Cédric O : « L'IA signe la fin des tâches routinières »
Lors de l'événement Cegid Connections Enterprise, qui se tenait mardi 17 juin, Cédric O., cofondateur de Mistral AI, a comparé l'IA à une nouvelle révolution industrielle. Pour les directions financières, l'enjeu est de se préparer à l'automatisation des tâches intellectuelles.

« Ce que la machine à vapeur a été pour les cols bleus, l'IA générative le sera pour les cols blancs ». Par cette formule limpide, Cédric O., cofondateur de Mistral AI et ancien secrétaire d'État au Numérique, résume l'ampleur du bouleversement à venir. Lors de l'événement Cegid Connections Enterprisedu 17 juin, il a livré sa vision des enjeux stratégiques liés à l'intelligence artificielle.
Pour lui, il ne s'agit pas d'une simple évolution technologique. « Nous sommes au début d'un cycle comparable à celui de la révolution industrielle. L'électricité, la vapeur, la chimie ont transformé la société au tournant des XIXe et XXe siècles. L'IA générative va, de manière similaire, changer profondément nos organisations. »
Alors que les technologies numériques sont souvent perçues comme abstraites ou réservées aux experts, Cédric O. alerte : leur diffusion à grande échelle est une affaire d'organisation et de culture d'entreprise, bien plus que de technique. « Ce n'est pas parce qu'une technologie existe qu'elle s'impose immédiatement. Il a fallu 40 ans entre la première ampoule d'Edison et la première usine électrique chez Ford. La même inertie peut se produire avec l'IA. »
Or, selon lui, ce retard d'adoption peut représenter un risque pour la compétitivité des entreprises françaises. « Aujourd'hui, seuls 3 % des dirigeants de PME affirment comprendre véritablement ce qu'est l'intelligence artificielle. » Un chiffre préoccupant alors que l'IA promet de bouleverser les processus de travail intellectuels, comme l'analyse, le reporting, ou encore la modélisation financière - autant de tâches au coeur de la fonction DAF.
Rôle stratégique
Pour les directeurs financiers, l'enjeu dépasse la simple automatisation. Il s'agit de réinterroger les processus, de piloter les investissements technologiques et de repenser la chaîne de valeur autour de nouvelles compétences. « L'organisation doit s'adapter à la technologie, pas l'inverse », insiste Cédric O. Selon lui, les DAF ont un rôle majeur à jouer dans l'acculturation à l'IA et dans le choix des cas d'usage les plus porteurs : prévisionnel, audit, contrôle interne ou encore gestion des risques.
Il cite d'ailleurs l'exemple d'AlphaFold, un algorithme développé par DeepMind, capable de modéliser la forme des protéines. Ce projet a permis de diviser par dix le temps de développement de certains médicaments. « Cette année, les prix Nobel de chimie et de sciences de la vie ont été remis... à des chercheurs en IA. Cela en dit long sur la puissance d'accélération de ces technologies. »
Révolution lente mais profonde
Pour autant, il ne faut pas confondre effet d'annonce et transformation réelle. « Comme dans toute révolution industrielle, les premiers effets visibles peuvent faire illusion. On surestime souvent les impacts à court terme, mais on sous-estime ceux à long terme. » D'où la nécessité, selon lui, de penser l'IA sur un horizon de dix à quinze ans, en intégrant les ruptures qui s'annoncent dans d'autres domaines comme le spatial, le quantique ou les biotechnologies.
La conclusion est sans appel : les DAF ne peuvent pas se contenter d'observer. Ils doivent anticiper, expérimenter, structurer. « Dans cette nouvelle ère, celui qui comprend l'IA devient acteur de la transformation. Celui qui l'ignore devient spectateur de son propre déclassement. »
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