Recherche

Acrelec ne met pas de bornes à son ambition

Entreprise innovante, connue pour ses bornes de commande dans le domaine de la restauration rapide, Acrelec doit sa forte croissance notamment à un développement rapide à l'international. Présente dans 11 pays, elle compte encore se développer en Europe, mais aussi en Amérique et en Asie.

Publié par le
Lecture
23 min
  • Imprimer

 

Les bornes sont intégralement produites en France, à Saint-Thibault-desVignes, en Seine-etMarne (77).

Les bornes sont intégralement produites en France, à Saint-Thibault-desVignes, en Seine-etMarne (77).

Acrelec: le nom de cette petite entreprise française ne vous dit peut-être rien. Pourtant, ses produits peuplent petit à petit notre quotidien. Ce sont ces bornes, au McDonald's ou au Quick, qui permettent de commander et de payer ses sandwichs avant d'aller les chercher à un comptoir spécial. Histoire d'aller plus vite. Ce sont aussi ces solutions «drive», chez Auchan ou Carrefour, grâce auxquelles on commande ses courses sur Internet avant d'aller les récupérer, toutes prêtes, en magasin. Les bornes d'Acrelec font aussi leur apparition dans des enseignes de la distribution spécialisée, Ikea et Alinéa en tête. «Notre ambition est de devenir le spécialiste du parcours client et de la gestion du flux de commandes», résume Christophe Naillot, le directeur administratif et financier de la société depuis 2010. Et ce en France, mais aussi de plus en plus à l'étranger. Car Acrelec propose ses produits dans 45 pays (notamment en Europe, au Maroc, à Taïwan et aux Etats-Unis) et travaille avec de grandes chaînes comme Burger King ou Tesco. C'est d'ailleurs grâce à son développement à l'international qu'Acrelec compte augmenter son chiffre d'affaires. «Aujourd'hui, l'international représente 35 % de nos ventes. Il y a de grandes chances pour que le ratio France-international soit inversé d'ici trois à cinq ans», avance Christophe Naillot.

S'APPUYER SUR DES CLIENTS LEADERS SUR LEUR MARCHE

La société Acrelec a vu le jour en 2004, lorsque les deux fondateurs, Jacques Mangeot et Jalel Souissi, ont repris une société de sous-traitance dans la défense. Ils ont complètement réorienté son activité pour lancer les fameuses bornes de commande à destination de la restauration rapide. «Tous deux venaient du monde de la restauration rapide et de l'informatique, et étaient persuadés que les points de vente allaient de plus en plus faire appel à la technologie», raconte Christophe Naillot. Leur rapide succès leur a donné raison. Leur stratégie: se baser sur des entreprises leaders sur leur marché, telles que McDonald's ou Carrefour. Une fois les différents produits d'Acrelec bien implantés dans ces groupes, les concurrents peuvent être démarchés. En France et à l'étranger. Grâce à cette stratégie, Acrelec a doublé son chiffre d'affaires tous les deux ans, passant d'un CA de 3,6 millions d'euros en 2004 à un CA estimé à 48 millions d'euros cette année. Si, sur chaque marché, les challengers suivent les leaders et acquièrent les produits d'Acrelec, c'est que la société a toujours fait des efforts pour proposer des solutions de qualité, et surtout établies sur mesure, adaptées aux besoins des clients. «La proximité avec le client fait partie de nos valeurs», souligne Christophe Naillot. Depuis le début, le business model d'Acrelec est basé sur la maîtrise de l'intégralité de la chaîne de valeurs: conseil, conception de solutions informatiques sur mesure (au niveau logiciel et matériel), distribution, installation et maintenance. «Nous le faisons dans la majeure partie des pays où sont vendus nos produits, notamment via nos filiales propres dans 11 Etats, rapporte le Daf. Car nous voulons délivrer une prestation de qualité sur l'ensemble de la chaîne. » La société est présente dans les pays où la taille de marché est suffisante. Dans les autres, elle travaille en partenariat avec des distributeurs et des installateurs. Au niveau de la production, elle est intégralement réalisée en France, à Saint-Thibault-des-Vignes, en Seine-etMarne (77). De quoi plaire aux défenseurs du «made in France».

PERMETTRE FINANCIEREMENT L'INSTALLATION DE FILIALES ETRANGERES

Dans ce contexte de croissance particulièrement rapide, le rôle du Daf est d'accompagner le développement du groupe. Notamment à l'international. Christophe Naillot participe ainsi à l'installation de filiales à l'étranger en créant des sociétés ou en rachetant de petites unités d'installation et de maintenance. Dernier pays où Acrelec a installé une filiale: l'Allemagne. L'année dernière, le groupe y a racheté une activité de services et a créé deux sociétés orientées solutions. «A chaque fois, la stratégie est de s'appuyer sur des compétences locales, soit grâce aux actionnaires de la société rachetée, soit via un expert local, pour bénéficier d'un savoir-faire et d'une reconnaissance sur le marché», relate Christophe Naillot. Les sociétés rachetées sont toujours trouvées par des contacts, et non par mandat. Dans ces créations de filiales à l'étranger, la grosse partie du travail du directeur financier est juridique, notamment sur le plan contractuel, en partenariat avec un cabinet d'avocats international. Il s'occupe aussi, bien entendu, de toute la partie financière, comme, lors d'un rachat, de l'évaluation de la valeur de l'entreprise et de toute la partie de négociation. Il établit également un «shareholder agreement» par actionnaire pour déterminer un mode de gouvernance de l'entreprise. Tout un processus très complexe, aux dires de Christophe Naillot: «Pour une PME, c'est compliqué de faire de l'international. Il y a différentes barrières: celle de la langue, de la culture, des barrières douanières, également, et même logistiques et bancaires. » Un projet en Amérique du Sud est actuellement en suspens à cause de problèmes techniques avec les systèmes bancaires locaux. Le développement à l'international est également très onéreux, avec un passage obligé par un cabinet d'avocats international. Il revient donc au Daf de chercher des financements. «Nous allons chercher des subventions d'organismes d'Etat qui aident les entreprises sur ces thèmes-là», explique Christophe Naillot. Acrelec bénéficie du soutien de l'entreprise publique de financement des PME Oséo, qui garantit les investissements du groupe réalisés dans sa filiale américaine. La société reçoit également une aide financière et un appui technique de la région Ile-de-France via le programme PM'up (lire l'avis d'expert p. 17).

STRUCTURER LE CONTROLE DE GESTION

Mais une fois ces filiales à l'étranger créées, il s'agit de réellement les intégrer au groupe. Les premiers comptes consolidés, réunissant tous les résultats de toutes les filiales, n'ont été établis qu'en 2010, lorsque Christophe Naillot a rejoint Acrelec. Auparavant, la direction financière était assurée par un consultant à mi-temps. La publication de ces comptes consolidés n'a été possible qu'après un gros travail de restructuration du contrôle de gestion, surtout à l'étranger, qu'a mené l'actuel directeur financier dès son arrivée. Première étape dans son travail: comprendre les plans de compte et les méthodes comptables des filiales de chaque pays. «La maturité et le niveau d'organisation des différents pays n'étaient pas homogènes. Certains avaient externalisé leur comptabilité, alors que pour d'autres, elle était internalisée», explique Christophe Naillot. Ensuite, après une explication de la méthode de consolidation à chaque filiale, des tableaux représentant les flux groupe et hors groupe ont été construits pour l'ensemble des pays et une aide a été mise en place pour les remplir. Une mission emplie de pédagogie pour laquelle la barrière de la langue a constitué une réelle difficulté. Mais les délais ont été tenus et les comptes consolidés ont pu être publiés! «Cela apporte une meilleure visibilité pour nous permettre de mieux piloter. » Le directeur financier cherche désormais à harmoniser les banques à l'international. «Nous traitons en tout avec 20 banques, souligne-t-il. Je mène actuellement un chantier pour organiser les flux bancaires à l'international et les regrouper sur trois banques afin de mieux maîtriser le cash. »

En attendant la mise en place de cette harmonie bancaire, l'avancée sur les reportings financiers, établis mensuellement, permet à la direction de suivre les résultats de chaque filiale et de chaque business unit afin d'en estimer la rentabilité. Ce qui permet de cadrer la stratégie de l'entreprise. «Nous avons une véritable culture du résultat», lance Christophe Naillot. Chez Acrelec, le Daf aide au pilotage de la stratégie commerciale et valide de manière collégiale si les opportunités présentées par chaque directeur de business unit valent le coup en termes de retour sur investissement. «Je les questionne sur la réalité du projet, s'il s'agit réellement d'une commande ou seulement d'une prise de contact, la volumétrie attendue, le prix de vente estimé... C'est seulement ensuite que nous décidons», raconte Christophe Naillot. Car la société est victime de son succès: elle a du mal à s'organiser en interne pour répondre à toutes les demandes. «Comme nous délivrons des solutions clés en main, cela nécessite beaucoup de ressources en interne. Ressources dont nous ne disposons pas toujours», explique Christophe Naillot, qui revêt ici son costume de DRH. D'où le choix de travailler pour des grands groupes: grâce à leurs nombreuses filiales, en France comme à l'étranger, le budget R & D est ainsi utilisé pour des projets à fort potentiel de déploiement. Surtout, le Daf-DRH, qui déplore les difficultés de l'entreprise «à effectuer des recrutements qualifiés», réfléchit à une politique d'embauche. Même si faire appel à un cabinet de recrutement pourrait être une bonne idée, le coût élevé le fait reculer. Et les bâtiments où se trouve la production devront être agrandis, la place commençant à manquer. «Ce n'est pas prévu à court terme, mais il va falloir remédier à ce problème. »

A LA RECHERCHE DE NOUVEAUX MARCHES: LA DISTRIBUTION SPECIALISEE

Même s'il n'est pas toujours facile d'accompagner la croissance de ce groupe en plein essor, la direction cherche encore et toujours des axes de développement. A l'international, tout d'abord, à travers sa stratégie qui consiste à s'appuyer sur ses clients, de grands groupes internationaux, à qui il peut proposer des produits pour leurs différentes filiales et grâce auxquels il acquiert une notoriété dans différentes parties du globe. La priorité est le marché européen, notamment l'Allemagne, la Grande-Bretagne, l'Espagne et les Pays-Bas, pays dans lesquels il peut s'appuyer sur des filiales déjà implantées. A moyen terme, Acrelec compte se développer aux Etats-Unis, en s'appuyant sur sa filiale basée dans l'Etat de New York, et à plus long terme en Asie, grâce à sa branche taïwanaise. «Le marché doit être mature pour accueillir ce type de solutions, explique Christophe Naillot. La France est plutôt en avance sur les solutions «drive» et les bornes de commande.» En France, justement, Acrelec cherche toujours à se développer sur les marchés de la restauration rapide et de la grande distribution. Pour ce dernier, il met en place des bornes in-store pour proposer d'autres services que le «drive». Mais la société dépend fortement de la capacité de déploiement et de financement de ses clients. «S'il s'agit de franchisés, c'est eux qui doivent acheter nos solutions», indique Christophe Naillot.

Le groupe compte aussi poursuivre sa conquête de deux nouveaux marchés: la distribution spécialisée, en s'attaquant aux grandes enseignes, et la restauration traditionnelle, secteur dans lequel il a déjà comme clients les grills Courtepaille et le groupe des brasseries Flo. « Notre ambition est de continuer à afficher une croissance forte, même si c'est de plus en plus difficile, rapporte Christophe Naillot. Nous souhaitons doubler notre chiffre d'affaires tous les trois ans. » Acrelec est une PME qui ne manque pas d'ambition et qui n'y met pas de bornes.

REPERES

Raison sociale: Acrelec Activité: Edition et fabrication de solutions informatiques dédiées aux points de vente
Forme juridique: SAS
Dirigeants: Jacques Mangeot et Jalel Souissi
Daf: Christophe Naillot
Effectif: 315 salariés
CA 2011: 44MEuros
CA 2012 prévisionnel: 48 MEuros

«Je mène actuellement un chantier pour organiser les flux bancaires à l'international et les regrouper sur trois banques afin de mieux maîtriser le cash.»
CHRISTOPHE NAILLOT, DAF D'ACRELEC

HERVE BERTHON, consultant chez Sofred, cabinet de conseil qui sélectionne et accompagne des PME franciliennes candidates au dispositif d'aide régionale PM'up

HERVE BERTHON, consultant chez Sofred, cabinet de conseil qui sélectionne et accompagne des PME franciliennes candidates au dispositif d'aide régionale PM'up

AVIS D'EXPERT
Le caractère innovant de leurs produits nous a séduits»

Qu'est-ce que PM'up?
Lancé par la région Ile-de-France, PM'up est un dispositif qui a pour but d'accompagner les PME franciliennes afin qu'elles deviennent des entreprises de taille intermédiaire. Il s'adresse à des PME à fort potentiel en termes de création d'emploi et de développement à l'international dans 12 filières considérées comme prioritaires par la région. Nous sommes également sensibles à l'innovation et au développement durable. Les entreprises de plus de 20 salariés sont prioritaires. PM'up consiste en une subvention financière pouvant aller jusqu'à 250000 euros et en un accompagnement sur une période de trois ans. Lancé en 2008, ce dispositif a aidé environ 450 PME. Acrelec a été une des premières entreprises lauréates en 2008.
Pourquoi Acrelec a-t-elle été sélectionnée par le dispositif PM'up?
Acrelec réunissait à la fois une capacité importante de création d'emplois et un fort potentiel de développement à l'international. Le caractère innovant de leurs produits, qui démarraient commercialement plutôt bien, nous a séduits. Et la société présentait un plan de développement important.
De quelles aides a bénéficié Acrelec?
Nous avons défini avec Acrelec un plan de développement sur trois ans voté par la région et définissant les actions que l'entreprise s'engageait à effectuer. L'entreprise lauréate ne peut toucher ses subventions que lorsque des preuves de la réalisation de ces actions ont été apportées. Dans le cadre du dispositif PM'up, Acrelec a pu réaliser une étude de marché au Canada, participer à des salons et bénéficier d'un conseil juridique aux Etats-Unis pour y installer une agence. L'entreprise a également fait l'acquisition d'un logiciel de comptabilité ERP. Aujourd'hui, Acrelec a terminé son parcours et nous sommes en train de réaliser un bilan avec la région. La société a réalisé en grande partie son plan de développement et a atteint ses objectifs de création d'emplois.

ÈVE MENNESSON

S'abonner
au magazine
Retour haut de page