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Publié par Eve Mennesson le | Mis à jour le
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Un blocage du Congrès ?

Mais encore faut-il que ces mesures soient réellement mises en oeuvre. "Le gouvernement a annoncé vouloir augmenter la productivité de 20% en quatre ans en favorisant une plus grande ouverture de l'économie et en menant des réformes structurelles, y compris la réforme du marché du travail et la réforme fiscale. Toutes ces propositions restent cependant très floues et le risque d'incohérence ou de retard dans l'exécution des actions à mener est très élevé", prévient Thuy Van Phan.

En effet, avant de pouvoir être appliquées, ces mesures économiques vont devoir passer le barrage du Congrès, ce qui ne sera pas facile. "La démocratie brésilienne est très morcelée, avec beaucoup de micro-partis. Les nouveaux dirigeants vont donc devoir constituer des alliances. Il est fort à parier que les réformes économiques seront moins dures qu'annoncées", anticipe Mabrouk Chetouane. Guillermo Felices pense cependant que la dette de l'État est un sujet tellement délicat que des soutiens ne seront pas difficiles à trouver pour mener les réformes nécessaires.

Par ailleurs, comme le rappelle Pedro Albuquerque, "l'idéologie de Jair Bolsonaro était à l'origine très différente de celle de son ministre des Finances. Cela pose question : on ne sait pas jusqu'à quel point il va soutenir les réformes portées par son ministre." En effet, le nouveau Président a aussi été élu grâce au soutien des militaires, auxquels il a réservé des postes importants au sein de son gouvernement. Or, ceux-ci sont davantage pour le protectionnisme et le contrôle de l'État et pourraient voir l'ouverture et les privatisations d'un mauvais oeil. "Le point commun entre le ministre de l'Économie et les militaires au gouvernement est l'ordre moral, qu'ils souhaitent tous rétablir. Mais sur l'économie, on ne sait pas comment cela va fonctionner", s'inquiète Pedro Albuquerque.

Risque démocratique

Surtout, la personnalité extrémiste de Jair Bolsonaro peut faire craindre un risque démocratique. Il a en effet proclamé son admiration pour le dictateur chilien Augusto Pinochet. "De nombreux Brésiliens rejettent très fortement sa politique et ceux qui le soutiennent peuvent rapidement être déçus, notamment en cas de baisse de salaire", reconnaît Pedro Albuquerque. En effet, l'assainissement des finances publiques peut conduire à une baisse des salaires des fonctionnaires, la libéralisation à une protection sociale moins favorable et la réforme des retraites à des difficultés. "Le ministère de l'Économie, très libéral, va supprimer de nombreuses aides. Cela va créer des difficultés pour les ménages brésiliens", prévoit Daniel Gerino. "Les positions sociales dures de Jair Bolsonaro, en phase avec son approche ultralibérale de l'économie, risquent de provoquer des grèves et de bloquer l'économie", poursuit Mabrouk Chetouane.

Ces révoltes dépendront aussi des résultats du gouvernement en matière de criminalité. Daniel Gerino craint quant à lui une dissolution de la chambre basse et du Sénat et la mise en place d'une dictature militaire. "Jair Bolsonaro va-t-il réussir à maintenir la paix", se demande-t-il. Il pense quoi qu'il en soit que l'incertitude en l'avenir que crée Jair Bolsonaro va stopper les investissements étrangers. Et enfoncer encore plus le pays dans la récession. Il invite les entreprises françaises à attendre avant d'investir plus largement au Brésil.


Journaliste économique depuis 2005, avec une forte appétence pour les sujets environnement/climat, j'ai fondé un Repair Café et suis [...]...

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