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[ITV]: L'Euro PP expliqué aux ETI, par Yann Beckers, associé au cabinet Stephenson Harwood

Le marché des placements privés Euro PP est dopé ces derniers mois par la mise en place d'une charte et d'une documentation de financement standard. Ce financement alternatif, estimé à 4 milliards d'euros en France en 2014, s'ouvre à des ETI de plus petite taille et pour des tickets plus modestes.

Publié par Houda EL BOUDRARI le | Mis à jour le
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[ITV]: L'Euro PP expliqué aux ETI, par Yann Beckers, associé au cabinet Stephenson Harwood

Dans quelles situations l'Euro PP doit-il être envisagé par les ETI ?

Le recours à l'Euro PP peut se justifier pour financer un investissement ponctuel, tel qu'une opération de croissance externe, ou servir à refinancer une partie de l'endettement de l'entreprise même s'il n'a pas vocation à remplacer la dette bancaire. En effet, les investisseurs pour cette classe d'actifs ne viendront que si une partie significative de la dette bancaire reste en place. Plus globalement, et en dehors de tout événement particulier, cette démarche peut répondre tout simplement à une logique de diversification des sources de financement de l'entreprise et s'inscrit dans une tendance de fond de rééquilibrage entre la dette issue des marchés de capitaux et la dette bancaire classique.

En plus d'être remboursable in fine et de libérer ainsi les cash flows de l'entreprise, l'Euro PP offre une maturité plus longue qu'une dette bancaire classique (6/7 ans vs 5 ans), ce qui justifie son coût plus élevé de 150 à 200 points de base par rapport au crédit bancaire. S'il était réservé à ses débuts aux plus grosses ETI, il s'est considérablement démocratisé ces deux dernières années avec aujourd'hui des tickets à partir de 10 à 15 millions d'euros, et bénéficie d'un environnement juridique stabilisé d'inspiration française. Reste l'obstacle psychologique. Beaucoup d'ETI ne se considèrent pas (à tort) éligibles à ce type de financement et les habitudes des Daf sont encore bien ancrées. Leurs interlocuteurs historiques, à savoir les banquiers, ne leur proposent que très rarement cette alternative de financement.

Quels sont les points de vigilance juridique ?

La première question à se poser est celle du choix du format de l'EURO PP : Prêt ou émission obligataire ? Le prêt à l'avantage d'être un instrument plus proche de la dette bancaire, mais certains investisseurs ne sont pas habilités à le proposer. Il faut donc passer par l'émission obligataire qui suppose le respect d'un formalisme juridique un peu plus lourd qu'un prêt classique (autorisation par l'assemblée générale, registre des obligataires, représentant de la masse, libre cession des obligations,...).

Il faut savoir que la nouvelle dette Euro PP vient en principe au même rang pari passu que la dette bancaire présentant des caractéristiques équivalentes. Les engagements dans l'Euro PP sont donc calés sur la dette existante pour éviter qu'un des groupes de créanciers soit privilégié par rapport à l'autre. Si la dette existante est assortie de suretés, il faudra faire preuve d'une vigilance accrue. Dans cette hypothèse, on devra trouver les mécanismes juridiques adéquats pour partager les suretés avec les investisseurs Euro PP. La transaction devient beaucoup plus complexe et nécessitera plus de structuration juridique.

Yann Beckers, associé au cabinet Stephenson Harwood



Quels conseils pour les Daf dans la négociation ?

Bien en amont de la négociation, il est primordial que l'entreprise mette " au carré " ses informations financières et se prépare à la mise en place d'un Euro PP. Il peut s'avérer utile de mandater un " debt advisory " ou une banque arrangeuse pour accompagner le Daf dans la préparation et la communication de son information financière vis-à-vis des investisseurs. Il convient d'être particulièrement vigilant dans la négociation des clauses de limitations (negative pledge ) qui empêchent l'octroi de sûretés futures et négocier des exceptions aux limitations d'endettement, de cession d'actifs, des opérations de croissance externe, ou encore de distribution de dividendes. Les " opérations " nécessaires au bon fonctionnement de l'émetteur ne doivent pas être bloquées par ces clauses et il faut surtout penser à anticiper les opérations futures.


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