Recherche

  • Imprimer

Quotidien de Daf - Ferdinand Brunet, Daf de Memo Bank

Publié par Florian Langlois le | Mis à jour le

La rédaction a le plaisir d'accueillir aujourd'hui Ferdinand Brunet, directeur financier de Memo Bank, pour ce nouvel épisode de "Quotidien de Daf". Il revient sur son début de carrière, qui ne le destinait pas à la finance d'entreprise, détaille le rôle spécifique du Daf dans une banque et aborde les sujets de l'ESG et de l'inflation, plus que jamais d'actualité.

Pouvez-vous nous présenter Memo Bank ?

Memo Bank est une nouvelle banque, une banque destinée aux entreprises. Nous nous sommes rendus compte qu'il existait un vide technologique par rapport aux banques qui étaient un peu désuètes en termes d'expérience utilisateur. Nous nous adressons à toutes les entreprises avec un chiffre d'affaires de plus d'1 million d'euros. L'objectif est de faire du financement, des dépôts et surtout résoudre des problématiques de flux.

Vous avez fait un IUT gestion des entreprises et des administrations, vous ne vous destiniez pas au départ à la finance d'entreprise ?

Non, effectivement. C'était une opportunité qui m'a été donnée après le lycée. Je trouvais que le DUT GEA (Gestion des Entreprises et des Administrations) était assez pratico-pratique, permettait d'apprendre beaucoup de choses et de rentrer sur la partie finance. Mais ce n'était pas forcément une vocation ultime.

Qu'est-ce qui vous a conduit à être directeur financier ?

Beaucoup de circonstances et de rencontres. Après mon DUT, j'ai fait une école de commerce, ce qui était le chemin le plus standard, avec tout de même une majeure en finance, car c'était ce qu'il y avait de plus dur à l'époque. J'ai par la suite rencontré des gens qui travaillaient dans les big four, notamment chez KPMG. J'ai donc bifurqué chez KPMG en banque, simplement parce qu'il y avait de la place. Ca m'a vraiment passionné, j'ai adoré. Je suis resté cinq ans chez KPMG. J'aimais beaucoup, mais j'avais envie de voir d'autres choses. Et cencore une fois, ce sont des rencontres qui m'ont permis d'intégrer ING, qui était à l'époque une toute petite banque, c'était le début. On venait à peine de lancer le compte courant. C'était super.

Pour vous, qu'est-ce qu'un directeur financier aujourd'hui ? Quel est son rôle ?

Ls directeurs financiers, notamment de banque, c'est un métier un peu particulier, c'est une entreprise qui est régulée, donc il y a beaucoup de cadres à donner. Le directeur financier, pour moi, principalement, son objectif, c'est de donner le cadre. C'est-à-dire définir le terrain de jeu pour le CEO, la stratégie, dire ce qu'il est possible de faire. Mais il y a des règles à respecter qui ne sont pas simples dans les banques. On doit toujours être au courant de ce qui va se passer, anticiper les futures lois et donner le cadre à tout le management.

Vous êtes aujourd'hui chez Memo Bank, vous êtes passé par DittoBank et ING, vous l'avez dit. En tant que CFO dans une banque, est-ce qu'on a la même approche au niveau des risques, des financements ?

Oui, principalement. Il y a beaucoup de points communs. C'était un peu différent chez ING, parce que c'était destiné à des particuliers et qu'il y avait un groupe derrière, donc quand même une sécurité en termes de cadre, de directive. On suivait un peu la politique du groupe. Ditto, c'était très différent, il y avait moins de cadre. Et chez Memo Bank, on est sur un environnement qui est vraiment très sain, très cadré. Je dirais que les trois groupes étaient des expériences très différentes. Et la troisième est très intéressante.

En tant que CFO dans une banque, comment est-ce que vous avez vécu la crise des banques en début d'année ?

C'était assez surprenant. C'est principalement arrivé aux États-Unis, sur une banque en particulier. L'administration Trump qui avait laissé beaucoup de liberté aux banques moyennes. On n'a pas du tout ce cadre-là en Europe, donc on ne se sentait pas concerné d'un point de vue européen. Mais on faisait attention aux mouvements de foule, c'est-à-dire à des retraits massifs de dépôts. Donc on était un peu sur le qui-vive pour vérifier que tout se passait bien. Mais on a eu très peu d'impact. Pour Credit Suisse, c'était un peu différent. Il y a eu une peur des marchés sur Credit Suisse, ce qui a donné lieu à une fusion qui était assez logique, ou en tout cas qui semblait la bonne réponse à donner par le régulateur.

Pour en revenir à votre métier, comment est-ce que vous l'avez vu évoluer depuis 5 à 10 ans ?

Il y a eu beaucoup d'évolutions. La première, c'était dans les années 2010. Ce qu'on recherchait d'un directeur financier, c'était la casquette comptable, notamment les gains qu'on pouvait donner avec des bonnes classifications. Il y avait cette notion vraiment de comptabilité et comment faire pour optimiser un peu le résultat en fonction de la connaissance de la comptabilité. Ensuite, je dirais qu'à partir de 2015-2016, le directeur financier est devenu un peu le partenaire du CEO. Il est plus là maintenant pour anticiper les évolutions, ce qui va se passer au niveau des taux, comprendre vraiment l'environnement de marché et aider à définir la stratégie de l'entreprise. Un directeur financier de banque à l'heure actuelle va vraiment regarder les revenus, va essayer de maîtriser les coûts, mais va vraiment regarder les revenus et voir comment il est possible d'anticiper le contexte de marché et comment définirune bonne stratégie. Ca devient plus un partenaire stratégique qu'un comptable.

Quelles sont les évolutions à venir que vous anticipez ?

On est dans un cycle qui est très étonnant. En 2008, les banques ne se prêtaient plus d'argent entre elles, à cause des subprimes, de la crise de liquidité, ce qui a failli freiner le marché. C'était vraiment une grosse crise bancaire avec des mouvements de dépôt qui étaient vraiment très forts. Il y a eu par la suite des taux négatifs. On a vécu pendant 10 ans, 12 ans avec de l'argent gratuit. C'est quelque chose que la plupart des particuliers et des entreprises ont oublié, que l'argent a un coût et que maintenant ce coût est de plus en plus important. Ce qui compte, ça va être l'accès au crédit et non plus tellement le taux. Donc les banques se deviennent un peu plus frileuses qu'avant. Ce qui provoque un changement de marché considérable. Les crédits immobiliers pour les particuliers, si on prend cet exemple, à 5-6%, c'est quelque chose que j'ai connu, que nos parents ont connu. L'inflation change complètement la donne. Dans les 1 an et demi, on anticipe une récession, ce qui risque de donner une année un peu compliqué. Mais dans les 4-5 ans, l'accès à l'argent qui est relativement cher.

Parmi les autres problématiques majeures du métier de CFO, on entend souvent parler de l'ESG. Quel est le rôle du financier là-dedans, autant pour un financier d'entreprise qu'un financier investisseur ?

À la base, le caractère ESG a été pris par le département RH et le département RSE. Et je pense que c'est une erreur. Beaucoup le font très bien mais je pense que la finance a l'habitude de comptabiliser. Et ce qu'on va demander dans le futur, cà sera aux entreprises de comptabiliser et de faire leur bilan carbone. Et ça, c'est des réflexes que les comptables ont, que la finance a, à savoir comment intégrer, prendre, mettre dans des systèmes, faire un reporting. Ca va devenir demain la nouvelle comptabilité. Demain, le rôle de la finance va être, en premier lieu, de dire si l'entreprise est rentable ou pas, avec des KPI. Dans un deuxième temps, c'est d'un point de vue bilan carbone, comment je me situe, comment je me positionne. Une comptabilité qui mélange financer et extra-financer. Et je pense que le bon service, c'est la finance.

Quel est le projet que vous avez préféré mener au cours de votre carrière ?

Il y en a eu beaucoup. J'ai adoré chez ING faire le lancement de la banque, c'était très intéressant. D'un point de vue européen on a mis en place un reporting complètement européen, avec plusieurs autres entités du groupe, c'était très intéressant. Et chez MemoBank, il y a vraiment tout à créer : la carte bancaire, le financement ... On a nos clients qui nous appellent et qui nous formule leurs besoins, qui nous demandent s'il est possible d'y répondre. On a alors toute l'équipe qui se met dessus. Cela passe par la partie produit, qui va vraiment concevoir le produit, mais aussi par la partie finance, qui va définir si c'est rentable. En fonction des demandes de nos clients, on réinvente un peu la banque. On a une équipe qui est un peu une dream team, ce qui permet de faire des trucs super et très vite.

Quel est le prochain challenge que vous aimeriez avoir à relever dans votre carrière ?

Celui sur lequel je suis est vraiment pas mal. J'aimerais bien aider Memo Bank à s'expandre à l'international. C'est quelque chose qui n'a pas été fait pour le moment. Les banques sont complètement indépendantes les unes des autres. Que ce soit pour les particuliers ou les entreprises, si vous ouvrez un compte en banque en France et un autre en Italie, ce sont deux mondes différents. Notre ambition, c'est d'être européens. On a prévu d'aller se lancer dans d'autres pays relativement rapidement. Et pouvoir faire une Europe des banques, avec une banque qui peut avoir un multicompte dans plusieurs pays, avec un RIB européen, il y a plein de choses à faire. Et du point de vue de la direction financière, ça implique pas mal de cash pooling, de trésorerie, il y a tout à mettre en place et ça va être un gros projet.

Qu'est-ce qui vous fait lever tous les matins ?

D'un point de vue boulot, mes équipes, ce sont des gens avec qui je travaille depuis 10-15 ans pour la plupart. Il y a une transparence totale. Ce son vraiment les gens principalement.

Et au contraire, qu'est-ce que vous n'aimez pas faire ? La tâche que vous êtes obligé de faire, mais que vous n'aimez pas ?

On se fait contrôler, donc parfois on nous pose des questions sur quelque chose qui est arrivé 6 mois après. Mais ça fait partie du jeu. Non, j'aime bien tout faire. J'ai eu de la chance. Je fais un métier qui est passionnant. Pouvoir le faire et pouvoir vivre ça, je trouve ça génial.

Avec l'expérience et le vécu que vous avez aujourd'hui, quel conseil vous donneriez à l'homme que vous étiez à 15 ans ?

Trompe-toi. Trompe-toi, vraiment. Je trouve que c'est les erreurs d'une carrière qui font qu'on progresse. On a le droit de faire des choix multiples, on a le droit de faire plein de choses. Il faut y aller, il faut le faire à fond. C'est vraiment très important pour soi de ne pas rester bridé dans un univers et de se fermer des occasions, au contraire.

Si la finance était un plat, quel serait-il ?

J'ai envie de dire un rôti de boeuf avec des pommes de terre. C'est très bon, ça ne prend pas beaucoup de temps à faire, c'est un super plat. Je vais même faire une transition vers l'écologie. Ce n'est pas hyper écologique pour le moment. Et on va essayer de transformer ce plat, il va évoluer vers un futur, on ne sait pas encore ce qu'il donnera, mais qui sera de plus en plus veggie.

La rédaction vous recommande

S'abonner
au magazine
Retour haut de page