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Comment bien gérer le rush de fin d'année ?

La clôture est à peine terminée qu'il faut déjà enchaîner sur la construction budgétaire. Or, il est parfois utile de regarder dans le rétroviseur pour évaluer comment cette phase cruciale s'est déroulée et trouver des axes d'amélioration pour aborder plus sereinement cette période l'an prochain.

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Comment bien gérer le rush de fin d'année ?
© Copyright: Vladimir Vitek

La fin d'année est toujours animée dans les services des DAF. Mais la surcharge de travail n'est pas une fatalité. Anticipation et organisation permettent de mieux lisser cette période génératrice de stress.

"La clôture de fin d'année représente encore une souffrance pour 95 % des entreprises, principalement dans les PME et les ETI." François Evellin est catégorique. L'expert du cabinet de conseil Advents, spécialiste de la transformation des fonctions Finance, le constate encore chaque jour au gré de ses interventions. "Cette période est redoutée des équipes en raison de la charge de travail importante qu'elle génère. Mais pas seulement ! Les équipes financières sont également soumises à une pression, parfois très forte, des actionnaires. Les chiffres doivent sortir le plus vite possible et du mieux possible." Pour lui, le principal levier à actionner pour atténuer ce rush annuel récurrent entre octobre et février est l'anticipation.

Faire en sorte que la clôture devienne une routine

Premier outil pour éviter de se retrouver à J-5 avec encore une montagne de travaux à régler de front : le pré-closing (hard close). Cela signifie que l'on se met en position de clôture réelle et complète un mois avant la date de l'échéance en traitant onze moins de l'exercice en cours. "Il ne reste donc plus, ensuite, qu'à traiter ce qui ne pouvait l'être avant", préconise Gwenaël Métais, Associate Partner chez EY. Au-delà des avantages du pré-closing en matière organisationnelle, ce procédé permet aux financiers de réajuster et d'optimiser les chiffres en fonction des impératifs du moment de l'entreprise. "C'est quand même mieux d'avoir un aperçu de la tenue de la mariée plutôt que de la découvrir sur le perron de l'église ! En octobre/novembre, il est encore temps d'intervenir de manière intelligente et efficace", sourit Jean-François Cottin, expert-comptable associé au sein du cabinet Fideliance (KPMG). Franck Chéron, associé Capital Humain chez Deloitte, en convient. "En hard close, on peut clôturer presque tout, hormis ce qui est libellé en valeur étrangère ou des éléments spécifiques non prévus. Cela signifie que 4 à 6 semaines avant la clôture réelle, nous pouvons déjà avoir une vision presque exhaustive de la situation."

En parallèle de cette clôture anticipée, de plus en plus d'entreprises, même les non-cotées qui n'y sont donc pas contraintes, mettent en oeuvre des clôtures intermédiaires tout au long de l'année : semestrielles, trimestrielles et même mensuelles. L'expert-comptable de KPMG insiste sur ce point : "Plus on fait de reportings réguliers, moins il y a de travail en fin d'année. Les équipes prennent des habitudes et mettent en oeuvre des mécaniques s'améliorant au fil des mois. En réalité, le rush de fin d'année n'est, ni plus ni moins, que la conséquence d'un défaut d'organisation le reste du temps." À chaque entreprise de définir, pour ces clôtures mensuelles, le niveau de précision dont elle a besoin.

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Selon les experts, la transition d'une clôture annuelle vers une clôture trimestrielle ou mensuelle peut se mener en 24, voire en 18 mois. Éric Palanque, directeur financier depuis un an de l'entreprise lyonnaise Paredes (CA 2017 : 200 millions d'euros ; 650 salariés ; distribution de produits d'hygiène et de protection professionnelle) est justement au coeur de cette transition... "À mon arrivée, nous avions des clôtures trimestrielles. J'ai immédiatement voulu mettre en place des clôtures mensuelles. Cela s'inscrivait dans un contexte de modernisation globale de l'entreprise."

Depuis février, Paredes pratique une clôture chaque mois et tente de gagner en anticipation. "Au départ, nous étions à J+20, nous sommes maintenant à J+10, l'objectif est d'arriver à J+5." L'intérêt de ce rituel ? "Nous approcher le plus possible de la réalité et fournir aux services opérationnels une vision juste de la situation financière de la société." Et au bout d'un an, il n'est pas loin d'atteindre son objectif. Dans son précédent poste, Éric Palanque avait réussi à faire en sorte que la clôture annuelle ne prenne pas beaucoup plus de temps que les clôtures mensuelles. Zakaria Chouchou, DAF des Piscines Desjoyaux, a lui aussi ouvert ce chantier il y a 2 ans. "Nous travaillons désormais plus sereinement au moment de la clôture annuelle, car nous avons déjà une vision bien précise. Les principaux problèmes ont été démêlés auparavant."

Mettre en oeuvre une mécanique bien huilée

Si les pré-clôtures et les clôtures intermédiaires sont des outils efficaces pour mieux surfer sur le rush de fin d'année, il n'en reste pas moins que la clôture annuelle reste lourde et nécessite une discipline de fer et un management particulier des équipes, stressées dans ce moment clé. Les bonnes pratiques ? "Établir un calendrier clair, collaboratif, et précis des tâches de chacun, avec des échéances quotidiennes, conseille Hugues de Boishéraud, expert-comptable associé chez BM&A. Les périodes d'arbitrages doivent être prévues d'entrée de jeu. Toutes les parties prenantes seront mises dans la boucle et sensibilisées à l'obligation de respecter les délais, précise-t-il. Nous voyons, dans beaucoup d'entreprises, des équipes qui peuvent attendre jusqu'à un mois l'arbitrage du DAF. Ce n'est pas une bonne chose. Tout ce qui peut être anticipé doit l'être. Le DAF, dans cette période tendue, fait office de tour de contrôle en vérifiant que chacun a bien le niveau de communication et les éléments suffisants pour avancer. Et fait l'interface avec ses homologues des autres services."

Un management bienveillant

Quand on choisit de devenir DAF ou de travailler dans la finance, on sait que, obligatoirement, les mois de clôture et de consolidation sont chargés. Pour autant, ce n'est pas une raison pour sous-estimer la pression pesant sur ses collaborateurs. "Former ses équipes à la gestion des priorités peut être une bonne idée", soumet Sébastien Ledent, associé chez Mazars. Julien Chambert, du cabinet CBT conseil, martèle : "Le DAF doit bien préparer psychologiquement ses équipes et leur donner tout le déroulé de l'opération. Une bonne organisation génère moins de stress. Il faut aussi leur annoncer la couleur d'emblée s'ils vont devoir travailler tard ou le week-end et leur donner immédiatement les contreparties : taxi pour rentrer tard, jours de récupération, souplesse horaire ou de lieu de travail le reste de l'année..."

Le jour d'après ?

Cette dynamique d'équipe ne doit pas retomber comme un soufflé dès la fin du rush. Côté technique, un point de revue s'impose. "Il est important de faire un bilan a posteriori, de discuter sereinement avec les équipes de ce qui a bien fonctionné et de ce qui doit être amélioré", précise Gwenaël Métais d'EY. Côté humain, il est souhaitable de savoir reconnaître le travail réalisé. "Dans le monde financier, la reconnaissance du travail d'un salarié passe souvent exclusivement par les résultats. Il peut être intéressant de saluer les efforts fournis", signale David Mahé, de Consult'In France.

Il alerte également sur la nécessité de bien savoir gérer les temps faibles, après avoir bien réussi ses temps forts. "Pour que les salariés ne se démobilisent pas, cela peut être le moment de proposer un projet transverse de transformation." Le DAF de Desjoyaux a, lui, trouvé un autre moyen, très simple, pour maintenir le bonheur des clôtures : un bon repas d'équipe après le rush !

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