Autre aspect à approfondir en amont de l'opération et à intégrer dans le timing: le financement. "Il faut faire attention à ne pas embarquer trop tard le banquier", alerte Frédéric Rochoux, responsable du développement commercial de BNP Paribas. Tout en conservant la confidentialité des données inhérente à une démarche d'acquisition, il est important d'impliquer en amont le partenaire bancaire afin d'étudier les différentes hypothèses envisageables, de manière à être prêt à apporter la réponse adaptée le moment venu. Géraud Billaudel, directeur commercial de BNP Paribas Factor, va plus loin en évoquant les risques liés au financement d'exploitation: "Il faut anticiper les besoins de trésorerie lors d'une opération de croissance externe, surtout si le projet implique d'importants développements."

À lire en : différences culturelles, communication, rôle du Daf...

Adapter sa stratégie de communication selon les secteurs et les pays

Selon les secteurs d'activité, la communication et les méthodes de travail diffèrent fortement. Ainsi, François de Romémont, Daf de Deleplanque & Cie, entreprise familiale spécialisée dans les semences agricoles, exerce dans un domaine où "les temps sont très longs. Il faut donc s'armer de patience". Tout le contraire du secteur du luxe, dans lequel Bertrand Vacher (Kenzo), pour gagner en réactivité, a souvent recours à la joint venture "comme accélérateur de développement, dans un secteur où les temps sont très courts". Les demandes et attentes des interlocuteurs seront également très variables d'un secteur à l'autre, et le CFO devra faire preuve de souplesse. Ainsi, François de Romémont a été confronté à des demandes atypiques de la part de certains cédants, telles que le paiement d'une partie du prix d'acquisition en semences gratuites, ou même... un quad!

Dans une transaction à l'international, les différences culturelles peuvent également déstabiliser les équipes. Sylvie Forero (Laiteries H. Triballat) a orchestré, fin 2013, la cession d'une entreprise de son groupe en Argentine. Un véritable choc culturel dans les méthodes de travail: "En Argentine, rien n'est prévisible, tout peut se produire à tout moment." Mettre en place un planning? Impensable, pour ses interlocuteurs argentins. Il a fallu à l'équipe de la Daf beaucoup de patience et d'attention pour comprendre comment travailler. Au bout du compte, la signature de l'affaire avec les avocats, commencée à midi, s'est terminée à 2 heures du matin, les Argentins se félicitant de la rapidité de traitement! "À l'opposé, lorsque nous avons des deals avec les États-Unis, tout est préparé, chronométré et réglé en une heure!" Des différences culturelles à anticiper lorsqu'on entame une opération de cession ou d'acquisition à l'étranger.

Bertrand Vacher (Kenzo) a connu pour sa part des déconvenues en Inde, avec un avocat peu scrupuleux jouant de toutes les finesses des lois locales pour nuire à ses clients: "Il faut être extrêmement proche de son partenaire et détecter au plus tôt les signes d'anomalies", alerte-t-il, surtout lorsqu'on s'aventure dans un pays dont l'écosystème est très éloigné de nos habitudes de travail.

Le rôle du Daf dans l'opération de croissance externe

La prudence, c'est bien la première des qualités du Daf dans une opération de croissance externe. Dans l'évaluation de la cible, tout d'abord, mais également dans la préparation du dossier en amont. "Beaucoup de choses se jouent avant la signature, rappelle Bertrand Vacher (Kenzo). Il faut utiliser ce temps pour envisager tous les scénarios possibles et prévoir le pire, car c'est un excellent moyen de connaître son partenaire." Et cela évite bien sûr d'être pris au dépourvu et d'effectuer de mauvais choix dans le feu des négociations.

Car ces dernières peuvent être très longues, et François Rey (Diam Bouchage) met en garde ses pairs sur la résistance physique nécessaire pour mener à bien une opération d'acquisition. "Le directeur financier doit assurer des sessions de négociations nocturnes prolongées, avec des avocats qui, eux, sont rompus à cet exercice. Le risque est de baisser en vigilance et de laisser passer des clauses que l'on regrettera", avertit ce Daf habitué aux épreuves sportives. Un marathon de négociation auquel le Daf doit se préparer, à l'instar des sportifs de haut niveau!

Découvrir l'intégralité de la table ronde en vidéo:



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