[Chronique techno] Episode 2 : Libra, potentiellement révolutionnaire !
Facebook, la firme aux 2,5 milliards de clients et détentrice de Whats'app, Instagram et de 51 autres sociétés, vient de promettre qu'elle allait " crypto-battre " monnaie.
Libra, c'est son nom, sera donc une monnaie qui s'appuiera sur une blockchain (voir l'Episode 1 de la Chronique techno). Le tout sera hébergé dans une filiale nommée Calibra et reposera sur un langage informatique appelé Move. L'ensemble est confié à David Marcus, ancien directeur de Paypal. Libra sera pilotée par une association basée à Genève et co-gérée par une petite trentaine d'entreprises dont Visa, Mastercard, Uber... chacune de ces entreprises ayant mis sur la table 10 millions de dollars pour contrôler un noeud de la blockchain (de consortium) sur laquelle est bâtie Libra.
A noter qu'aucune banque ne figure au tour de table !
Petit calcul, cette monnaie s'appuie donc sur des réserves de plus de 300 millions de dollars avec un objectif de 1 milliard pour la fin de l'année 2019.
Le choix de Genève et de l'association sont clairement destinés à créer de la confiance dans le nouveau monde de la crypto-finance, qui rappelons-le, souffre pour l'instant de suspicion face à ce qui le caractérise : décentralisation, autonomie, gouvernance.
Par ailleurs, Libra sera adossée à un panier de monnaies fiat, parmi lesquelles le dollar, bien sûr, l'euro ou encore la livre sterling, avec la promesse d'une parité à un pour un. A partir du moment où un libra est émis, un élément du " panier de stabilité " est acheté. Une bonne idée pour éviter la spéculation que le bitcoin a connue.
Quels sont les objectifs ?
Calibra devrait proposer des services financiers, notamment un porte-monnaie électronique sur iOS et Android et sera également intégrée à Messenger et WhatsApp. Les utilisateurs achèteront des libras sur des plateformes d'échange et pourront les envoyer à des amis ou payer sur l'Internet.
Le marché est potentiellement énorme. L'euro, c'est 512 millions d'utilisateurs, le dollar, 325 millions, le yuan 1,4 milliards... et Facebook 2,3 milliards. On est donc en passe de voir la naissance d'une " monnaie " utilisable sans change par la plus large partie de la planète... Il est également envisagé que, demain, les commerces acceptent les libras.
Et demain ?
Tout est possible. Émettre de l'argent, était la prérogative d'un Etat. Sa gestion, celui d'une banque. Libra réunit les deux en une. Dès lors on peut imaginer que les services d'une banque : prêt immobilier, assurance, carte de crédit... soient un jour disponibles via Libra. Autant de services pour les particuliers, certes, mais aussi pour les entreprises. Et j'entends par là, non seulement la boulangerie de quartier qui acceptera les libras, mais aussi les grandes entreprises BtoB.
Cela pose question en termes de fiscalité et de contrôle. Si on pousse la logique jusqu'au bout, Libra est à même de permettre aux entreprises de s'affranchir de tout contrôle d'Etat sur leurs flux de transactions, de toute déclaration, de toute régulation puisqu'il s'agit d'une blockchain privée à laquelle les banques centrales et autres organismes de régulation, n'ont pas accès. Comment les banques centrales vont-elles réagir ? Laisseront-elles faire ? Selon quel cadre ? Et côté utilisateurs, la Libra inspirera-t-elle suffisamment confiance pour être largement adoptée ? Difficile à dire pour l'instant tant l'annonce a surpris toute la sphère financière.
Mais qui sait, peut-être que le DAF de demain verra passer des liasses budgétaires et des bilans en libras.
Michael Sigda
est spécialiste de la data immobilière. Il a notamment passé 14 ans au sein de Bureau Veritas avant d'intégrer une SSII et d'oeuvrer au sein de HSB Research. Il a également co-fondé plusieurs start-up dont Olarchy, spécialisée dans la digitalisation des processus immobiliers sur blockchain. Passionné de prospective, de nouvelles technologies et d'environnement, il a aussi co-fondé le think tank "WorkToo".
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