Fraude au président : attention danger !
La "fraude au président" toucherait près de 10% des sociétés françaises arnaquées. Prétextant une opération confidentielle très urgente, le fraudeur usurpe l'identité des dirigeants pour détourner des fonds. Un scénario dans lequel la prévention des collaborateurs est un enjeu décisif.
"Allô Jérôme, c'est le p-dg de l'entreprise. J'ai besoin de votre aide. Je viens de recevoir un mail de l'administration fiscale nous enjoignant d'effectuer un virement bancaire de toute urgence pour régulariser notre situation, sous peine de subir un redressement fiscal. Je vous transfère le dossier. Je compte, bien sûr, sur votre plus grande discrétion." Votre comptable ne le sait pas encore mais il est en train de se faire escroquer.
Si cette situation est fictive, ce type d'arnaques, baptisé plus communément "fraude au président", connaît une progression inquiétante depuis leur apparition en France il y a trois ans environ. Cette escroquerie, qui cible tout particulièrement la direction administrative et financière, concerne près de 10% des fraudes rapportées sur l'Hexagone en 2013 selon la dernière enquête sur la fraude, publiée par le cabinet d'audit et d'expertise comptable PwC en mars dernier. La fraude au président aurait même coûté plus de 10 millions d'euros à certaines entreprises, à l'instar de l'usine de production Seretram du groupe Géant Vert, escroquée de 17 millions d'euros l'année dernière.
De la TPE au CAC 40
Si les grands groupes sont des cibles privilégiées, les PME ne sont pas épargnées. " De la TPE à l'entreprise du CAC 40, le phénomène touche des sociétés françaises de toutes tailles ", affirme Jean-Louis Di Giovanni, associé chez PwC au département Litiges et Investigations.
À chaque fois, le même mode opératoire. Le fraudeur contacte au téléphone ou par mail (via une fausse adresse mail) un comptable en usurpant l'identité du dirigeant d'entreprise ou de son responsable. Prétextant une opération urgente et confidentielle (acquisition à l'étranger, règlement d'un contrôle fiscal...), il lui demande d'effectuer un virement manuel dans les plus brefs délais.
" Les fraudeurs sont très bien préparés en amont. Ils connaissent les fonctions et missions de chacun dans l'entreprise. Ils chassent la moindre information sur Internet et les réseaux sociaux permettant de les renseigner sur les congés du dirigeant et des responsables de l'entreprise, l'ambiance de travail, ou même les membres de la famille des salariés. Dans l'une des affaires que j'ai suivies, le fraudeur imitait même la voix et l'accent du chef d'entreprise ", détaille Jean-Louis Di Giovanni. Très bien renseignés, les escrocs sont aussi dotés d'une force de persuasion hors pair basée sur un argumentaire psychologique très bien rôdé.
Gare aux périodes de vacances
Plusieurs réflexes peuvent vous éviter d'être le prochain sur la liste. Jean-Louis Giovanni recommande de sensibiliser les collaborateurs, en leur demandant de ne jamais accepter ce type de demande. " Spécifiez-leur aussi qu'ils ne seront pas punis s'ils refusent d'effectuer un tel virement ", conseille-t-il. Bien souvent, les fraudeurs frappent lors des périodes de vacances du dirigeant ou la veille de week-end allongés. " Une fois que le virement est parti, vous disposez dans le meilleur des cas de moins de 48h pour le bloquer. " Restez vigilant lors de ces périodes propices.
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Il est également possible de limiter les virements manuels à certains collaborateurs seulement, ou instaurer des procédures spéciales pour les règlements en urgence. Désigner un référent en interne alerté en cas de suspicion de fraude est une autre possibilité. Enfin, sachez que les escrocs rivalisent d'imagination et peuvent vous duper en se faisant passant pour votre avocat, un responsable de l'administration fiscale, votre banquier.... " Depuis janvier, on observe une recrudescence des fraudes liées au passage au format Sepa, via des supposés tests de virements. Une PME de moins de 150 salariés s'est ainsi récemment fait dérober plus d'un million d'euros... ", dévoile Jean-Louis Di Giovanni. Mieux vaut donc redoubler de vigilance en demandant par exemple un contre-appel de votre banque pour les virements dépassant un certain montant.
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