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Digitalisation de la fonction finance : un véritable enjeu pour les Daf

La digitalisation de la fonction finance fait partie des préoccupations prioritaires des Daf. C'est en tout cas ce qu'il ressort d'une table ronde organisée par Daf Magazine et l'éditeur Blackline. Retour d'expérience.

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Digitalisation de la fonction finance : un véritable enjeu pour les Daf
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Le pilotage de la performance était l'enjeu principal des Daf en 2018, selon une étude PwC sur les priorités du directeur financier. Un pilotage qu'ils n'imaginent pas sans recourir aux outils digitaux. De fait, 89 % des directeurs financiers interrogés souhaitent améliorer leurs reportings et tableaux de bord en intégrant la datavisualisation. Et 59 % souhaitent mettre en place des analyses prédictives. Une tendance que nous ressentons également chez Daf Magazine , à travers nos nombreux échanges avec les directeurs administratifs et financiers : la question du digital revient sans cesse. Mais qu'entendons-nous par "digitalisation" du métier ? S'agit-il de dématérialisation, d'automatisation ou de robotisation ?

La "vieille" et la "nouvelle" digitalisation

Pour Susanne Liepmann, Daf du Groupe d'Ethypharm et présidente du réseau Fi+, il existe une "vieille" et une "nouvelle" digitalisation. La "vieille" digitalisation, ce sont les outils qui apportent efficacité et fiabilité à la fonction finance, tandis que la "nouvelle" digitalisation incite à repenser entièrement la fonction finance, à la transformer. Derrière le terme de "digitalisation" se trouvent donc des dispositifs et des enjeux différents. Et les entreprises ne sont pas toutes au même niveau : certaines d'entre elles n'ont pas encore adopté la dématérialisation des factures fournisseurs tandis que d'autres se soucient d'ores et déjà de prédictif !

Quel rôle pour le Daf dans la transformation digitale de l'entreprise ?

Au-delà de la digitalisation de la fonction finance, le Daf a incontestablement un rôle à jouer dans la transformation digitale de l'entreprise. " Il peut devenir un tiers de confiance " , estime Sophie Milliot, Daf de Neopost. Pour Susanne Liepman, Daf du groupe Ethypharm, il doit être " transversal, communiquant et donneur de sens ". Il garantirait, par exemple, la fiabilité des données sur lesquelles les autres directions de l'entreprise et les opérationnels pourraient s'appuyer pour réussir leur transformation. Car, comme l'a rappelé Pascal Magne, Daf Groupe de Maesa, " la data doit appartenir aux opérationnels ".

L'importance de la qualité des données

Si les Daf ne sont pas toujours d'accord sur les enjeux de la digitalisation (productivité versus remise en cause du rôle de la direction administrative et financière), tous se rejoignent sur la nécessité de se soucier de la qualité des données. Frédéric Huby, vice-président régional de Blackline, explique que " la donnée est le matériau premier de l'intelligence artificielle (IA) ". Sans données de qualité, pas de digitalisation. " Le concept garbage in, garbage out est, de ce point de vue, essentiel ", insiste pour sa part Sophie Milliot, Daf de Neopost. Frédéric Huby invite même à aller plus loin : pour lui, " il faut se soucier de la granularité des données pour pouvoir les exploiter correctement ". C'est bien pour cette raison que certaines entreprises, notamment les ETI et les grands groupes, créent un poste de CDO (chief digital officer). " C'est une fonction sans doute plus importante que celle de DSI ", estime Pascal Magne, Daf Groupe de Maesa.

L'impact sur les équipes

Avec la digitalisation de la fonction finance, de nouvelles fonctions apparaissent... et d'autres disparaissent ! Ainsi, les comptables tels que nous les connaissons vont probablement devoir se réinventer : le rééquilibrage entre la saisie, la construction de rapports et leur analyse avance à grands pas. Demain, ils n'auront plus de saisies à réaliser mais devront effectuer des analyses plus poussées à partir de données entrées automatiquement (par des robots, l'EDI, ou d'autres solutions de dématérialisation).

Dès lors, comment préparer ses équipes à ces profonds changements ? Vincent Guyard, Daf France de Mazars, mise sur les formations. Quant à Pascal Magne (Groupe de Maesa), il évoque le risque que certaines personnes n'arrivent pas, malgré tout, à changer de braquet. Un avis que partage Sophie Milliot, Daf de Neopost : "Le personnel de la comptabilité a déjà beaucoup évolué au rythme des différentes réglementations. Mais auront-ils envie de franchir cette nouvelle étape ?" se questionne-t-elle. La Daf conseille aussi de faire preuve d'agilité vis-à-vis de ses collaborateurs. Il s'agit de réussir à embarquer ses équipes en les impliquant dans tous les projets de digitalisation, le plus en amont possible. Quoi qu'il en soit, cette résistance au changement ne doit pas faire hésiter les Daf qui souhaitent se transformer : si certains collaborateurs ont peur de l'évolution, d'autres, au contraire, la réclament. Pour Vincent Guyard (Mazars) et Susanne Liepmann (Ethypharm), un des enjeux de la digitalisation de la fonction finance consiste à améliorer l'attractivité de la direction financière, qui a toujours le souci de recruter les meilleurs profils.

La difficulté du calcul du ROI

Autre difficulté liée à la digitalisation : le calcul du ROI. Vincent Guyard souligne "le difficile calcul du retour sur investissement de projets informatiques coûteux" mais aussi de la valorisation apportée concrètement par les ­transformations digitales. De son côté, Susanne Liepmann conseille de procéder par étapes, de se donner "des objectifs à court terme afin d'arrêter rapidement le projet si les résultats ne sont pas probants". Au final, le maître mot consiste à faire preuve d'agilité. Un concept facile à dire mais pas toujours aisé à mettre en oeuvre, notamment dans les grandes structures.

Avis d'expert, Lucie Bordelais responsable développement Europe du Sud chez Blackline

"La digitalisation permet au Daf de changer son périmètre d'action "

La digitalisation de la fonction finance n'est pas nouvelle. Tous les services de la finance travaillent avec Excel et sur des ERP. La différence aujourd'hui ? Les outils sont beaucoup plus collaboratifs, avec des workflows qui permettent de travailler en équipe ; une nouvelle approche parfois difficile à appréhender pour un service qui, historiquement, avait pour habitude de travailler seul. La numérisation permet de changer de posture. Un Daf doit se demander quel rôle il veut jouer dans l'entreprise et comment la technologie va l'aider. En clair, en automatisant des tâches simples, le Daf gagnera du temps pour analyser les données et accompagner les autres services dans leurs projets.
Un véritable changement de périmètre. Reste la question de la mise en oeuvre. Je conseille de choisir des solutions agiles, qui peuvent être déployées en trois mois dans un périmètre donné. Cela permet d'appréhender rapidement les forces de l'outil et d'impliquer toutes les équipes.



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