Recherche

ASSURER SES LOCAUX INDUSTRIELS

Bien qu'assurer ses locaux industriels ne soit pas une obligation, ce n'est pas pour autant une démarche à prendre à la légère. Etablir son contrat d'assurance avec rigueur permet, en effet, d'être correctement indemnisé en cas de sinistre. Gros plan sur les points à étudier avec vigilance.

Publié par le
Lecture
13 min
  • Imprimer

«L'assurance des locaux d'une entreprise industrielle n'est pas obligatoire, mais elle est nécessaire», indique Stéphane Pénet, directeur des assurances de biens et de responsabilité de la Fédération française des sociétés d'assurance (FFSA). Mis à part si l'entreprise est locataire ou si elle a souscrit à un crédit-bail, il est tout à fait possible de ne pas s'assurer, même si une telle décision n'est pas recommandée. En effet, aucune société n'est à l'abri d'une tempête, d'une inondation ou d'un incendie. Dans ces cas-là, une assurance permet de continuer son activité... Encore faut-il être bien assuré pour être correctement indemnisé.

IDENTIFIER LES RISQUES

Première étape: définir les risques auxquels sont soumis vos locaux industriels. Les principaux sont l'incendie, l'explosion, le dégât des eaux mais aussi les tempêtes, les catastrophes naturelles, le terrorisme ou encore le vandalisme. «L'identification des risques est une phase importante: c'est à partir de la sinistralité potentielle qu'est rédigé le contrat», insiste Maître Alexandre Gruber, avocat associé au sein de l'équipe responsabilité et risques industriels/assurance chez LMT Avocats. Généralement, les contrats d'assurance sont ajustés aux besoins de l'entreprise, suite à une évaluation menée par un expert. «Nous réalisons un diagnostic qui permet de déterminer à la fois les mesures adéquates de prévention des risques et un dispositif d'assurance adaptée au profil de risque», décrit Eric Demange, directeur de la division entreprises, PME et solutions affinitaires de Marsh, société de conseil en gestion des risques et de courtage d'assurance. Contrat d'assurance et mesures de prévention des risques vont généralement de pair, d'autant que ces dernières permettent de réduire, parfois significativement, le coût de l'assurance. «De plus en plus d'assureurs refusent de couvrir les entreprises qui ne sont pas équipées en protection incendie», signale Me Alexandre Gruber (LMT Avocats). Or, ce genre d'équipement est obligatoire pour les bâtiments recevant du public, mais pas pour les entreprises.

Une fois les risques évalués, l'assureur propose un contrat adapté. Si l'entreprise travaille avec un courtier, ce dernier rédige un cahier des charges à partir duquel les assureurs sont mis en compétition. «D'une façon générale, la garantie des locaux couvre les dommages aux bâtiments et les responsabilités encourues du fait de ces dommages, à l'égard des voisins ou tiers, locataires ou propriétaires, clients ou fournisseurs», précise la FFSA. Le contenu des bâtiments est, lui aussi, couvert. Par ailleurs, les assureurs proposent de plus en plus de couvrir le risque «écologique», en cas de pollution des terrains.

PENSER A L'ASSURANCE «PERTES D'EXPLOITATION»

En revanche, ils ne proposent pas systématiquement de couvrir les pertes d'exploitation, c'est-à-dire lorsque l'entreprise, suite à un dommage, ne peut pas poursuivre son activité, subissant par là même une diminution de son chiffre d'affaires, alors que les charges fixes subsistent. «La marge brute doit pouvoir être maintenue au niveau où elle se serait trouvée s'il n'y avait pas eu de sinistre. L'assurance pertes d'exploitation doit aussi pouvoir prendre en charge les frais supplémentaires indispensables pour un redémarrage très rapide de l'activité», indique le Traité pratique de sécurité incendie, édité par le Centre national de prévention et de protection (CNPP) (voir encadré p. 59). Cette assurance est généralement souscrite sous la forme d'une garantie supplémentaire, pour une durée de 12 mois.

VERIFIER LA LISTE DES EXCLUSIONS

Les contrats d'assurance peuvent prendre deux formes: «au péril dénommé», qui assure tous les risques nommés dans le contrat, ou «tous risques sauf», qui liste les exclusions. Ce dernier type de contrat est préférable, car il est impossible de penser à tous les risques. De plus, avec ce type de contrat, c'est à l'assureur de prouver que le risque n'est pas couvert en cas de litige. Mais le choix des polices d'assurance «tous risques sauf» implique de bien étudier la liste des exclusions. «Par exemple, la chute d'aéronefs est un risque souvent exclu. Mais il peut être judicieux de lever cette exclusion si les locaux se situent près d'un aéroport», indique Me Alexandre Gruber (LMT Avocats), expliquant que les exclusions peuvent être rachetées après négociation. A chacun, donc, de s'assurer que les exclusions listées dans son contrat d'assurance sont bien des risques qui ont peu de chance de survenir.

Autre point sur lequel il faut être attentif: l'exactitude des informations concernant les locaux à assurer: superficie, nature des activités exercées, biens renfermés... Tout doit être mentionné avec précision si l'on veut être correctement indemnisé (voir l'encadré ci-dessous).

Une fois le contrat établi et signé, il ne faut pas pour autant le laisser dormir dans un tiroir! «Souvent, on met la police d'assurance dans un coin et on l'oublie. Cette négligence se paie s'il y a une modification de l'activité, de la taille de l'entreprise... », prévient Me Stanley Chaney, avocat associé chez LMT Avocats, qui conseille de réviser son contrat au moins une fois par an. Si une évolution majeure intervient dans l'activité, la taille de l'entreprise ou si le stock varie fortement, il convient donc de le signaler immédiatement à l'assureur.

La sous-déclaration est à l'origine de la plupart des litiges entre assuré et assureur, qui peuvent aller jusqu'au Tribunal de commerce, voire au Tribunal de grande instance. Pour ne pas en arriver là, il peut être intéressant de faire appel à un expert d'assuré. «Il évalue le montant des dégâts, délivre un rapport et négocie la valorisation du sinistre, explique Eric Demange (Marsh). Il faut vérifier alors dans les contrats d'assurance dommages que la clause qui permet de faire supporter les honoraires de cet expert à l'assureur est bien présente.» Et, surtout, bien étudier ses contrats avant d'y souscrire. En espérant de ne pas avoir à y recourir!

ERIC DEMANGE

ERIC DEMANGE

ERIC DEMANGE, DIRECTEUR DE LA DIVISION ENTREPRISES, PME ET SOLUTIONS AFFINITAIRES DE MARSH

« En cas de sinistre, vous pouvez faire appel à un expert d'assuré, qui évalue le montant des dégâts et délivre un rapport. »

A LIRE: Faire face au risque d'incendie

Depuis 30 ans, le Centre national de prévention et de protection (CNPP) publie un guide pratique qui renferme une mine d'informations concernant la sécurité incendie.
Traité pratique de sécurité incendie, CNPP, 2010 (12e édition), 814 pages, 145,97 euros.

CE QUE DIT LA LOI: Assurez vos locaux à leur juste valeur

Il est important d'assurer vos locaux et les biens qu'ils renferment à leur juste valeur. En effet, selon l'article L. 121-5 du code des assurances, l'assureur doit appliquer la règle proportionnelle de capitaux en cas de sous-déclaration, c'est-à-dire si la somme garantie est inférieure à la valeur réelle au jour du sinistre. Dans ces cas-là, même quand l'assuré est présumé de bonne foi, l'indemnité est réduite dans la proportion de cette sous-déclaration. Dans le Traité pratique de sécurité incendie (édité par le CNPP, voir l'encadré ci-contre), on apprend que, pour atténuer un peu les effets de cette règle proportionnelle, certains assureurs ont lancé des formules de garanties indexées, c'est-à-dire des contrats dans lesquels, dès la souscription, il est prévu que même en l'absence d'avenant, la prime et les sommes garanties sont révisées chaque année en fonction d'un indice indépendant des deux parties contractantes.
Au-delà de cette règle, il est important d'assurer ses locaux industriels à leur juste valeur pour être indemnisé à hauteur de la perte subie. Cela concerne non seulement les bâtiments, mais aussi les biens qu'ils renferment. «Pour être sûr que les valeurs déclarées correspondent bien à la réalité, il ne faut pas hésiter à faire appel à un cabinet d'expertise indépendant», conseille Dominique Estève, p-dg d'ACE Assur, société de courtage. Attention, si vous hébergez des biens ou des marchandises qui ne vous appartiennent pas, veillez à ce qu'ils soient eux aussi assurés. Pour l'équipement informatique, ne vous contentez pas d'assurer le matériel, mais également les données qui se trouvent à l'intérieur, pour que le travail de récupération des données soit compensé.

EVE MENNESSON

S'abonner
au magazine
Retour haut de page