Frais professionnel : 4 leviers au service de la performance de l'entreprise
1) Déplacement long et séminaires
Dans les SSII notamment, les consultants partent fréquemment en mission de longue durée et ils font passer leur repas en note de frais. Or, pour l'Ursaff, il n'y a pas de frais professionnel puisqu'il n'y a pas de déplacement, mais un lieu d'exercice habituel du travail compte tenu de la durée de la mission. Cependant, " la circulaire du 19 août 2005 ne pose pas de limite de durée au delà de laquelle cela devient un lieu habituel de travail, relève Alice Fages, directeur des affaires sociales du Conseil supérieur de l'Ordre des experts-comptables . Ce texte peut donc être opposé à l'inspecteur. "
Dans la même logique, bon nombre d'entreprises organisent pour leurs cadres des voyages dits de stimulation (au doux nom de séminaire) mais qui ne sont, bien souvent, que de détente. Ces voyages sont réintégrables dans l'assiette des cotisations... sauf s'il existe un programme de travail et si ce voyage est obligatoire pour le salarié.
2) Téléphone, ordinateur, voiture
Souvent le paramètre "usage personne" est négligé. Une erreur car : " Si l'appareil est mis à la disposition totale du salarié, soirées et week-ends compris, celui-ci doit alors être qualifié d'avantage en nature et être traité comme tel", selon Maître Kim Campion, avocat associé du Cabinet Courtois Lebel. Il en est de même pour les ordinateurs portables. D'ailleurs, " en cas de départ du salarié, l'ordinateur ou le téléphone, s'il n'est pas considéré par l'entreprise comme un avantage en nature, devrait être restitué en cas de dispense de préavis ", poursuit l'avocat. À défaut, cela pourrait éveiller les soupçons de l'Ursaff même si, pour l'heure, une vraie tolérance règne (sauf pour les entreprises de téléphonie mobile).
De même, il n'est pas rare que certains se voient allouer des voitures qui, in fine, au regard de la répartition des kilométrages, servent plus à un usage personnel que professionnel (cas du dirigeant qui habite tout près du bureau); voire qui servent à une tierce personne (conjoint, enfant...). Une pratique risquée et pas si difficile que ça à débusquer selon les experts interrogés.
3) Les frais professionnels ne doivent pas figurer dans le contrat de travail
" Préférer les chartes informatiques pour régir les conditions d'utilisation des ordinateurs portables ou des téléphones ou bien les engagements unilatéraux de l'entreprise au travers notamment de notes de service pour d'autres biens, services ou remboursements, est un procédé qui permet à l'entreprise de conserver une marge de manoeuvre quant à sa politique de remboursement " conseille Maître Amandine Bouée (Cabinet Courtois Lebel).
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Et, à tout le moins, s'il vous apparait impératif de les faire figurer dans un contrat de travail, notamment pour que le plafonnement soit contractualisé, veillez à ne pas être trop précis. Ainsi, " mentionner la marque du véhicule, le modèle ou la puissance fiscale est une aberration. Car si l'entreprise souhaite changer la donne, elle s'expose au refus du salarié ", souligne Alice Fages.
4) Une politique en matière de frais professionnels ? Oui, si
" Cela sert la transparence au sein de la structure et permet à l'entreprise de ne rembourser que ce qui répond aux conditions posées ", résume Maitre Bouée. Avec une réserve toutefois : respecter la rémunération minimale au regard des conventions collectives. Or, l'entreprise peut avoir tendance à fixer des plafonnements aux remboursements bien trop stricts : " Elle s'expose, si le salarié pour les besoins de sa mission a engagé des frais dépassant le plafond, et donc non remboursés, à une contestation du salarié si celui-ci perçoit au final moins que la rémunération minimale conventionnelle " prévient Alice Fages.
" Avoir une approche par fonction et par niveau hiérarchique pour instaurer des limitations est une bonne chose, mais en veillant à ne pas tomber dans la discrimination " précise , pour sa part, Maître Campion.
Trois critères majeurs sont à retenir pour définir une politique de frais professionnels : avoir des plafonnements équilibrés, définir un délai de remise des notes de frais et leur procédure de validation.
Le cas du remboursement partiel des frais de repas et la déduction de TVA
En avril 2013, le Conseil d'État rendait une décision remettant en cause la possibilité de déduire la TVA sur des frais de repas dans une entreprise qui ne remboursait ceux-ci que partiellement. Quelle est la portée de cette décision ? Relative, selon Romain Pichot, avocat fiscaliste (Cabinet Courtois Lebel) : " Elle ne remet pas en cause la pratique qui s'appuie sur la doctrine administrative selon laquelle jusqu'à 150 euros par dépense, la TVA peut être déduite même à défaut de factures établies au nom de l'entreprise ; au-delà des 150 euros, il faudra faire établir une facture au nom de l'entreprise. " Conseil d'État, 10ème et 9ème sous-sections réunies, 17 avril 2013, n° 334423.
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